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Loi-programme : des enjeux et un contexte particuliers

Après la rencontre au secrétariat d’État à l’Outre-mer

jeudi 13 septembre 2007, par Manuel Marchal


Avant-hier, les parlementaires réunionnais ainsi que les présidents des collectivités territoriales, des chambres consulaires et des représentants des patrons et des exploitants agricoles avaient rendez-vous avec le secrétaire d’État à l’Outre-mer. Cette rencontre est la première étape de la concertation dans l’élaboration du projet de loi-programme du gouvernement pour l’Outre-mer. Elle se déroule dans un contexte particulier, qui est différent de celui dans lequel s’appliqueront les mesures imaginées aujourd’hui et mises en œuvre demain.


La rencontre de mardi dernier rue Oudinot à Paris a lancé la phase d’élaboration de la prochaine loi-programme. Il est important de donner un coup de projecteur sur le contexte dans lequel se déroule cette prise de contact.
Les défis de La Réunion sont connus et considérables. En premier lieu, la pénurie d’emplois, qui fait que sur 300.000 personnes en âge de travailler, seule une minorité a un emploi durable. Résultat : un taux de chômage intolérable qui touche particulièrement les jeunes. Or, ces jeunes sont de plus en plus formés et qualifiés, mais pour la moitié d’entre eux, les portes du monde du travail leur sont fermées.
C’est la situation actuelle. La loi-programme doit être bouclée avant la fin de l’année, et ces mesures doivent prendre effet pour dix ans. Dans dix ans, la population active de La Réunion comptera 100.000 personnes supplémentaires. Cela souligne tout l’enjeu de la bataille à mener pour l’emploi. Il faut diminuer la pénurie actuelle et créer les conditions pour que demain, le droit à un emploi durable puisse être élargi à l’ensemble des Réunionnais. Ce sont donc bien plus de 100.000 emplois qui devront être créés au cours des dix années à venir pour faire face à l’accroissement démographique et résorber la crise actuelle. Cela veut dire atteindre un rythme d’une dizaine de milliers de créations par an. Ce qui implique des leviers capables de favoriser un développement sans précédent de l’activité économique à La Réunion afin de créer ces emplois.

Le contexte va changer

Le logement est l’autre défi majeur de La Réunion. Pour suivre l’accroissement démographique, il faut quasiment doubler en vingt ans le nombre de logements dans l’île. Autrement dit, construire en vingt ans l’équivalent de ce qui a été construit en trois siècles.
Or, la situation actuelle dans ce domaine est également celle d’une grave pénurie. En témoigne la liste d’attente des demandeurs de logement social : plus de 25.000 familles ne peuvent avoir accès à un logement social alors qu’elles remplissent les critères pour y avoir droit.
Autant dire que ce sont près de 10.000 logements - dont au moins 6.000 dans le parc social - qui doivent sortir de terre chaque année. Cela signifie aussi l’existence de leviers législatifs pour répondre à cet enjeu.
Enfin, au cours de ces dix prochaines années, La Réunion va connaître le cadre de son intégration dans la mondialisation des échanges. Nos spécificités seront-elles reconnues, ou alors va-t-on vers l’application mécanique à l’économie de notre île des règles définies au sein de l’Organisation mondiale du commerce et répercutées par l’Union européenne ?
Lors de la rencontre de mardi, Paul Vergès a évoqué trois échéances : les Accords de partenariat économique, la réforme de l’Organisation communautaire de marché du Sucre, et la fin du régime actuel d’octroi de mer. La date de ces trois échéances est fixée bien avant le terme annoncé des mesures de la loi-programme. Ce qui démontre que pensées par rapport au contexte actuel, ces mesures risquent de s’appliquer dans un contexte totalement différent de celui d’aujourd’hui.

Une nouvelle phase

Ces mesures quelles sont-elles ? Pour les créations d’emplois, le gouvernement met l’accent sur la création de zones franches globales d’activités. D’un coût global évalué à 250 millions d’euros pour l’État selon l’avant-projet, elles visent à accentuer les exonérations fiscales sur des secteurs identifiés comme stratégiques. Pour La Réunion, l’agro-nutrition, les énergies renouvelables et le tourisme étaient les trois secteurs proposés. Sur l’insistance de la délégation réunionnaise, celui des TIC sera probablement ajouté.
Pour relancer la construction sociale, le gouvernement compte y réorienter une partie de la défiscalisation.
Voici ce qu’il en est pour le moment. Une nouvelle étape de la concertation doit s’ouvrir. Des rencontres sous l’égide des préfets de chaque Région réuniront tous les partenaires sociaux ainsi que les représentants des forces vives de chaque territoire. Le but de ces travaux est de retourner au gouvernement des propositions élaborées localement. L’échéance est fixée au 15 octobre prochain. Il reste donc peu de temps pour débattre le plus largement possible et proposer des solutions spécifiques, adaptées au contexte réunionnais, pour créer des leviers législatifs ambitieux, susceptibles de placer le pays sur les rails du développement.

Manuel Marchal


Un mois pour débattre et proposer

Aux côtés d’Huguette Bello, Gélita Hoarau a regretté l’absence des syndicats lors de la rencontre de mardi au secrétariat d’État à l’Outre-mer. Dans sa réponse, Christian Estrosi a indiqué que cette réunion était une première concertation. D’autres doivent se dérouler à l’échelon local, dans la concertation la plus large - associations de chômeurs, partenaires sociaux, acteurs de la culture, femmes - sous l’égide du préfet. Cette annonce faite au cours de la rencontre a été confirmée dans le communiqué diffusé par le ministère de l’Intérieur et de l’Outre-mer.
Il reste donc un mois pour débattre et proposer avant de rendre une contribution écrite le 15 octobre prochain.
La sénatrice a aussi souligné l’importance de faire un bilan des autres lois-programme mises en œuvre jusqu’à présent. Afin notamment de comparer le nombre d’emplois créés par rapport aux coûts des mesures.
Par ailleurs, Gélita Hoarau note que le document remis aux parlementaires, aux présidents des collectivités et des chambres consulaires est un canevas. Autrement dit, « c’est à nous de bâtir le projet ». Un projet qui doit être enrichi dans son volet social, avec par exemple des mesures favorisant les créations d’emplois dans les services à la personne.
Mais une inquiétude transparaît. « Ce canevas s’inspire de la même orientation que les précédentes lois-programme. Or, ces dernières n’ont pas débouché sur des créations massives d’emplois ». Le texte final restera-t-il fidèle à cette orientation ? La question reste posée.


Communiqué du gouvernement

Projet de loi avant la fin de l’année

Au terme des rencontres de Michèle Alliot-Marie et de Christian Estrosi avec des délégations des différents DOM, le ministère de l’Intérieur et de l’Outre-mer a diffusé le communiqué suivant.

« Michèle Alliot-Marie, ministre de l’Intérieur, de l’Outre-mer et des Collectivités territoriales a reçu avec Christian Estrosi, secrétaire d’Etat en charge de l’Outre-mer, les délégations des départements d’Outre-mer qui ont été conviés à Paris dans le cadre des travaux préparatoires à l’élaboration de la loi programme destinée notamment à la mise en place de zones franches globales souhaitées par le chef de l’Etat.
Michèle Alliot-Marie a rappelé l’objectif visé par la loi programme : renforcer la compétitivité de l’économie et des entreprises domiennes en privilégiant pour chacun des départements leurs qualité spécifiques.
Le gouvernement renforcera les moyens notamment financiers à l’occasion de cette loi programme. Il cherchera également à tirer le bilan des mesures antérieurement mises en œuvre. Pour celles dont l’efficacité n’a pas répondu aux objectifs, le gouvernement proposera leur adaptation.
À l’issue des échanges menés à Paris, des échanges auront lieu dans chaque département d’outre-mer sous l’égide des Préfets.
Le projet ainsi complété sera transmis aux autorités européennes ainsi qu’aux collectivités territoriales concernées.
Le projet de loi sera présenté en conseil des ministres avant la fin de l’année ».


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