Réactions des fonctionnaires au discours de Nicolas Sarkozy

Dynamitage de tous les principes fondateurs de la fonction publique

22 septembre 2007

Les syndicats pas convaincus du tout par la « révolution culturelle » promise par Nicolas Sarkozy aux fonctionnaires. « On a franchi un cran supplémentaire très fort dans l’attaque frontale contre la fonction publique, et pour la CGT, il y a là un casus belli », a déclaré Jean-Marc Canon, de la CGT-Fonctionnaires, souhaitant une « intervention active des personnels et, au-delà, des citoyens ». Le président « programme la mort du statut des fonctionnaires. C’est grave pour les agents publics, mais aussi pour la population ».

Elizabeth David (Unsa) s’est dit « extrêmement choquée » par l’intervention du président, notant des « remises en cause très importantes, y compris du statut ».

« On a eu un éloge des fonctionnaires et, derrière, quelque chose qui s’apparente à un dynamitage de tous les principes fondateurs de la fonction publique », a jugé pour sa part Gérard Aschieri, Secrétaire général de la FSU, la première fédération de l’enseignement.
Eric Fristch (CFDT-Fonction publique) a déploré, lui, « l’absence de réponse sur les rémunérations et sur l’ouverture de négociations salariales » pour 2007.

La frénésie liquidatrice

Le PCF accuse, lui, Nicolas Sarkozy de « frénésie liquidatrice ». « Le président de la République poursuit sa charge contre le modèle social français, en ciblant la fonction publique qui en est l’un des piliers ». « La pseudo-modernisation de son discours, une fois nettoyée de tous ses artifices, se révèle être une attaque sans précédent, car les faits sont têtus : diminuer le nombre de fonctionnaires ne peut pas donner un meilleur service public », fait valoir le parti de Marie-George Buffet.

Pour le Mouvement Républicain et Citoyen (MRC), « l’essentiel du message présidentiel semble articulé autour d’une idée fixe anti-fonction publique ». Nicolas Sarkozy « a mis deux cartouches dans son fusil, la réduction drastique des effectifs et le démantèlement progressif du statut sous couvert de passerelles vers le privé », souligne le parti, qui note toutefois « certaines annonces intéressantes », comme « une meilleure prise en compte des différentes sensibilités syndicales dans les règles de représentativité ou la mobilité des fonctionnaires entre les administrations ».

Quant à la Ligue Communiste Révolutionnaire (LCR), elle estime que Nicolas Sarkozy « poursuit son entreprise de destruction des conquêtes sociales » et « annonce sa volonté de privatisation de la fonction publique ». « Il y a urgence à réagir massivement, tout de suite, par la mobilisation des fonctionnaires et des usagers, par la grève », conclut-elle.


SGPEN-CGTR

Nicolas Sarkozy veut démanteler le Statut de la Fonction publique pour casser le service public : La mobilisation s’impose !

Non content d’ignorer les principales préoccupations des fonctionnaires et agents publics, à savoir l’augmentation du point d’indice et la préservation de l’emploi public, le Président a franchi une étape dans son entreprise de démantèlement du Statut de la Fonction publique, et donc des garanties de l’égalité de traitement dans le service rendu aux usagers.
Les différentes annonces de Nicolas Sarkozy sont autant d’attaques frontales contre chacun des piliers du Statut :

développement de l’individualisation des carrières et des rémunérations

remise en cause du principe républicain du concours

incitation à quitter la Fonction publique

choix laissé aux nouveaux entrants entre Statut et contrat de droit privé

En vidant le Statut de sa substance, le Président met en cause les garanties collectives des fonctionnaires, et donc leur indépendance. Cette conception dévoyée de la Fonction publique ne peut que conduire à une rupture historique avec le principe de solidarité et d’égalité d’accès au service public, et donc à un service dégradé pour les usagers.

Sous couvert de modernisation, et loin de tout progrès, Nicolas Sarkozy prône en fait aujourd’hui pour la Fonction publique un retour en arrière de plusieurs décennies !
Non seulement les projets présidentiels n’apportent pas de réponse satisfaisante aux fonctionnaires et mettent en cause le service public, mais ils vont aggraver la situation de l’emploi, ne contribueront pas à l’amélioration de la croissance et accentueront l’abaissement général des garanties collectives de l’ensemble des salariés.
Un débat public est indispensable pour construire la Fonction publique de demain. Le SGPEN-CGTR avec la CGTR et la CGT compte bien y prendre toute sa place.
A notre échelle, nous mettrons tout en œuvre pour que les personnels s’opposent à l’offensive sans précédent menée par le gouvernement et pour promouvoir une Fonction publique de progrès dotée des moyens indispensables à la satisfaction des besoins des citoyens.

Le S.G.P.E.N. - C.G.T.R


Autres réactions

• La Fédération Jean-Claude Mailly, Secrétaire général de FO
« Ça ne colle pas ». « Premièrement, il y a un absent, c’est le pouvoir d’achat des fonctionnaires, et je ne vois rien sur 2007 », a-t-il déclaré. « Deuxièmement, il y a une confirmation de l’objectif de non remplacement d’un fonctionnaire sur deux, ce qui est une très mauvaise méthode », a-t-il entre autres commenté.

• Jean-Christophe Baudoin, Président de l’AATF (administrateurs territoriaux) et DGS de Cergy Pontoise
« La plupart des mesures concrètes annoncées par le président de la République remettent en cause leur conception du droit ». « Nous craignons qu’il s’agisse à terme d’une philosophie visant à remettre en cause l’ensemble du statut ».

• La CFE-CGC Fonction publique
Elle relève « des avancées très significatives » dans le discours de Nicolas Sarkozy aux fonctionnaires, tout en rejetant ses « affirmations annonçant à terme un démantèlement du statut général des fonctionnaires ». Le syndicat énumère plusieurs « avancées significatives » dont la mise en place d’une « fonction publique de métiers », « une gestion des ressources humaines qui prend en compte les compétences de chaque agent » ou encore le paiement des heures supplémentaires « à un tarif supérieur au taux normal ». 
Le syndicat s’interroge toutefois sur le financement de ces heures : « Mais quels budgets serviront à les payer sachant qu’il y a d’énormes passifs à régler à l’Intérieur (policiers) et à l’hôpital (infirmières et corps soignants) ? ».
Il estime enfin qu’il n’est pas acceptable que les nouveaux agents puissent choisir un contrat de droit privé plutôt que les règles du statut général des fonctionnaires et regrette aussi que rien n’ait « été envisagé pour rattraper la perte du pouvoir d’achat des agents publics depuis 2000 ».

• CFTC des fonctionnaires territoriaux
La fédération condamne « fermement » le 20 septembre la proposition de Nicolas Sarkozy d’intégrer des salariés de droit privé dans la fonction publique, qui aura, selon elle, de « multiples effets pervers ». Elle souligne d’ailleurs qu’elle « n’hésitera pas à appeler à la mobilisation si l’effet d’annonce s’ensuit d’actes ».

• Gérard Noguès, Secrétaire général de FO-Fonction publique
« Après le secteur privé, il attaque la fonction publique ». « Seule chose positive, Nicolas Sarkozy reconnaît enfin qu’il y a un malaise dans la fonction publique ». Gérard Noguès (FO) suggère de « voir comment monter une mobilisation ».

Les fédérations de fonctionnaires, déjà très remontées par la suppression de 22.700 postes de fonctionnaires en 2008, ont dénoncé à plusieurs reprises l’absence de revalorisation salariale cette année. Elles avaient prévu de se retrouver hier 21 septembre à 11h30 pour arrêter une stratégie commune, juste après une réunion avec le Ministre de la Fonction publique, Eric Woerth, au sujet des conférences sociales sur la fonction publique qui s’ouvrent au mois d’octobre.


CGC

Du pour et du contre

L’intervention du Président de la République le 19 septembre 2007 annonce des avancées très significatives, réclamées par les Fonctions Publiques-CGC depuis des années, mais ces dernières rejettent les affirmations annonçant à terme un démantèlement du statut général des fonctionnaires.

Des points positifs :

• La Fonction publique de Métiers que les Fonctions Publiques-CGC ont initiée en 2000 a été fortement soulignée : le congrès fédéral finalisera ses propositions en octobre 2007 et elles souhaitent l’ouverture rapide de négociations sur ce sujet. Les filières de métiers sont l’avenir de la Fonction publique, et les Fonctions Publiques-CGC sont prêtes à les mettre en œuvre avec d’autres organisations qui se sont ralliées à leur thèse.
• Il faut enfin doter la Fonction publique d’une véritable gestion des ressources humaines qui prenne en compte les compétences de chaque agent.
• Payer enfin à tous les agents, y compris l’encadrement, les heures supplémentaires à un tarif supérieur au taux normal est logique, mais quels budgets serviront à les payer sachant qu’il y a d’énormes passifs à régler à l’Intérieur, avec les policiers, et à l’Hospitalière, avec les infirmières et le corps soignants, par exemple ? Et le compte épargne temps ne facilitera pas la tâche !
• L’instauration d’une politique sociale complémentaire rejoint une revendication exprimée depuis de nombreuses années par les Fonctions Publiques-CGC sur l’attribution d’un ticket santé prévoyance à TOUS les agents : encore faudra-t-il assurer le libre choix à l’agent de sa complémentaire santé.
• L’évaluation des agents plutôt que la notation, qui est expérimentée dans quelques administrations, devra être parfaitement cadrée et normée afin d’éviter les appréciations trop “subjectives”.

Des points d’interrogations :

• Il y a d’autres moyens d’améliorer le pouvoir d’achat des fonctionnaires que la réduction des effectifs ! Pourquoi un tel raccourci ?
• Que veut faire le Président de la République de l’ENA avec une réduction annuelle de 10% des postes ouverts au concours ?

Des points négatifs :

• Il n’est pas acceptable que les nouveaux agents puissent choisir un contrat de droit privé plutôt que les règles du statut général des fonctionnaires ! La gestion du personnel deviendra impossible, et les contractuels, qui plus est de droit privé et non de droit public, vont augmenter ce nombre, alors que depuis des années, l’on s’efforce d’en réduire les effectifs.
• Il n’est pas acceptable de vouloir « cesser de gérer des statuts », alors que le statut général des fonctionnaires est le code du travail de la Fonction publique !
• Enfin, rien n’a été envisagé pour rattraper la perte du pouvoir d’achat des agents publics depuis 2000 ; seules de nouvelles primes, heures supplémentaires réellement payées et autres mesures complémentaires sont prévues : encore faudra-t-il les intégrer dans le traitement servant au calcul des retraites !

Il faudra en fait attendre de voir ce qui sera concrètement mis sur la table des conférences qui s’ouvriront le 1er octobre : Nous saurons alors véritablement ce qui nous attend !

Des déclarations d’intentions ne sont pas des propositions.

Fonctions Publiques-CGC


SNUI

Quel avenir pour la Fonction publique ?

Les déclarations du Président de la République mériteraient assurément un long développement, tant elles portent les germes d’un profond changement de nature du service public.
Le Syndicat National Unifié des Impôts (SNUI) défend de longue date un autre regard sur la Fonction publique et les fonctionnaires, l’utilité sociale et économique du service public et porte un certain nombre de demandes légitimes sur, par exemple, la demande de reconnaissance des qualifications et l’amélioration des conditions de vie au travail.
On ne peut laisser croire que la Fonction publique et ses agents n’évoluent pas. Pourquoi ? Parce que les changements ont été nombreux et souvent difficiles au sein des administrations, tant au niveau de la gestion des personnels qu’au niveau des services et des structures.
Mais la nature même du service public est incompatible avec la logique d’individualisation des rémunérations et avec l’instauration de contrats privés. En effet, l’objectif du service public est la recherche du bien commun : est-il normal de rémunérer un agent en fonction d’indicateurs portant, par exemple, sur le nombre de redressements fiscaux effectués ou en fonction du nombre de personnes reçues, indépendamment de la qualité du service rendu ? Non ! Est-il normal de créer deux catégories de personnels, l’une privée (soumise à une incertitude et dont l’emploi dépend du bon vouloir de l’Etat employeur) et l’autre publique (donc indépendante des pressions politiques et garante de la neutralité du service public) qui effectueront le même travail ? Non ! On devine aisément que la situation plus précaire des uns conduirait à un alignement par le bas des droits sociaux des autres... Mais surtout, cela conduirait à une implosion de la nature même du service public.
Le Président propose une logique perdante, perdant pour les usagers, perdant pour les personnels. Le chef de l’Etat, avant même de pouvoir diagnostiquer les besoins réels en matière de services publics, décide de continuer sa logique de suppression d’emplois massive. Pour le SNUI, la politique de l’emploi dans la Fonction publique devrait d’abord être déterminée par les besoins de la population en matière de services publics et leur amélioration.
Les réformes annoncées, avec comme arme la Révision Générale des Politiques Publiques (RGPP) et les suppressions d’emplois, entraîneront la fermeture de services publics de proximité. Ceci aura comme conséquence une dégradation de l’égalité d’accès au service public pour les citoyens et entraînera, pour les personnels, une mobilité présentée par le Président comme choisie, mais qui deviendra, de fait, une mobilité subie.
La vision des règles de gestion qu’a le chef de l’Etat est d’accélérer l’individualisation dans la gestion et la rémunération. Elle nous entraîne vers une Fonction publique resserrée sur des métiers où les personnels seront choisis par entretien individuel (fin des concours), malléables dans leur affectation et bloqués dans leur carrière et dans leur pouvoir d’achat. Cette vision est conforme à l’idéologie du Président : individualisme, mérite et bénéfice pour une petite minorité. Quant aux heures supplémentaires, elles seront, à l’instar du privé, imposées par l’administration, le manque d’effectif... etc...
La « refondation » que nous propose Nicolas Sarkozy va peser lourdement sur les conditions de vie et de travail des personnels. Le Pacte services publics 2012 proposé ressemble à un pacte avec le diable. Le contrat est présenté de manière flatteuse et alléchante, mais pourrait à terme faire perdre son âme à la Fonction publique.
Le chef de l’Etat n’a pas répondu aux exigences des personnels sur le pouvoir d’achat et ignore l’appel unitaire des organisations syndicales à ouvrir des négociations salariales. Il mène une politique contraire aux revendications de personnels sur l’emploi, les conditions de travail et la défense des services publics.
Oui, le SNUI réclame un grand débat sur la Fonction publique : mais celui-ci ne doit pas être tronqué et doit tenir compte des spécificités incontournables de la sphère publique. Pourquoi ? Parce que l’accès de tous à certains services, l’égalité de traitement et la satisfaction des besoins sociaux ne peuvent être garantis dans le cadre d’une logique purement comptable et marchande. C’est sur cette base que le SNUI s’inscrira dans ce débat.

Le Syndicat National Unifié des Impôts



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