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par le Dr Raymond Vergès

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Ary Yee Chong Tchi Kan met le statut de la victime au cœur du débat

La responsabilité pénale des élus, exemple de la crise requins

vendredi 13 décembre 2013


Le statut de la victime sera la première affaire mise à l’ordre du jour du premier Conseil municipal suivant les élections, a annoncé hier Ary Yee Chong Tchi Kan. Avec les effets du changement climatique qui accentuent les dangers liés à l’environnement et à l’aménagement du territoire. « Tous les élus sont en danger, inconscients de ce qui va leur arriver et est en train de changer », a-t-il expliqué.


Ary Yee Chong Tchi Kan : « même s’il peut être couvert par l’immunité parlementaire et la notabilité, ou tout autre artifice protecteur, un élu portera jusque sa mort la responsabilité politique des dégâts causés à autrui ».
(photo M.M.)

La gestion de la crise requin a donné lieu à un spectacle pitoyable où la préoccupation première des pouvoirs publics (élus et fonctionnaires) était de couvrir l’État, pris au sens des Institutions. De fait, ces derniers ont abandonné les victimes à leur sort alors qu’ils avaient en charge la gestion du peuple, c’est-à-dire l’Etat-Citoyen. « Au final, c’est l’incompréhension qui s’étale au grand jour » , indique Ary Yee Chong Tchi Kan, candidat du PCR à Saint-Paul. « J’ai échappé à la mort accidentelle par 2 fois » , indique le responsable communiste, «  c’est donc avec recul que j’aborde ce thème contemporain de « la responsabilité pénale de l’élu devant les risques mettant en danger la vie d’autrui . J’apporte mon soutien total aux familles qui portent plainte. C’est la seule façon d’ouvrir le débat pouvant déboucher sur un statut de la victime » .

Le précédent de Salazie

Voici 2 cas tirés de l’histoire de La Réunion relatifs à la responsabilité du maire pour faute intentionnelle ou non-intentionnelle.

- À Salazie, le maire a dû répondre du décès d’une touriste causé par une planche défectueuse d’une passerelle qui a cédé sous ses pas.

Le procureur a mis en examen 7 maires pour des stations d’épurations non conformes.

- C’est un rappel que le maire de la commune est responsable de la sécurité du public. Soit, il en est conscient, il anticipe : voir les panneaux informatifs à l’entrée des radiers submersibles ou les pitons sur les trottoirs. Soit, il est laxiste. Dans tous les cas, il est responsable, et le degré de conscience porte le poids de notre histoire.

« Nous sommes entrés dans l’ère de la Communication et de la Connaissance. La notion de risque entrainant des dommages à autrui pose aujourd’hui la question de la responsabilité en cas de défaillance » , souligne Ary Yee Chong Tchi Kan. « Dans l’exemple des activités maritimes, celle du maire est totale, car avant d’entrer dans l’eau, l’individu est à terre. Si, des changements sont intervenus dans l’appréciation des risques, un bilan de la connaissance s’impose. Mais au moment du choix, le maire est seul face à sa conscience et au jugement de l’histoire » .

Au centre des prochaines catastrophes

« Si la justice a un sens, c’est bien envers la victime qui doit se réinsérer sous des regards qui se sont modifiés » , souligne Ary Yee Chong Tchi Kan, « aussi, même s’il peut être couvert par l’immunité parlementaire et la notabilité, ou tout autre artifice protecteur, un élu portera jusque sa mort la responsabilité politique des dégâts causés à autrui. Le discours moralisateur est nul et infantilisant : « c’est sa faute, il ne fallait pas... ». La victime, elle, est taraudée par la question traumatisante : « pourquoi moi » ? C’est en tant que sujet de Droit qu’elle pourra trouver l’apaisement et commencer la guérison » .

Et de poursuivre : « trois siècles après l’installation des premiers maires esclavagistes, le fossé est trop grand entre l’élu qui a les moyens de se protéger et la victime abandonnée qui doit faire la démonstration qu’elle n’a pas « fautée ». Certes, le premier magistrat de la commune doit veiller aux intérêts de la collectivité, mais il doit, surtout, protéger la communauté humaine, ce qu’il ne fait pas » . « La responsabilité pénale de l’élu face aux risques naturels mettant en danger la vie d’autrui » , sera un sujet central devant les catastrophes à venir. Prôner « Liberté, Égalité, Fraternité », et refuser à son prochain réparation et considération sociale, qui peut encore l’admettre ?

Requins : le maire doit déclarer son incompétence

Le législateur (le politique) s’est saisi du dossier de la responsabilité pénale et a fixé des limites à son action. La référence législative actuelle, c’est la « loi Fauchon ». Celle-ci tente de protéger les élus, mais ignore superbement les victimes.

Malgré le privilège de cet arsenal protecteur, la plupart du temps le maire chargé d’appliquer la loi est un illettré juridique. Pour satisfaire l’opinion, il fait feu de tout bois. Devant les caméras, l’incompétence se dissout dans la suffisance. Dans le cas requin, le dossier a été mal engagé, mais la lettre de la mairie de Saint-Paul aux Vigies est limpide et clarifie les rôles.

Le maire aurait dû dès le départ constater la recrudescence des attaques qui constituent un fait nouveau, déclarer son incompétence au regard de la règlementation existante et appeler au débat pour plus de précisions. Il aurait dû anticiper sur l’adaptation au changement climatique et les modifications de l’éco-système, commander des études approfondies pour améliorer la connaissance, puis déposer une proposition de loi afin de mobiliser des moyens supplémentaires. En attendant, il peut mobiliser un fonds de secours d’urgence pour pallier aux pertes économiques et sociales des professionnels. Il peut associer la Région à la création de modules de formation professionnelle adaptée afin que la mise en chômage technique ne soit pas vécue comme un traumatisme.

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