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par le Dr Raymond Vergès

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« L’Education populaire est inséparable du projet démocratique »

Colloque sur l’éducation populaire : contribution du CESER

mercredi 3 octobre 2012


Les 5 et 6 octobre, le Conseil pour la Culture, l’Education et l’Environnement (CCEE) organise à Saint-André un Colloque sur l’Education populaire sur le thème ’Pour une démocratie citoyenne et solidaire’. Le Conseil économique social et environnemental (CESER) a adressé hier à la presse une contribution aux débats. En voici un extrait :


Le diagnostic des facteurs freins au processus d’Education populaire

Définie comme processus, l’Education populaire est observée à travers ses réalisations historiques. Elle est en interaction directe avec l’actualité du contexte qui la favorise ou non. Pour apprécier la tendance qui lui est plus ou moins favorable dans un contexte bien précis, il convient de mener une évaluation du soutien que les politiques publiques apportent à la pérennisation de l’Education populaire.
Sur les dernières décennies, force est de constater que le secteur associatif qui se réclame de l’Education populaire continue à subir de lourdes pertes, au point de se demander s’il comportera encore quelques acteurs demain. L’urgence d’une alerte collective sur le sujet est extrême avec la liquidation judiciaire en septembre 2012 des Francas. Cette association est emblématique de l’introduction et du développement de l’Education populaire à La Réunion. Sa disparition ne devrait-elle pas sonner le glas d’une mobilisation générale ?

Puisque l’établissement d’un diagnostic convoque l’histoire, il conviendrait de revisiter également l’incidence des lois sur la formation professionnelle à partir des années 1970. Le contexte économique de l’emploi allant de plus en plus en se dégradant, la tendance des financeurs publics a été de privilégier les actions d’insertion sociale et professionnelle pour un retour à l’emploi du plus grand nombre. C’est ainsi qu’un certain nombre d’associations investies dans le secteur de l’Education populaire ont été amenées à évoluer en organismes de formation. Dans le même temps allait se creuser, pour beaucoup de publics, la perte du savoir-être, y compris dans le milieu de l’entreprise.
Plus récemment, d’autres mesures législatives n’ont pas été suivies de tous les effets espérés : lois relatives aux droits inaliénables tels que le droit au logement et le droit à la formation tout au long de la vie.

Enfin, d’autres freins existent qui relèvent davantage de l’exercice de la responsabilité politique. Quelle évaluation pouvons-nous faire, par exemple, de la relation de partenariat entre tous les acteurs, publics et privés, et les associations, en particulier entre les collectivités territoriales et les associations dédiées à l’Education populaire ?
Finalement, tous ces écueils ne sont-ils pas évitables, dans un grand nombre de situations, dès l’instant où un accord se dégage sur un état des lieux des populations qui habitent et vivent sur notre territoire insulaire ?

Les populations à dynamiser par une Education populaire renouvelée

C’est le courage de dire les choses, et de les dire à l’unisson. Cela commence par un constat partagé qui permet de s’interroger ensemble sur les plus grandes carences sociales qui hypothèquent la capacité d’un grand nombre de nos concitoyens à se prendre davantage en mains. La responsabilité appelle à son tour l’exercice du respect et de la solidarité.
In fine, c’est bien au Politique d’énoncer une vision de notre devenir commun, à l’intérieur d’un projet de société, situé et daté, autour duquel les volontés personnelles et collectives sont invitées à se fédérer. Dans ces conditions, l’Education populaire retrouve toute sa place de ferment et d’accompagnement de la démocratie participative.
Gardons-nous cependant d’un discours sur l’état des lieux trop pessimiste ou négatif.

Un simple changement de point de vue peut en effet être riche d’enseignement, et nous révéler que les valeurs traditionnelles de l’Education populaire ne sont pas aussi absentes des relations sociales actuelles qu’on veut bien le dire. Une plongée dans les quartiers de l’île permet ainsi d’observer les prises en charge, les services, les attentions mutuelles qui ne cessent d’innerver le tissu social. Beaucoup de ces comportements relèvent du bénévolat, c’est-à-dire de ce qu’une personne donne d’elle-même et volontairement pour construire et développer le vivre ensemble.

L’observation se situe alors à l’échelle d’un réseau familial ou d’un réseau de proximité. Elle croise les interactions en interne à chaque groupe — familial et de quartier — et en externe dès lors que chacun de ces groupes est connecté à d’autres. A cette échelle micro-sociale, force est de constater que l’individualisme n’est pas roi, et que le collectif a du sens.
Mais nous pouvons faire l’hypothèse que l’expression des valeurs ainsi vécues ne remonte pas jusqu’au macro social. La force de cohésion de ces solidarités de proximité est comme aveugle à l’observateur de la société globale. Or, c’est au projet associatif qu’il incombe justement de faire le lien entre l’activité de terrain et la responsabilité de l’ensemble de la société. Le temps n’est pas si loin où le milieu associatif a contribué à l’émergence de beaucoup de personnalités politiques de La Réunion. C’est le caractère propre de l’association d’être un « corps intermédiaire » entre l’individu et la Collectivité, de telle sorte qu’en son sein, tout un chacun puisse se préparer à exercer des responsabilités aux différents niveaux qui constituent la société dans son entier. L’Education populaire est donc inséparable du projet démocratique et de l’exercice de la citoyenneté auquel elle initie le plus grand nombre.


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