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par le Dr Raymond Vergès

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« In vérité i déranz »

Billet philosophique

vendredi 28 décembre 2012


Est-ce que des Réunionnaises et des Réunionnais qui souffrent au quotidien de la violence de la misère sont capables de ’philosopher’, c’est-à-dire de réfléchir et d’échanger des idées sur notre façon de vivre ensemble ? Oui ! Une preuve, parmi d’autres : le ’sobatkoz filo’ organisé lundi dernier par le Comité des Chômeurs et des Mal Logés du Port (CCMLP) dans son local, lors du repas de Noël pour les plus pauvres.


Cette rencontre, animée par le Cercle philosophique réunionnais, avait pour thème : "Jean Ferrat, un chanteur combattant contre la pauvreté". Elle a été marquée par un débat très intéressant sur les questions fondamentales de notre société, évoquées à la fois avec un immense talent et beaucoup de clairvoyance par cet artiste militant, né le 26 décembre 1930 et décédé en mars 2010.

Plusieurs chansons de Jean Ferrat ont été présentées aux participants à cette rencontre : des personnes en grandes difficultés ainsi que des bénévoles de l’association humanitaire, présidée par Maryse Dache. Et elles ont suscité des réactions souvent très pertinentes de la part du public.

« Nou donn anou la min pou mié viv ansanm »

Ce fut le cas, par exemple, de "C’est beau la vie", où Jean Ferrat nous rappelle avec force que la beauté de la vie est liée certes aux charmes du cadre dans lequel nous menons notre existence, mais aussi et avant tout à l’amour que l’on construit toujours plus et mieux avec les autres. Et comme l’ont souligné plusieurs intervenants en difficultés, la vie n’est vraiment belle que si les valeurs qui l’imprègnent en permanence sont la solidarité, l’amour, l’égalité, l’ouverture aux autres, « é si nou donn anou la min pou mié viv ansanm ».

D’autres valeurs essentielles mises en avant par Jean Ferrat sont la liberté et le respect des droits humains. Des causes qu’il a d’autant plus défendues tout au long de sa vie que ce fils de Juif déporté par les nazis en camp d’extermination nous appelle à tirer des enseignements de notre histoire en chantant : "Nuit et brouillard".

« Sa i rapèl anou lèsklavaz nout zansèt »

Cette chanson très émouvante est consacrée aux victimes du nazisme, considérées comme des êtres inférieurs aux autres : les Juifs, les malades mentaux, les homosexuels, les communistes… « Sa i rapèl anou lèsklavaz nout zansèt ; é i fo nou poz anou la kèstion : kosa nou fé zordi kont la mizèr i frap bonpé Rénioné san travay, san lozman… ? », a déclaré un jeune chômeur portois, sans abri, qui est obligé de dormir avec son épouse dans une voiture.

Ce jeune a été très touché par les messages de Jean Ferrat dans plusieurs de ses chansons et il a lâché à ce propos : « sa in vérité i déranz… ! » . Effectivement, voilà pourquoi Jean Ferrat reste à la fois le plus grand chanteur français engagé du 20ème siècle et le plus censuré par les médias.

Mais si Jean Ferrat n’existe pas pour « les nouveaux chiens de garde » , il est toujours vivant pour les combattants de la liberté.

Roger Orlu

(*) Merci d’envoyer vos critiques, remarques et contributions afin que nous philosophions ensemble… ! redaction@temoignages.re


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