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par le Dr Raymond Vergès

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Le gouvernement coupe tout espoir de relance aux Outre-mer

Accentuation du désengagement de l’État dans les investissements

mardi 22 novembre 2011


Avant même le vote du premier budget d’austérité, les Outre-mer ont connu une baisse de près de 400 millions d’euros des crédits d’investissement versés sous forme de défiscalisation. Le Budget 2011 avait retiré 100 millions d’euros à la production de logements, et enlevé 250 millions d’euros au financement des investissements dans le photovoltaïque et les économies d’énergie. Le Budget 2012 veut aller encore plus loin. Ces données sont extraites de l’avis de la Commission de l’économie, du développement durable et de l’aménagement du Sénat. Les faits sont implacables, ce gouvernement veut retirer aux Outre-mer les moyens de leur développement.


« D’une part, les dépenses fiscales rattachées à la mission « outre-mer » sont importantes, puisque d’après les documents budgétaires, on compte 21 dépenses fiscales sur les impôts d’État pour un coût total de 2,9 milliards d’euros, soit très supérieur aux crédits budgétaires affectés à la mission, mais leur coût diminue très sensiblement par rapport à 2011, où il atteignait près de 3,3 milliards d’euros.
D’autre part, les dépenses fiscales relatives à l’Outre-mer ont été très sensiblement réduites au cours des dernières années.
Votre rapporteur pour avis rappelle ainsi que la LODEOM a été marquée par plusieurs réformes ayant conduit à des économies importantes :

- la suppression progressive de la dépense fiscale liée au logement libre et intermédiaire devrait conduire à une économie annuelle de 251 millions d’euros en 2018 ;

- la réforme des exonérations de charges sociales a permis une économie de 64 millions d’euros ;

- la réforme de la TVA-NPR a conduit à une économie de 124 millions d’euros.

Dans le cadre de la loi de finances pour 2011, les Outre-mer ont de nouveau été victimes de la politique de réduction des « niches fiscales » :

- l’article 105 a réduit les avantages fiscaux accordés dans le cadre des dispositifs d’aide à l’investissement outre-mer, hormis celui concernant le logement social. Ce « rabot » a permis une économie pour l’État de 100 millions d’euros ;

- l’article 36 a supprimé l’avantage fiscal relatif aux investissements réalisés outre-mer dans le secteur de la production d’énergie photovoltaïque et a réduit de moitié le taux du crédit d’impôt sur le revenu en faveur des économies d’énergie et du développement durable pour les équipements de production d’énergie photovoltaïque. Une économie de 250 millions d’euros a ainsi été réalisée.

Cette dernière mesure a clairement nui au développement économique de nos Outre-mer, territoires présentant un potentiel unique en matière d’énergies renouvelables. Votre rapporteur pour avis regrette à cet égard que le bilan de l’article 36 de la loi de finances pour 2011 qui devait être effectué avant le 30 juin 2011, par une commission, composée d’élus et de représentants de l’administration, n’ait été rendu public que très récemment.
Les articles 4 et 45 du projet de loi de finances pour 2012 s’inscrivent dans la même logique que la LODEOM et la loi de finances pour 2011, le projet de loi de finances intervenant par ailleurs après la publication du rapport du comité d’évaluation des dépenses fiscales et des niches sociales :

- l’article 4 supprime l’abattement d’un tiers sur le résultat des exploitations situées dans un Département d’Outre-mer. Il s’agit de « supprimer un dispositif qui ne paraît plus répondre de manière adéquate à l’objectif affiché et dont le cumul avec les autres dispositifs favorables n’est pas justifié ». D’après le gouvernement, « l’impact sur l’économie ultramarine devrait être minime, [puisque cette mesure] corrige un effet d’aubaine et ne remet pas en cause un mécanisme réellement incitatif ». L’État devrait ainsi économiser 100 millions d’euros par an ;

- l’article 45 prévoit une nouvelle réduction de 10% de l’avantage en impôt procuré par certains avantages fiscaux à l’impôt sur le revenu, dont les avantages liés aux investissements réalisés outre-mer, à l’exception de celui relatif au logement social. (…) »

Le socle s’effondre

Quand il s’est agi pour la France de se reconstruire au lendemain de la Seconde Guerre mondiale, elle a mobilisé toutes les ressources de la République pour se redresser et entamé le cycle des Trente glorieuses.

Pendant ce temps, l’égalité inscrite dans la loi était refusée aux peuples des Outre-mer. La conséquence allait être le blocage du développement, car l’égalité préalable n’était pas là.

Lorsque l’égalité est enfin obtenue au bout de 50 ans, Paris n’estime toujours pas que le redressement des Outre-mer mérite l’effort de toute la République. Le gouvernement va miser sur la défiscalisation, en ouvrant la possibilité aux contribuables les plus aisés de payer moins d’impôts en échange d’investissements dans les Outre-mer.

Or, la situation sociale dans nos pays est dramatique. C’est un véritable champ de ruines avec des records de taux de chômage, de taux d’illettrisme et de pénurie de logements. À cela s’ajoute un capital local insuffisant pour investir dans le développement de l’économie. Cela nécessite donc un engagement direct et massif de l’État pour corriger tout cela, mais ce n’est pas le cas.

Le rapport du Sénat rappelle que les crédits versés à l’Outre-mer par la défiscalisation sont plus importants que ceux obtenus par les subventions au titre de la solidarité nationale. Autrement dit, c’est la défiscalisation qui est devenue le socle du financement des investissements par l’État. Or, la défiscalisation, c’est une ressource aléatoire qui dépend de la volonté d’un contribuable qui réagit en fonction des incitations.

C’est bien là une particularité des Outre-mer, car dans toutes les Régions de la République situées sur le continent européen, ce sont les subventions directes de l’État qui ont été les moteurs des investissements publics essentiels dont nous sommes privés, comme le train.

En cette période de crise, la défiscalisation vers les Outre-mer est considérée comme une niche fiscale. Elle connaît donc des rabotages successifs sans que la subvention de l’État soit augmentée pour compenser la baisse des crédits affectés à l’investissement.

En faisant de la défiscalisation le socle de l’investissement de l’État, Paris peut donc utiliser le prétexte de la crise pour enlever aux Outre-mer des moyens impossibles à soustraire aux régions situées sur le continent européen.


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