Les stratégies des compagnies aériennes expliquent seules la hausse du trafic passager entre La Réunion et la France

Plus de sièges et prix plus bas : l’A380 d’Air Austral était le meilleur projet

21 juillet 2017

Les derniers chiffres du trafic passager sur la desserte entre La Réunion et la France rappelle que la seule limite à cette ligne est le prix. L’arrivée de French Blue et ses prix plus bas dans les deux dernières semaines de juin a en effet entraîné une croissance de 4 % du trafic mensuel. Ceci souligne que le désenclavement de La Réunion dépend uniquement des stratégies des compagnies aériennes, pas des campagnes de publicité de l’IRT ou de la Région Réunion. D’où l’importance pour les Réunionnais de disposer d’une compagnie réunionnaise capable de proposer les prix les plus bas pour avoir leur mot à dire sur le désenclavement de leur pays. Malheureusement, Air Austral a renoncé à cet objectif et est de plus en plus fragilisée, comme l’indiquent ses derniers résultats loin des bénéfices attendus, compte-tenu des dizaines de milliers de billets d’avion subventionnés et de la baisse du prix du kérosène.

Peu après la commande de 2 A380 par Air Austral auprès d’Airbus, l’avion de ligne le plus grand du monde s’était posé à La Réunion le 11 novembre 2009.

Les derniers chiffres de la fréquentation de l’aéroport Roland Garros mettent en avant une hausse du trafic passager au mois de juin, avec le nombre record de 160.149 passagers. Les liaisons entre La Réunion et la France ont connu une croissance de 4 %. Cette hausse s’explique par l’arrivée de French Blue depuis le 16 juin. Le « JIR » d’hier indique qu’en deux semaines, French Blue a déjà atteint 5 % de part de marché.

French Blue arrive avec un autre modèle. Il propose un prix du billet moins cher que la concurrence, auxquels s’ajoutent des options payantes facultatives pour l’emport d’un bagage en soute, le choix de la place ou le repas. Cette nouvelle concurrence fait baisser les prix, et le nombre de passagers augmente, c’est en effet une constante observée depuis le début de la desserte régulière de la France depuis La Réunion. Autrement dit, la hausse du trafic entre La Réunion et la France n’est pas la conséquence des actions menées par l’Ile de La Réunion Tourisme ou la Région, mais le résultat de l’augmentation de l’offre de sièges et de la baisse des prix. C’est ce que rappelle la croissance en escalier du nombre de passagers sur la desserte entre La Réunion et la France, où l’arrivée d’un nouvel acteur et d’une offre supplémentaire a amené à chaque fois une baisse des prix.

De 3.000 à 1,2 million de passagers

En 1960, le nombre de passagers était de 3.000. En 1984, il est de 193.000. Entre ces deux dates, Air France a le monopole de la desserte et le prix reste très élevé, un aller-retour représentant l’équivalent de plusieurs SMIC. La croissance s’explique alors par l’évolution technologique, du Lockeed Constellation au Boeing 747 en passant par le Boeing 707.

En 1987, le trafic passe à 338.000 passagers sous l’impulsion des arrivées successives de Point Air, Minerve et Aeromaritime qui tirent les prix vers le bas.

En 1990, Air Outre-mer (AOM) s’implante aussi sur la ligne La Réunion-France. La nouvelle concurrence fait automatiquement baisser le prix du billet, avec comme conséquence 421.000 passagers.

En 1996, Corsair et Aerolyon renforcent la desserte vers Paris et plusieurs autres villes de France. La baisse des prix se poursuit, tout comme la hausse du trafic : 719.000 passagers.

En 2000, 5 compagnies assurent la liaison entre La Réunion et la France : AOM, Air Liberté, Corsair, Aerolyon et Air France. 911.000 passagers ont alors volé sur cette desserte.

Entre 2000 et 2004, Aerolyon ne dessert plus La Réunion, AOM et Air Liberté fusionne en créant Air Lib qui disparaîtra rapidement. Ceci est compensé par la création d’Air Bourbon et l’arrivée d’Air Austral sur le long-courrier avec en prime un avion plus économique que les Boeing 747 d’Air France et Corsair, et les DC10 d’AOM, Air Liberté et Aerolyon.

Cette nouvelle offre contribue à augmenter la fréquentation de desserte entre La Réunion et la France, qui atteint 960.000 passagers en 2004.

En 2009, Air France, Corsair et Air Austral sont présentes, le nombre de passagers progresse peu et le cap du million de passagers est franchi en 2010.

En 2014, la fréquentation de la liaison entre La Réunion et la France fait un nouveau bond avec 1.151.000 passagers transportés. L’explication réside dans l’arrivée de XL Airways qui propose des prix moins élevés. La présence de French Blue au cours du second semestre 2017 fera sans doute franchir la barre de 1,2 million de passagers entre La Réunion et la France.

Le coût du renoncement d’Air Austral à l’A380

Avec l’arrivée de French Blue depuis le 16 juin, cette tendance se confirme une fois de plus. Cette compagnie propose comme premier prix un aller-retour à 500 euros, soit un peu moins d’une moitié de SMIC. À l’époque du monopole d’une seule compagnie, le même trajet était proposé à plusieurs fois le SMIC.

La croissance du nombre de passagers entre La Réunion et la France réside donc dans la progression de l’offre qui diminue le coût du voyage. Cette baisse de prix aurait été encore plus importante si le projet de low-cost long-courrier d’Air Austral avait été concrétisé. L’Airbus A380 de plus de 800 passagers exploité par Outremer 380 aurait permis une baisse des prix de 30 % sans subvention. Nul doute qu’avec une offre pareille, le nombre de passagers entre La Réunion et la France aurait depuis longtemps dépassé 1,2 million. Car ce projet prenait en compte la raison profonde de l’augmentation du trafic, dont la seule limite est le prix.

L’évolution du trafic passager entre l’Europe et La Réunion résulte de la stratégie des compagnies aériennes. Ceci explique pourquoi une des priorités des responsables politiques doit être d’œuvrer pour qu’une compagnie réunionnaise puisse être implantée solidement sur cet axe, faute de quoi le désenclavement de La Réunion échappera aux Réunionnais.

Le projet d’Airbus A380 low-cost aurait permis à Air Austral de jouer ce rôle. Le choix d’une autre orientation stratégique va coûter cher, car elle renforce la dépendance des Réunionnais vis-à-vis des groupes extérieurs pour le désenclavement de leur pays. Les chiffres publiés hier par le « JIR » confirment la tendance vers cet état de fait. Air France est en effet redevenue leader sur l’axe La Réunion-France alors que l’ancienne direction de la compagnie réunionnaise avait fait d’Air Austral le premier transporteur sur cette desserte.

M.M.

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Messages

  • Pour faire baisser les prix des transports aériens à la Réunion il faudrait tout simplement donner à toutes les compagnies internationales qui voudraient desservir notre île le droit de le faire . Si Maurice a connu un essor sans précédent au cour des 20 dernières années c’est parce qu’elle ouvre son territoire à toutes les compagnies du monde qui veulent y venir .

    La réunion est une région Française , mais ce statut ne devrait pas pénaliser son développement touristique , et si c’était le cas pour de simples raisons législatives , il serait temps que le parlement Français prenne les dispositions nécessaires ou donne aux élus réunionnais le droit de le faire eux mêmes .

    Pour cela il faut supprimer l’inégalité crée à leur encontre par l’alinéa 3 de l’article 73 de la constitution . Mais hélas avec le président Macron qui veut remettre au goût du jour le centralisme bonapartiste , nous ne sommes pas au bout de nos peines . La manière dont la crise de la canne à sucre a été réglée par le nouveau préfet de la Réunion le lendemain de son arrivée sur le territoire , n’augure rien de bon dans ce sens , et nos élus devraient vraiment se le c... pour faire avancer les choses .

    Lorsque tous les européens auront le droit d’ouvrir sur notre territoire des hôtels internationaux et pourront affréter un de leurs avions pour les remplir nous pourrons espérer avoir le même développement touristique que nos voisins mauriciens , ou de nos voisins malgaches qui sont bien partis pour mettre en valeur l’une de leurs principales richesses la beauté de leur pays et de leur plage . Quand on constate que sur l’ile de NOSY BE , une petite ile d’environ 450 Km2 dont la population ne dépasse pas 50000 habitants les hôtels étrangers se multiplient et les touristes arrivent par avion plein plusieurs fois par semaine de l’Europe et des autres pays du monde . On se demande vraiment pourquoi on ne pourrait pas en faire autant à la Réunion .Peut être tout simplement parce que des personnes qui défendent leurs intérêts particuliers veulent conserver leur privilège et se foutent des Réunionnais comme de leur première chaussette.


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