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L’eau : une denrée rare et chère

lundi 24 septembre 2012, par Céline Tabou


L’eau est devenue en quelques années l’or bleu en contraste à l’or noir pour le pétrole. Cette appellation met en évidence sa rareté et son manque dans de nombreux pays d’Afrique, notamment dans la Corne de l’Afrique, où des sécheresses ont tué des milliers de personnes.


A Mbuji-Mayi, en République démocratique du Congo, l’eau potable est devenue plus chère que la bière. Dans cette ville de trois millions d’habitants, « comble du paradoxe, nous sommes dans une région riche en sources », a indiqué le quotidien congolais “Syfia Grands Lacs”.

Trois euros la bouteille d’eau

Depuis 2010, plusieurs communes de Mbuji-Mayi — capitale du Kasaï-Oriental — ne sont plus desservies par le réseau public d’eau. Les habitants doivent effectuer de 3 à 5 km pour acheter de l’eau dans des lieux publics. Mais « une bouteille d’un litre et demi d’eau coûte 3.500 FC (francs congolais, soit 3 euros), plus cher que deux bières de 73 cl, à 1.500 FC une bouteille de bière (0,76 euro) », a précisé “Syfia Grands Lacs”.

Beaucoup de Congolais n’ont pas la possibilité d’acheter ces bouteilles fabriquées localement. En effet, plus de 71% des Congolais vivent avec moins de 1 dollar américain/personne/jour, selon le Rapport mondial sur le développement humain de 2011. Ces derniers ne peuvent utiliser l’eau, car « pour 20 litres d’eau impropre à la consommation », le prix varie entre 0,16 et 0,41 euro. A contrario, « ceux qui en ont les moyens se font livrer l’eau pour le ménage et la toilette, et recourent aux vendeurs ambulants qui proposent les 20 litres » pour 0,58 à 1 euro. Paradoxe, le Kasaï-Oriental est entouré de cours d’eau, parfois potable, mais elle est la seule province où l’eau est si chère.

Le Congo possède un vaste réseau de cours d’eau, avec une dizaine de grandes rivières et deux grands fleuves (le Congo et le Kouilou-Niari), une trentaine de cours d’eau d’importance non négligeable et de nombreux petits cours d’eau secondaires. Ces ressources profitent surtout à l’entreprise publique, “La Regideso”, qui a le monopole de la distribution d’eau dans la ville. Celle-ci ne dessert que 16% des habitations du fait de la vétusté du réseau et du manque d’électricité. Parmi les raisons invoquées, « l’entreprise manque de moyens pour développer une politique de distribution d’eau satisfaisante. Et, faute d’électricité, nous ne pouvons capter suffisamment d’eau. Voilà pourquoi la population souffre », a cité le journaliste de “Syfia Grands Lacs”.

« Le droit à l’eau ne doit pas faire exception »

Pour l’association Développer autrement le Congo (DAC), les travaux d’agrandissement de l’usine d’eau de Djiri et la construction des unités de potabilisation d’eau « potabloc » à Djiri, à Kinsoundi et à Pointe-Noire ne sont pas suffisants. Le ministre en charge de l’Eau, Bruno Jean Richard Itoua, avait indiqué qu’à court terme, Brazzaville et Pointe-Noire auront une « abondance d’eau potable ». Mais pour la DAC, « comment parler de conditions économiques acceptables pour tous les Congolais, quand la conjugaison des inégalités sociales et territoriales rend la charge d’eau des moins fortunés insupportable ? ».

Depuis des années, la question de l’accessibilité à l’eau potable pose problème dans le pays. En 2009, un rapport intitulé “Document d’analyse des priorités pour l’année 2009” des Nations unies indiquait qu’en « l’absence d’eau potable suffisante, la forte explosion démographique que connaît la République démocratique du Congo entraînera la promiscuité et l’insalubrité, et favorisera le développement de maladies infectieuses ». De son côté, l’Agence française de développement (AFD) a expliqué que cette situation venait « des décennies de conflits et d’exode rural, de l’extension rapide et anarchique de l’urbanisme dans les quartiers périphériques de grandes villes ainsi que du manque d’un réseau de distribution d’eau, notamment au Bas Congo et à Kinshasa, dans l’Ouest de la RDC ».

Pour le moment, le président du Sénat, Léon Kengo Wa Dondo, a exhorté « le gouvernement à accorder au secteur de l’eau la même attention qu’au secteur agricole » lors de son allocution le 16 septembre. Ce dernier a indiqué que « la RDC ne doit pas négliger ce secteur, surtout que le pays dispose de 60% de réserves d’eau douce en Afrique et de 25% au niveau mondial ».

 Céline Tabou  


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