La sagesse durable du peuple africain nous aurait-elle échappée ?

7 juin 2016, par Courrier des lecteurs de Témoignages

J’ai longtemps souffert du mépris que nous, les hommes blancs, avons trop souvent pour les hommes noirs. A côté de cela, je jubilais devant leurs succès sportifs et certaines vérités ou révélations glanées au cours des ans dans mes lectures « Le sang de tous les hommes est rouge » ou « L’Afrique noire est le berceau de l’humanité » ou encore le fait que certains cadres des armées arabes (les Sarazins) qui ont envahi la France jusqu’à Poitier étaient des noirs. Et je ne parle pas de certains royaumes africains qui, avant l’arrivée des blancs, avaient atteint un degré de civilisation qui, encore aujourd’hui, étonne et surprend ou le fait que les premiers pharaons d’Egypte étaient noirs (voir : http://www.shenoc.com/les_maures.htm)

Mais c’est une réflexion plus globale et plus profonde sur l’origine de l’humanité et son évolution, qui apporte pour moi un point final à tout jugement négatif sur les blacks. A la lumière des plus récentes découvertes scientifiques sur l’histoire des hominidés, il semble se confirmer que le passage de l’animal à l’homme, se situe bien en Afrique tropicale. Sans remonter jusqu’à l’apparition des mammifères il y a 220 millions d’années, il est tout de même intéressant, pour situer notre espèce dans le temps et mieux comprendre certains aspects de nos origines et de notre nature profonde, d’examiner ce passé lointain. Pendant la présence des Dinosaures, les mammifères étaient de très petite taille, puis cette taille a augmenté, dès leur disparition il y a environ 65 millions d’années. Il y a d’ailleurs fort à parier que si les Dinosaures n’avaient pas disparu, les hominiens n’auraient probablement jamais pu trouver leur place dans l’écosystème terrestre. Nos ancêtres simiformes seraient apparus il y a 38 millions d’années en Afrique, les hominiens, il y a seulement 20 millions d’années. L’Afrique qui, jusque-là, était une ile, se rattache au continent voisin il y a 18 millions d’années environ et les migrations animales vers le reste du Monde peuvent commencer. Il y a à peine 10 millions d’années, les hominiens seraient devenus plus terrestres qu’arboricoles et se seraient mis debout, 4 millions d’années plus tard. Le premier animal qui commence à ressembler à un humain (Homo habilis) est apparu il y a à peine plus de 2 millions d’années. Lui ou ses cousins auraient maîtrisé le feu 1 million d’années plus tard.

Cette lente et progressive hominisation serait intervenue au cours d’une longue période de dérèglement climatique. Au cours de cette période, l’animal, confronté à de grandes difficultés et à des problèmes de survie, a été contraint d’évoluer. Sa nourriture habituelle se faisant rare, notre très lointain ancêtre fut contraint de modifier son alimentation et ses comportements. Puis, l’apparition d’un grand désert (le Sahara) coupa l’Afrique en deux parties. Certains pré-hominidés furent chassés vers le Nord, les autres purent rester dans leur milieu d’origine. Stressés par des conditions climatiques défavorables, les hommes du Nord ont fui dans toutes les directions pour retrouver le soleil. Cette quête désespérée du bonheur les a amenés au bout du Monde mais la plupart n’ont jamais retrouvé leur monde d’origine. Alors, ils ont inventé mille stratagèmes pour retrouver le bonheur et la paix, en vain. Le peuple d’Israël et bien d’autres, illustre de façon dramatique cette histoire des hommes du Nord que toute sagesse aurait aujourd’hui quitté ? Seule l’âme africaine, lorsqu’elle n’a pas été totalement polluée par les hommes du Nord, a gardé les pieds sur terre. Il n’est jamais bon d’aller trop vite. Cela semble bien une loi universelle du monde vivant. La crise mondiale actuelle serait donc une conséquence de cette précipitation. Pourtant, la course saisonnière vers le soleil, l’amour de la peau bronzée, le succès des rythmes africains, le développement des voyages et des échanges, tout cela paraît positif. Si les hommes du Nord ne détruisent pas l’âme africaine, ils peuvent peut-être encore espérer retrouver un jour un nouveau rythme de vie plus favorable. « Il faut tout un village pour élever un enfant » dit-on en Afrique. Voilà bien une manifestation de cette sagesse africaine. L’amour appelle l’amour et la femme blanche voit de plus en plus dans la sensualité du corps et dans la pureté de l’âme noire, un nouvel horizon, un avenir plus radieux et réciproquement pour ce qui concerne les rapports entre l’homme blanc et la femme noire.

On le dit souvent, l’avenir de l’humanité c’est le métissage (les Africains préfèrent parler d’ouverture) mais je ne suis pas sûr que l’on ait mesuré que ce métissage-là, est la dernière chance de l’humanité de se remettre sur les rails d’une évolution plus raisonnable. Ce qui peut séduire dans l’âme africaine authentique, c’est cette proximité avec la Nature et la Terre nourricière. Chez les Africains, même les plantes ont une âme. En allant trop vite en besogne, les hommes du Nord ont conquis le Monde, c’est vrai, mais ils ont perdu l’essentiel. Ils ont perdu cette conscience du vivant, cet attachement aux valeurs les plus profondes et les plus authentiques que sont l’amour de la vie, l’instinct de survie. Un peu par accident, la dernière espèce animale apparue sur Terre, est l’hominidé. Mais l’histoire de la vie nous apprend que l’adaptation au milieu, l’évolution, la stabilité d’une espèce, tout cela prend du temps et le temps ne pardonne pas ce qui se fait sans lui. Oui, les Africains sont en retard par rapport aux hommes du Nord. Et alors ? Mon sentiment est que les Africains sont dans le bon tempo de l’évolution des espèces. Nous, les hommes du Nord, avons déréglé notre machine évolutive. Nous avons pété les plombs et risquons l’asphyxie et la mort si nous ne mettons pas un bémol à notre schizophrénie consumériste de développement, de production, de vitesse et de complexité.

Se rattacher comme des désespérés aux valeurs africaines, le pays de nos origines à tous, est probablement une solution pour sauver l’humanité tout entière. Les sociétés africaines authentiques nous apportent la chaleur humaine que l’on peut opposer à notre indifférence et notre mépris. Elles nous apportent la convivialité pour lutter contre notre égoïsme, l’instinct et la spontanéité pour lutter contre nos calculs bien souvent sordides. En opposant liberté du corps et de l’esprit à nos contraintes et nos frustrations, en opposant son naturel à notre propension à l’artificiel, en opposant sa sensibilité à notre tripotage cérébral, en opposant sa simplicité à notre complexité, l’âme africaine va devenir un modèle à suivre. Le monde occidental est aujourd’hui dirigé par le dernier carré des hommes fermés, repliés sur des valeurs aujourd’hui dépassées. Or, une société repliée sur elle-même n’a pas d’avenir. Le comprendrons-nous assez tôt pour éviter notre disparition ?

F. Maugis


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