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Attendre 24 ans pour la péréquation ?

Financement des collectivités : La disparité entre régions va s’accentuer

vendredi 14 mai 2004


Au moment où le gouvernement connaît une nouvelle fronde contre son texte sur l’autonomie financière des collectivités locales, un rapport du sénat souligne les fortes disparités entre régions. Il estime qu’il faudrait que l’État verse 250 millions d’euros supplémentaires pour la dotation de péréquation. Dans l’état actuel de la législation, il faudrait entre 9 et 24 ans pour y parvenir. Pendant ce temps, l’Outre-mer agonisera.


Le débat sur la loi organique relative à l’autonomie financière des collectivités territoriales a commencé mercredi à l’Assemblée nationale. Débats assez houleux qui ont rappelé ceux auxquels on a pu assister au sujet du transfert de compétences. Et le mécontentement, quasi général, a atteint l’ensemble des formations politiques, les associations d’élus. Motif de la grogne : le montant des transferts financiers ne sont pas à la hauteur du transfert des compétences, leur mode de calcul est trop rigide. Pour l’Outre-mer, par exemple, il ne prend pas en compte les retards d’équipements, la progression démographique, le faible pouvoir fiscal des contribuables. (voir ci-après l’intervention de Christophe Payet)
En effet, si le projet de loi venait à être adopté en l’état, on pourrait bien s’attendre à voir les impôts locaux augmenter : taxe d’habitation, taxe foncière sur le bâti, taxe foncière sur le non bâti, taxe professionnelle. Les présidents des Régions et des Départements, dans leur grande majorité, ne pourraient avoir d’autre moyen pour arriver à équilibrer leur budget...
Une taxe professionnelle que, par ailleurs, le gouvernement voudrait bien supprimer, histoire de faire plaisir au MEDEF.
Autre élément à prendre en compte : toutes les collectivités locales ne sont pas logées à la même enseigne. Un rapport d’un groupe de travail du Sénat - que le “Figaro” a pu se procurer” - met l’accent sur les inégalités de richesse entre régions.
"Les disparités interrégionales sont jugées "très fortes". Si l’on tient compte des trois compétences obligatoires des régions - dépenses relatives aux lycées, à la formation professionnelle et au transport ferroviaire -, le rapport, c’est-à-dire le solde entre les ressources de la région et ses dépenses obligatoires, va de un à quarante" écrit le journal en poursuivant : "Le rapport sénatorial estime qu’il manque 250 millions d’euros chaque année pour mettre à flot les régions qui en ont le plus besoin".
Et de conclure : "dans l’état actuel de la législation, il faudrait 9, 12 ou 24 années pour obtenir les 250 millions supplémentaires pour la dotation de péréquation".

Le temps de crever

Le journal ne mentionne pas la place de l’Outre-mer dans ce palmarès. Mais on peut légitimement penser que les Régions ultra-marines ne figurent pas dans les plus riches... Quant aux Départements, ils ne sont pas mieux lotis, avec la gestion du RMI-RMA qui vient de leur être confiée, un nombre d’allocataires qui va croissant... Les structures intercommunales cherchent leur place et les communes se trouvent dans une situation difficile, devant remplir de nombreuses missions, qui peut-être ne sont pas de leur ressort. Mais c’est un autre débat.
Et s’il faut attendre 24 ans pour que l’État verse les 250 millions d’euros supplémentaires pour la dotation de péréquation, il y aura très longtemps que La Réunion sera exsangue, inerte, pauvre... revenue à une situation que l’on croyait à jamais révolue.

Dominique Besson


Christophe Payet : Et nos spécificités ?

Le député socialiste réunionnais Christophe Payet est intervenu hier soir à l’Assemblée nationale dans le débat du débat sur le projet de loi relatif à l’autonomie financière des collectivités. On lira ci-après le texte de son intervention, où il dénonce le fait que dans l’article 1 du projet de loi, la gravité particulière des D.O.M. n’est pas prise en compte.

Je voudrais juste faire remarquer que la rédaction de l’article 1, tel qu’il est proposé par le gouvernement (voir le texte de cet article ci-après - NDLR) , confirme notre crainte, exprimée au moment du vote de la réforme constitutionnelle, que ce texte ne vienne compromettre le développement encore fragile des départements d’outre-mer.
Chacun sait, et cela est particulièrement vrai pour La Réunion, que la dépendance des départements d’outre-mer vis-à-vis des dotations de l’État est bien plus grande que celle des départements métropolitains. En effet, le potentiel fiscal de nos collectivités est particulièrement faible par rapport à celui des collectivités métropolitaines. Les écarts sont considérables.
Je ne prendrai qu’un seul exemple, celui d’une commune de 10.000 à 20.000 habitants. Dans cette commune, à La Réunion, la part de la fiscalité locale dans les recettes réelles de fonctionnement est de 13,25% contre 37,6% en moyenne en métropole pour les communes du même ordre, soit près de trois fois moins ! Cela tient à notre niveau de développement ainsi qu’au PIB (produit intérieur brut) par habitant qui, à La Réunion, est deux fois moindre qu’en métropole.
Aussi, l’assimilation des départements d’outre-mer au sein de la même catégorie juridique que les collectivités métropolitaines aura un effet très pénalisant pour nos collectivités ultra-marines. Cela est incontestable, et la Commission saisie par l’examen de l’amendement tendant à distinguer les collectivités d’outre-mer, déposé par notre collègue René Dosière et le groupe socialiste, semble le reconnaître implicitement.
Au-delà, je crois qu’à l’heure où l’ensemble des régions d’outre-mer militent auprès des instances européennes pour une consolidation de leur statut de région ultrapériphérique d’Europe, l’absence de prise en compte de nos contraintes particulières et de nos spécificités par le gouvernement et le Parlement national serait un très mauvais signal envoyé à l’Union européenne.
Enfin, et pour conclure, je tiens à souligner que les règles retenues pour la compensation des charges nouvelles découlant des transferts de compétence sont également pénalisantes pour l’outre-mer. En effet, ni les retards structurels de nos régions d’outre-mer, ni leur dynamique démographique ne sont pris en compte. En retenant, pour la compensation, comme seul critère le niveau des dépenses antérieurement constatées, la réforme aggravera dans les régions d’outre-mer, année après année, les retards en équipements et en personnels dans tous les domaines.
À défaut de mécanisme de rattrapage ou de réelles péréquations financières, la mise en œuvre de la réforme constitutionnelle se traduira pour l’outre-mer par une aggravation des retards structurels et un recul de la solidarité nationale.


Article 1er : définition de la notion de catégorie de collectivités territoriales

La Constitution reconnaît la garantie de l’autonomie financière non pas aux collectivités locales prises individuellement, mais à leurs catégories.
Il a paru souhaitable de retenir la définition la plus simple possible, qui est aussi la plus large, afin de ne pas multiplier le nombre de catégories à prendre en compte pour la détermination du degré d’autonomie financière. Aussi, la définition de ces catégories s’appuie-t-elle sur les trois grands niveaux de droit commun que sont les communes, les départements et les régions.
Pour cette même raison, les collectivités territoriales d’outre-mer ont été rassemblées avec celles de métropole afin de ne pas constituer des catégories trop spécifiques, comprenant par ailleurs trop peu de membres pour garantir leur stabilité.
Sont donc assimilées à des départements pour l’application de cet alinéa :

- la collectivité départementale de Mayotte et la collectivité territoriale de Saint-Pierre-et-Miquelon ainsi que les collectivités à statut particulier issues de la fusion d’une ou plusieurs communes et d’un département.

Sont assimilées à des régions :

- les autres collectivités d’outre-mer régies par l’article 74 (Wallis-et-Futuna et Polynésie) ;

- les provinces de Nouvelle-Calédonie ;

- les collectivités à statut particulier issues de la fusion de départements et de régions ainsi que les collectivités qui seront créées en application de l’article 73 dernier alinéa (département et région d’outre-mer dont les deux assemblées sont réunies en une assemblée commune).


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