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par le Dr Raymond Vergès

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En dépit de l’ultimatum du G.I.C., le pouvoir de transition prépare une conférence nationale et les élections générales

Madagascar

jeudi 4 février 2010


Mi-janvier 2010, Jean Ping, Président de la Commission de l’Union Africaine, est venu à Antananarivo pour assurer le suivi de l’application des Accords de Maputo et de l’Acte additionnel d’Addis-Ababa. Ainsi qu’il a été précisé, ce haut responsable n’est pas venu en tant que médiateur, mais a été mandaté pour évaluer les résultats de l’application de ces accords.


Des accords rejetés par l’opinion

Un rappel s’impose : dès le début de la crise qui a débouché sur la démission de Marc Ravalomanana, le Groupe International de Contact (GIC), représentant l’ONU, l’Organisation Internationale de la Francophonie, l’Union Africaine, l’Union Européenne, la SADC, s’était engagé dans des démarches afin d’assurer le « retour à l’ordre constitutionnel » dans la Grande Ile. L’ex-président du Mozambique, Joachim Chissano, fut chargé de diriger les négociations entre les forces politiques malgaches. Ces négociations qui durèrent plusieurs mois aboutirent le 9 août 2009 à la signature, par les chefs de file des quatre mouvances politiques dirigées par Didier Ratsiraka, Zafy Albert, Marc Ravalomanana et Andry Rajoelina, de la Charte de Maputo, confortée par l’Acte Additionnel d’Addis-Abeba, (décembre 2009), qui devait fixer le partage de sièges au sein d’un régime de transition dit « consensuel et inclusif ».
Dès le départ, ces négociations étaient vouées à l’échec, et ce, pour des raisons évidentes :

- les signataires ne représentaient que leurs intérêts personnels et ceux de leur clan respectif, et ne pouvaient prétendre parler au nom des vingt millions de Malgaches.

- les droits souverains de la nation malgache furent ouvertement bafoués par l’ingérence de ces “négociateurs” qui s’arrogèrent le droit de “proposer” une Constitution, de désigner un Premier ministre et des membres du Gouvernement, de mettre en place diverses structures étatiques.

La montée de la contestation populaire contre les Accords de Maputo fut heureusement prise en compte par Andry Rajoelina, qui décidait en Conseil des Gouvernements de promulguer une ordonnance constatant le « décès » des Accords de Maputo et de l’Acte Additionnel d’Addis-Abeba. Il décidait par ailleurs de designer le Premier ministre Camille Vital en remplacement de Eugène Mangalaza, et de convoquer des élections pour la désignation d’une Assemblée législative, le 20 mars 2010.

La face cachée des négociations

Ces évènements apparemment confus ont cependant jeté un éclairage sur les enjeux qui se trouvent au cœur de la “crise malgache”. En effet, les observateurs ont relevé à ce propos :

- la position des Etats-Unis d’Amérique (et de son ambassadeur à Antananarivo). Ce pays se présente comme un fervent défenseur du retour de Ravalomanana au pouvoir, et milite activement dans ce sens au sein des réunions de négociations, par l’intermédiaire des émissaires de la SADC.
Jusqu’à ce jour, ces derniers exigent l’application de sanctions “musclées” contre Madagascar, allant jusqu’à proposer l’éviction de Andry Rajoelina de la Présidence de la Transition.

- L’attitude ambiguë (et timorée) de la France, qui est davantage soucieuse de préserver la solidarité des pays occidentaux que de l’avenir de la coopération franco-malgache.

La France a déjà exprimé son désaccord sur l’usage de la force pour sanctionner Madagascar, et l’ambassadeur aurait déjà présenté ses lettres de créances au Président de la Transition.
Mais saura-t-elle (et voudra-t-elle) convaincre ses partenaires de la Communauté internationale de laisser les Malgaches prendre en mains leurs affaires, en trouvant eux-mêmes les moyens de régler cette “crise” en dehors de toute ingérence étrangère ?
Rien n’est moins sûr, car Jean Ping était porteur d’une « nouvelle proposition de sortie de crise », qui n’est autre que le retour à la négociation entre les quatre mouvances pour appliquer coûte que coûte les Accords de Maputo et d’Addis-Abeba, notamment en intégrant les représentants des quatre mouvances au sein du Régime de Transition. Ce représentant du GIC a mis d’ailleurs mis en exergue la réunion du 14ème Sommet de l’Union Africaine, qui devra décider du sort de la Grande île, et il a annoncé que les parties malgaches concernées devraient répondre à ses propositions dans les quinze jours.
Andry Rajoelina a déjà répondu au GIC en rejetant toute éventuelle cohabitation, et en insistant sur l’urgence de la tenue d’élections générales précédées de la mise en place d’une Commission électorale nationale indépendante (CENI) ouverte à toutes les forces vives (civiles et politiques), y compris les partisans de Ravalomanana et consorts.
« Redonner au peuple le pouvoir de décision par la tenue d’élections crédibles et transparentes est le seul moyen de résoudre la crise », affirme-t-il. Ainsi, les techniciens sont actuellement à pied d’œuvre pour élaborer les textes concernant le bulletin unique, la traçabilité des résultats électoraux, l’abrogation de l’utilisation des ordonnances, une Conférence nationale s’est d’ailleurs ouverte ce mardi 2 février pour adopter les grandes lignes d’un projet de Constitution de la Quatrième République, un nouveau Code électoral, et un Calendrier des futures élections. La Médiature de la République assure l’organisation et la conduite de cette Conférence.

Les enjeux ?

Mais comment expliquer ce véritable acharnement de la Communauté internationale contre Madagascar qui, pourtant, ne possède pas d’armes de destruction massive, qui n’abrite aucun groupe “terroriste” et qui ne menace en aucune manière la stabilité de cette partie de l’océan Indien ?
Les enjeux de cette longue crise malgache sont évoqués par les médias toutes tendances confondues, ils citent pèle mêle :

- la quête par les Etats-Unis du lieu d’implantation du projet AFRICOM sur le continent africain,

- la rivalité franco-américaine illustrée notamment par le conflit feutré qui oppose les sociétés pétrolières Exxon et Total,

- la convoitise carnassière des multinationales aiguisée par les richesses du sous-sol malgache (cobalt, or, manganèse, bauxiste, uranium, charbon, pierres précieuses...),

- la présence avérée de pétrole dans le Nord et le Sud du pays (Tsimiroro et Bemolanga) qui explique l’afflux de sociétés françaises, américaines, canadiennes, chinoises, indiennes, engagées dans la prospection de sites susceptibles de receler de l’or noir dans le sous-sol malgache.

Les prochaines élections (qui sont reportées à la saison sèche) donneront-elles au Peuple Malgache la possibilité d’imposer son choix dans la recherche des solutions qui répondraient le mieux à ses aspirations à un développement durable généré par une exploitation équitable et une juste répartition des immenses richesses humaines et naturelles dont dispose la Grande Ile ?

B. Y


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Messages

  • Faites des elections présidentielles et on va voir ce que veut le peuple malgache. Autorisez Ravalomanana à être candidat.

    • et c’est comme ça qu’arrivent les conflits, il ne faut pas parler ni de ra8 ni d’andry.... Laissons les chez eux, mettons a la retraite tous les pandores habituels d’abord....Si on lit ce genre de message qui n’est qu’interressé, on n’en sortira pas... ;Veloma

  • Bonne analyse de la situation mais je vois que l’article est tendancieux.
    Tout le monde veut des elections crédibles et transparentes mais laisser la préparation à Mr Andry Rajoelina et son equipe ne garatit rien de ce qu’il avance. On risque de revivre cette crise dans 5 ans, parce que on comprend actuellement que Rajoelina n’est ni démocrate ni Républicain. Il est comme Mr Ravalomanana ni plus ni moins. Donc la meilleure façon d’éviter cette crise cyclique et perpétuelle c’est d’organiser ensemble avec toutes les mouvances et forces vives de la nation toutes les elections afin d’établir une base solide acceptée par tout le monde.


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