Témoignages - Journal fondé le 5 mai 1944
par le Dr Raymond Vergès

Cliquez et soutenez la candidature des Chagossiens au Prix Nobel de la Paix

Accueil > Chroniques > Libres propos

Au lendemain de la présidentielle, au moment où au Tampon on assiste à cet incroyable spectacle de 28 élus municipaux qui décident de mettre à genoux tout un pan de la vie associative dans une cité de plus de 70.000 habitants…

lundi 7 mai 2012

A l’instant où s’écrivent ces lignes (les bureaux de vote vont s’ouvrir aux électeurs réunionnais dans une petite demi-heure vu qu’il est 7h30 et que nous sommes dimanche 6 mai), je n’ai à ma disposition — je vous parle là bien évidemment des présentes élections présidentielles — que les tout derniers sondages qui, sur le plan national, donnaient ces derniers jours une avance de 4 à 5 points à François Hollande. Et comme on a déjà voté dans certains coins de la planète, on vient de m’informer que « Ici Radio London » a déjà annoncé qu’à Montréal, c’est 58% contre 42, qu’à Québec, c’est du 53 contre 47, qu’à Tokyo, c’est 50/50, alors qu’en Guadeloupe, nous avons du 65 contre 35. Qui, des deux candidats, est tout l’temps devant ? Qui, à chacune des quatre fois, est toujours derrière ? Je n’ai pas le droit de l’écrire avant ce soir 22 heures, heure locale. Donc vous n’en saurez rien de toute cette journée d’un long dimanche qui fête les « Prudence ». Ce qui n’est pas juste…

Cela n’est pas juste parce que les toutes dernières tendances que les instituts de sondage avaient en main et que personne n’avait le droit de publier, d’autres l’avaient bien évidemment à leur disposition. Ce qui pourrait expliquer le ton de certains discours lors des dernières prises de paroles autorisées sur la place publique. Nicolas Sarkozy, pour ne prendre que son seul exemple et sans qu’il s’agisse ici de lui reprocher quoi que ce soit, a su s’appliquer pour porter dans chacun de ses mots l’émotion qu’il fallait quand il eut, à son meeting de Toulon, à évoquer pour les franges de l’électorat encore indécis ou fluctuant le « risque pour elles » d’une victoire de son concurrent. Son discours — ce jour-là écrit pour être lu du début à la fin, chaque mot ayant été méticuleusement pesé pour être le plus percutant — son discours, disais-je, a montré que ses « conseillers en com’ » savaient tout des dernières tendances. Et à ce niveau des enjeux, il faut savoir surmonter ses résignations et orienter ses convictions. J’ose le dire : notre président sortant sut faire. Il sut faire excellemment. Mais, et c’est là une tout autre affaire, a-t-il convaincu ? Nous le saurons dans… pardon : nous le savons depuis hier soir, dimanche 6 mai, 22 heures…

Et à l’instant où, derrière le clavier de mon ordinateur, j’écris ces lignes à vous destinées, je ne peux que reprendre celles envoyées quelques instants avant à un ami de Saint-Denis : « En ce dimanche 6 mai 2012, lui écrivais-je donc, comme beaucoup de Réunionnais, je crois tout d’abord que la façon pour le moins cavalière dont Monsieur Sarkozy a entamé son quinquennat avec sa célèbre nuit au “Fouquet’s” avant sa non moins célèbre escapade dans des eaux dorées du fin fond de la Méditerranée à bord du yacht de son ami Bolloré et, dès son retour, sa décision d’augmenter (très) sensiblement son salaire, la manière, ensuite, qu’il a eue de gérer sa relation avec ces milliers de “povr’cons” qui ont osé se trouver un jour sur son parcours ou qu’il promettait de “dégommer au karcher” dans leurs banlieues respectives, les bonnes solutions aux problèmes de fond de la France qu’il a su, enfin, nous détailler lorsque son mandat prenait fin, oui, en ce jour de deuxième tour de la présidentielle, j’ose penser que la sanction tombera et que François Hollande, ce soir, l’aura emporté… ».

Vous l’aurez, sans surprise, compris : j’ai voté François Hollande. Mais, sans surprise non plus, vous ne me verrez pas dans les défilés, entre les klaxons et les drapeaux au vent, devant les estrades et leurs pétards ou encore les pots de la victoire, fussent-ils faits de champagne… surtout s’ils sont faits de champagne !! Je ne serai pas là où certains vont montrer qu’ils chavirent de bonheur.
C’est que, ce qui attend François Hollande si — hypothèse très probable sur laquelle l’opinion aura posé sa vision des choses — il a gagné la fort rude bataille qui vient de s’achever, c’est beaucoup de travail, beaucoup d’audace et de volonté à mobiliser dès maintenant. C’est également beaucoup d’abnégation et de foi, beaucoup de courage et de force de caractère qui attendent pour cinq ans le nouveau Président de la République, ses ministres et leurs états-majors respectifs. C’est encore beaucoup de générosité, d’intelligence et de confiance qu’il leur faudra tous montrer dans la demande qu’ils auront à adresser aux forces militantes dont ils n’ont plus le droit d’ignorer l’engagement citoyen et la capacité de relayer dans les masses les idées et les actions de grande portée dont toute une nation a besoin.

Au moment où, dans notre île et au Tampon plus précisément, on assiste à cet incroyable spectacle de 28 élus municipaux qui choisissent délibérément de mettre à genoux tout un pan de la vie associative d’une cité de plus de 70.000 habitants, comment ne pas se battre pour que le débat soit ouvert sur l’importance de ce travail ? Comment, par ailleurs, ne pas demander avec force aux nouveaux responsables du redressement de la France qu’il soit mis un terme à la gabegie du système indemnitaire qui fait problème dans notre République ? Comment ne pas dénoncer la pratique — aujourd’hui légalisée — du cumul des mandats rémunérés, avec ces listes à rallonge de vice-présidents dont nous savons tous — et ce n’est nullement de leur faute — qu’il n’y a de travail à faire qu’en pointant présent à certaines assemblées, certains Conseils d’administration et les commissions qui vont avec ?

S’il est noble que les missions de responsables d’associations soient (et sont) bénévoles, pourquoi faut-il que la loi — oui, la loi, cette loi votée par les élus du peuple dans le cadre de ce qu’autorise la Constitution — oui, pourquoi faut-il que la loi autorise la dilapidation des fonds publics derrière ces dizaines de milliers de postes dorés alors qu’il manque tant de moyens à notre tissu associatif ?

Monsieur le Président, il vous appartient de montrer à nombre de citoyens que vous avez décidé de changer les choses et de commencer par ce qui s’impose…

Raymond Lauret


Un message, un commentaire ?

signaler contenu


Facebook Twitter Linkedin Google plus