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Qui cultive l’esprit de la résistance réunionnaise ?
Billet philosophique
vendredi 10 juin 2016, par
Dans le cadre d’une réflexion philosophique, ne faut-il pas tirer des enseignements de l’édition 2016 de la célébration réunionnaise de la Semaine Européenne du Développement Durable qui vient d’être organisée par des dizaines d’institutions et organisations de la société civile ? Sans doute car c’est un problème fondamental pour l’avenir de notre peuple comme pour l’humanité. Mais qu’en font les irresponsables politicien-ne-s au pouvoir à La Réunion et en France ?
Lors d’un goûter-philo animé par le Cercle Philosophique Réunionnais au Port le 1er juin dernier avec une trentaine de personnes de tous âges, il a notamment été souligné qu’il n’y aura pas de développement durable de La Réunion sans une remise en cause de tout le système économique, social, environnemental, culturel, institutionnel et international en place. Et les 6 conditions du développement durable évoquées furent donc les suivantes : « une économie sociale et solidaire ; une société équitable ; le respect de notre environnement ; le respect et la valorisation de notre interculturalité spécifique réunionnaise ; une gestion démocratique de notre société ; un co-développement régional solidaire de La Réunion avec les peuples frères de l’océan Indien ».
D’où l’importance d’avoir une vision globale pour mettre en œuvre un autre modèle de développement que celui en place, qui est insoutenable. Mais une 7ème condition a aussi été exprimée : celle de mettre un terme à l’indifférence à ce sujet.
« Fé pété ! »
En tout cas, lors des ‘’Rencontres de l’Éducation à l’Environnement et au Développement Durable’’ (EEDD) organisées du 1er au 3 juin à Hell-Bourg par le Conseil de la Culture, de l’Éducation et de l’Environnement (CCEE), les participants ont fait part de nombreuses idées très intéressantes pour aller dans ce sens. Et leur appel à la responsabilité réunionnaise correspondait à un message porté par une grande affiche dans la salle qui appelait le public à « libérer la terre réunionnaise ».
Comme l’ont dit plusieurs intervenants, cette libération du pays passe notamment « par des choix politiques pour éviter les découragements » (Dominique Carrère) et par la prise de conscience que « nous sommes toutes et tous potentiellement des politiques pour devenir des décideurs » (Patrice Payet). Une experte universitaire, venue de France pour participer à ces échanges (Dominique Cottereau), a conclu son intervention en félicitant cet intervenant en déclarant : « vive la philosophie réunionnaise ! Fé pété ! »
« Notre esprit de résistance »
Dans le but de donner un contenu concret au « temps des engagements » de ces rencontres afin d’agir ensemble « pou mazine nout domin », dès le lendemain a été organisée une randonnée à vélo de 20km environ entre Bras-Panon et Salazie. Et outre les charmes paysagers dont ont bénéficié à cette occasion les cyclistes, ceux-ci ont également reçu des informations sur les atouts de notre histoire grâce à nos ancêtres esclaves marrons comme Anchaing, dont un piton porte le nom dans ce cirque.
Quelques heures plus tard, un documentaire a été diffusé par une chaîne de télévision sur les combats des résistants anti-nazis pendant la seconde guerre mondiale et l’un d’eux, après avoir cité plusieurs philosophes pour une France libre, a déclaré : « nous avions peu d’armes mais
notre arme principale c’est notre esprit et donc notre esprit de résistance ». D’où la question que l’on peut se poser 70 ans après à La Réunion : qui cultive l’esprit de la résistance réunionnaise dans notre pays et qui préfère y cultiver l’esprit de la résignation, de la passivité, de l’indifférence face au système néo-colonial en place ?
Roger Orlu