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par le Dr Raymond Vergès

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Les retraités vont devoir payer !

Une nouvelle mesure antisociale du gouvernement cautionnée par certains syndicats

mardi 12 février 2013


Le quotidien parisien ’Le Monde’ a publié vendredi dernier un article inquiétant sur une nouvelle réforme des retraites envisagée par le gouvernement, avec la complicité de certains dirigeants syndicaux en France. D’après cet article, cette réforme prévoit de mettre « les retraités à contribution », pendant que le monde de la finance va continuer à profiter toujours plus du système capitaliste.
Les travailleurs réunionnais, en particulier les plus pauvres, seront-ils victimes d’une application de cette réforme injuste dans notre pays ? Or, le peuple réunionnais est déjà victime de l’apartheid social, que le pouvoir ne veut toujours pas abolir avec ses complices. Nous publions ci-après de larges extraits de cet article, qui nous alerte sur les dangers de cette nouvelle aggravation de la crise sociale à La Réunion.


(photo darchives Toniox)

Manifestation en septembre 2011.
Pour la prochaine réforme des retraites, les retraités seront mis à contribution.
Quelles seront les conséquences de cette mesure sur les travailleurs réunionnais, en particulier les plus pauvres ?

Jusqu’ici plutôt discrètes, les négociations sur les régimes complémentaires vont aboutir, début mars, à une mesure qui fera date : la désindexation temporaire des pensions. Les retraites complémentaires vont donc augmenter moins vite que l’inflation dans les prochaines années.

Les syndicats et le patronat divergent encore sur la durée exacte de cette désindexation. Mais plusieurs syndicats — sauf la CGT — sont déjà tombés d’accord avec le patronat pour grignoter le pouvoir d’achat des retraités et permettre ainsi aux organismes de retraites complémentaires des cadres (Agirc) et des non-cadres (Arrco) de retrouver leur équilibre.

Les retraites de base touchées

Une fois cette baisse relative décidée, la voie sera ouverte pour que le gouvernement fasse de même pour les retraites de base. « Si les syndicats l’acceptent pour les retraites complémentaires, nous serons tentés de nous en inspirer », avoue sans détour un conseiller.

Les précédentes réformes des retraites — celle de Fillon en 2003 et celle de Wœrth en 2010 — ont reposé sur les actifs, qui vont déjà voir leur durée de cotisation et l’âge minimum de départ grimper dans les prochaines années.
Alors que la droite avait décidé de préserver les retraités en partie pour des raisons électorales, à gauche, certains estiment qu’il faut leur demander de participer à l’effort pour sauver les retraites. « C’est inévitable », glisse-t-on à Bercy, pour préparer les esprits.

Tous les retraités surpayés ?

Le gouvernement tente de justifier cette réforme injuste en s’appuyant sur des statistiques. En effet, en comptant les revenus du patrimoine, le niveau de vie moyen des retraités s’élève à 1.913 euros par mois et par unité de consommation, contre 2.002 euros pour les actifs, selon le Conseil d’orientation des retraites (COR).

Mais cet alignement, en plus d’être quasiment unique parmi les pays de l’OCDE, cache une situation des retraités plus favorable comparée à celle de l’ensemble des Français. La Cour des comptes estime que leur niveau de vie moyen est supérieur de 15% à celui de la moyenne des Français. Mais tous les retraités sont-ils surpayés ?

Les effets de la hausse du chômage

Toujours selon ces statistiques, cette tendance devrait s’accélérer dans les prochaines années. « Les prévisions montrent que le niveau des pensions devrait augmenter d’environ 5% de plus que celui des salaires d’ici aux années 2020 », explique Didier Blanchet, chercheur au Centre de recherche en économie et statistique.

En cause : le ralentissement de la croissance et la hausse du chômage, qui devrait limiter la progression des salaires, alors que les retraites continueront de suivre l’inflation. Et surtout, le départ à la retraite de générations qui, parce qu’elles ont moins connu le chômage que les autres, bénéficient de carrière complète et des pensions correspondantes.

L’opinion réticente

Tout cela intervient dans un contexte où la fiscalité des retraités est plus généreuse que celle des actifs. Faire payer les retraités n’est toutefois pas sans écueil.
D’abord parce que les Français n’y sont pas prêts. Ensuite, parce que l’ensemble des retraités sont loin d’être des nantis.

Le taux de pauvreté atteint 10,2% parmi eux, autant que pour le reste de la population. Il semble ainsi compliqué de demander des efforts aux 500.000 bénéficiaires du minimum vieillesse.

Vers un nouveau conflit de générations ?

Le risque est de relancer un conflit de générations. En témoigne ce syndicaliste spécialisé des retraites, qui préfère garder l’anonymat pour livrer son jugement : « Je suis effaré que des retraités continuent à accumuler du patrimoine, pendant que des jeunes galèrent. La France a socialisé l’avenir des retraites, alors que les jeunes ne peuvent compter que sur leur famille pour trouver un logement ou un emploi. Cela pose tout même de gros problèmes d’égalité des droits ».

Pour faire passer la pilule aux retraités, l’exécutif compte sur deux éléments. Une désindexation des pensions, bien qu’ayant des effets massifs, est plus indolore qu’une véritable baisse des pensions.

Une idée limitée

Le pouvoir compte réaliser la réforme de la dépendance pour rassurer les seniors sur le risque qui les inquiète le plus : celui de devoir assumer des dépenses de Maison de retraite considérables. Reste à savoir si ce marché convaincra les retraités.

Faire payer les retraités présente des limites. D’abord parce que l’effort ne pourra être que temporaire. Après 2020, le COR prévoit que leur niveau de vie relatif chute. Car, avec le redémarrage prévu de la croissance, les salaires progresseront plus vite que les pensions.

Toujours plus pour les plus riches !

Le COR prévoit d’ailleurs que le déficit des régimes de retraite se bouche d’ici à 2050, par le simple fait que les retraités auront alors des pensions relatives inférieures de 25% à celles d’aujourd’hui. Cette baisse est due à la réforme Balladur de 1993, qui conserve un fort impact sur le niveau des pensions.

En prévoyant notamment d’indexer les pensions sur l’inflation, et plus sur les salaires, et en calculant les retraites sur les vingt-cinq meilleures années de carrière pour le privé, contre dix auparavant, elle déconnecte les pensions de la croissance.

Enfin, une éventuelle désindexation des retraites ne suffira pas à équilibrer le système de retraites, dont le besoin de financement devrait atteindre 25 milliards d’euros en 2025. Si ce projet gouvernemental est adopté, les retraités paieront, c’est certain. Mais ils ne seront pas les seuls. Et les plus nantis continueront de s’enrichir…


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