Si Boost débarque à La Réunion, que restera-t-il pour Air Austral ?

Air France sera 20 % moins cher

19 juillet 2017, par Manuel Marchal

À peine un mois après l’arrivée de French Blue, nouvelle mauvaise nouvelle pour Air Austral. La création d’une filiale low-cost long courrier a été validée par Air France. Cette nouvelle compagnie aura des coûts réduits de 18 %, ce qui fera baisser le prix du billet d’avion et permettra à Air France de se battre à armes égales avec French Blue. Faute d’avoir poursuivi le projet d’Airbus A380 exploité en low-cost, Air Austral continuera d’avoir des prix structurellement plus élevés qu’une concurrence toujours plus nombreuse.

Si Air France implante sa filiale low-cost à La Réunion, son coût de production sera inférieur de 18%.

Les pilotes d’Air France adhérents du SNPL devaient se prononcer sur la création d’une filiale moyen et long-courrier low cost de la compagnie française. Près de 83 % des inscrits sont allés voter, et ils ont accepté le projet à plus de 78 % des suffrages. La semaine dernière, deux des trois syndicats représentatifs des PNC (UNSA et UNAC). Désormais, rien ne s’oppose à l’arrivée d’un nouvel acteur du transport aérien. Les premiers vols sont prévus cette année.

« Tarifs plus avantageux »

La Tribune de lundi explique la stratégie d’Air France dans ce domaine : « Cette compagnie entend s’adresser principalement aux « Millennials », cette génération de technophiles nés entre le début des années 80 et l’an 2000 au moment de l’avènement du numérique, du low-cost ou encore de l’économie du partage. Une clientèle qu’Air France reconnaît avoir du mal à capter. Pour créer un lien avec cette clientèle, Boost proposera un produit spécifique avec une offre de divertissement “différente”, “connectée” et “innovante”, selon les termes utilisés en interne, qui « ne doit pas paraître moins-disante » par rapport à Air France, tout en donnant « la perception de tarifs plus avantageux ». (…)La direction a l’intention de développer les options payantes en classe économique (« buy on board »). Pour les repas, par exemple, Air France compte monter en gamme et proposer une restauration à la carte et payante en classe économique sur tous les vols moyen-courriers. »

10 gros porteurs

Au sujet de la flotte « cette compagnie débutera son activité d’abord sur le réseau moyen-courrier avec 6 A320, positionnés sur des lignes concurrencées par les low-cost, puis sur le long-courrier au printemps 2018 avec trois ou quatre A340 qui permettront d’exploiter trois lignes, deux assurées jusque-là par Air France et une ouverture (réouverture ?) de ligne. En 2020 cette nouvelle compagnie comptera 28 appareils, 18 de la famille A320 pour assurer l’alimentation du hub de Paris-Charles de Gaulle, et 10 gros-porteurs composés d’A340 et d’A350. Au total, Boost devrait permettre d’augmenter l’offre en sièges d’Air France sur le long-courrier de 10 % entre 2017 et 2020 ».

Avec l’exploitation de ce nouveau modèle, la filiale d’Air France aura un coût de production inférieur de 18 % sur le long-courrier, ce qui aura nécessairement des répercussions sur le coût du billet. Dans un premier temps, l’objectif affiché est de résister aux compagnies du Golfe qui arrivent à casser les prix. En effet, il peut aujourd’hui être plus économique de voyager sur Emirates plutôt que sur Air France/Air Mauritius pour aller de Paris à Maurice, malgré l’obligation d’une escale pour changer d’avion. Le prix est moins cher avec en plus l’expérience de voler à bord de l’Airbus A380.

Alignement sur French Blue

Il est à noter qu’en réduisant son coût de production de près de 20 % et en répercutant cette baisse sur le prix du billet, le projet Boost arrivera à s’aligner sur les tarifs de French Blue. La Réunion est d’abord une destination affinitaire. Le prix du billet est donc un facteur essentiel dans le choix d’une compagnie aérienne. C’est ce qu’avaient bien compris les anciens dirigeants d’Air Austral. En partenariat avec Airbus, ils envisageaient d’exploiter selon le modèle low-cost des A380 capables d’emporter plus de 800 passagers. Avec cet avion, les prix auraient été structurellement moins élevés que ceux proposés par French Blue ou la future filiale low-cost d’Air France. Cela aurait découragé la venue de la concurrence et aurait permis à Air Austral de disposer d’un relais de croissance.

Malheureusement, l’arrivée d’une nouvelle direction en 2012 a signifié l’arrêt du projet et le maintien d’Air Austral dans un modèle qui n’est pas capable de s’aligner sur les prix de French Blue.

Grave menace pour Air Austral

À La Réunion, Air France subira également les effets de l’arrivée de French Blue. Comme le prix du billet est la principale préoccupation des voyageurs qui veulent se rendre en Europe ou venir dans notre île, il est clair que l’application du projet Boost à la liaison Paris-La Réunion ne pourra que rencontrer un succès. Si Air France choisissait de laisser la place à sa filiale low-cost, alors ce serait l’arrivée d’un nouvel acteur capable de proposer des vols près de 20 % moins cher. Incapable de s’aligner sur ces prix faute d’un modèle adapté, l’existence d’Air Austral sur l’axe La Réunion-France serait alors sérieusement menacée. Le passage d’Air Austral au long-courrier a permis la création de centaines d’emplois qualifiés pour des Réunionnais. La compagnie compte aujourd’hui plus de 900 salariés. Ces derniers résultats n’incitent guère à l’optimisme quant à sa capacité de résister à la nouvelle concurrence.

M.M.

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