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par le Dr Raymond Vergès

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En France : « la précarité touche près de 2 millions d’enfants »

“Précarité et protection des droits de l’enfant - État des lieux et recommandations”

mardi 16 novembre 2010


Dans le rapport “Précarité et protection des droits de l’enfant - État des lieux et recommandations” (1), présenté hier par Dominique Versini, la défenseure des droits de l’enfant alerte sur « la précarité » qui « touche près de 2 millions d’enfants en France ». Les conséquences de cette situation comme les recommandations sont notamment expliquées dans cet écrit.


Que dit ce document ?

• Selon Dominique Versini, défenseure des droits de l’enfant : « La pauvreté a des conséquences au long cours sur la construction des enfants »

- (…) « La précarité touche près de 2 millions d’enfants en France, dont les familles vivent — et je dirais même plutôt survivent — sous le seuil de pauvreté qui est défini par l’INSEE à 950 euros par mois » (…).

- (…) « La pauvreté a des conséquences au long cours sur la construction des enfants et peut avoir un impact très lourd sur leur capacité à se construire pour l’avenir un capital culturel et social indispensable pour évoluer dans une société aussi exigeante que la nôtre.
La précarité de la vie quotidienne a des conséquences sur la santé des enfants qui subissent des carences alimentaires, un retard dans l’accès aux soins, des pathologies spécifiques pour ceux qui vivent dans des logements insalubres et une souffrance psychique qui trouve son origine dans l’instabilité et l’insécurité, sans oublier la honte de soi qui peut marquer définitivement une vie d’enfant.
Quant à l’école républicaine qui scolarise tous les enfants jusqu’à l’âge de 16 ans, elle éprouve de plus en plus de difficultés, malgré l’engagement des enseignants et des personnels éducatifs, à faire croire aux enfants des milieux les plus défavorisés à l’égalité des chances et à la possibilité d’attraper l’ascenseur social dans un monde ultra-compétitif ». (…)

• (…) « À ce climat d’incertitude s’ajoute pour beaucoup trop d’enfants le traumatisme né d’expulsions locatives, avec intervention de la force publique, qui sont en augmentation de plus de 50% depuis 2002, ou d’un départ en catastrophe du foyer familial suite à des violences sur la maman.
Autant de ruptures, autant de morcellements pour des enfants que les travailleurs sociaux et les pédopsychiatres récupèrent en état de sidération.
Je pense aussi aux enfants Roms qui vivent en direct le démantèlement de leur campement et cumulent ainsi, il faut bien le reconnaître, toutes les atteintes aux droits fondamentaux des enfants.
C’est dire si l’application effective du droit au logement opposable est attendue de façon prioritaire, sous peine de casser irrémédiablement les ressorts de centaines de milliers de familles et de tous leurs enfants en devenir. D’autant que nous constatons que l’absence de logement, associée à l’absence de travail, engendre beaucoup de désespérance et de souffrance psychique chez ceux qui en sont victimes. C’est, parfois, l’une des causes de la séparation des enfants de leurs parents, à travers un placement administratif ou judiciaire ». (…)

• D’après Marie-Rose Moro, professeure de psychiatrie de l’enfant et de l’adolescent, directrice de la Maison de Solenn-Maison des adolescents (Paris) : « Les effets sont directs sur les enfants et les adolescents, parce que ce sont des êtres humains, en développement ».


- (…) « Les effets de la précarité sur la construction psychique constituent un sujet extrêmement important qu’il faut traiter avec de multiples regards. Il est important que l’on soit réuni pour le faire. (…)
Du point de vue de la pédopsychiatre, les effets de la précarité sur les enfants et les adolescents sont comparables à ceux de la guerre. Les effets sont directs et indirects. Ce sont des effets extrêmement profonds et parfois transgénérationnels, c’est-à-dire que ce n’est pas seulement « ici et maintenant », mais dans la génération que les choses se passent.
Quand on regarde comment font tous ceux qui essaient d’agir en situation de catastrophe, après les guerres, ce sont les mêmes processus qui sont en jeu. Il existe donc des effets directs et indirects.
Les effets sont directs sur les enfants et les adolescents, parce que ce sont des êtres humains, en développement. Donc, ce qui touche énormément les parents dans la précarité touche aussi directement les enfants. J’insiste, parce qu’il y a une sorte d’aveuglement parfois.
J’entends dire par exemple : « Il y a des choses que les enfants oublient. Ils sont petits. Les bébés oublient que je me suis retrouvée à la rue ; ils oublient que quelqu’un a disparu autour d’eux ». Non !
On met d’ailleurs parfois les neurosciences au service de ce discours, en disant qu’on ne peut pas garder en mémoire ces choses avant tel âge. C’est bien sûr une manière de rationaliser ce que l’on sait insupportable et intolérable ». (…)

Les recommandations

Elles sont de : “Réaffirmer dans toutes les politiques publiques de lutte contre la précarité et l’exclusion l’objectif prioritaire de permettre l’accès de tous au droit commun” ; “Faire du logement une priorité politique” ; “Se doter d’un outil de lutte contre la discrimination pour origine sociale”…

Dans ce rapport, d’autres thématiques sont abordées. D’ailleurs, il serait intéressant et urgent de se pencher sur la situation actuelle des enfants en précarité à La Réunion. Pas dans un an ou deux, mais tout de suite. Ne dites surtout pas : on n’a pas de budget, on en trouve bien pour faire ceci et cela !

(1)
À consulter et télécharger sur www.defenseurdesenfants.fr.

Jean-Fabrice Nativel
(Source : “Précarité et protection des droits de l’enfant - État des lieux et recommandations”)


Le samedi 20 novembre : Journée internationale des droits de l’enfant.


Bon rétablissement à Jacky Bazon de la part de toute l’équipe de “Témoignages”.


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