Application de la politique d’austérité aux collectivités

Budgets de fonctionnement : les grandes collectivités doivent rendre des comptes à l’État

26 janvier 2018, par Manuel Marchal

Depuis le 1er janvier, 7 communes, 3 communautés d’agglomération ainsi que la Région Réunion et le Conseil départemental doivent rendre des comptes à l’État au sujet de leur budget de fonctionnement. Ces dépenses pour payer les salaires pour toutes ces collectivités, le RSA du côté du Département et notamment les bons de réduction pour les billets d’avion et les ordinateurs du côté de la Région doivent désormais ne plus augmenter de 1,2 % par an inflation comprise. En cas de dépassement, l’État interviendra pour régler le problème. Le 18 janvier, le Conseil constitutionnel a en effet validé la loi qui prévoit cette disposition.

Dans sa politique d’austérité, le gouvernement cible notamment les collectivités. Cela se traduit depuis plusieurs années par le gel puis la baisse de la dotation globale de fonctionnement. Cela s’applique aussi à La Réunion. À partir de l’année prochaine, le gouvernement donnera à l’État des moyens d’aller plus loin, en lui permettant d’intervenir directement dans la gestion de certaines collectivités, celle dont les recettes de fonctionnement dépassent 60 millions d’euros.

12 collectivités à La Réunion

C’est ce que prévoit l’article 29 de la loi de programmation des finances publiques pour 2018-2022, texte adopté définitivement par les députés le 21 décembre 2017. 60 députés et 60 sénateurs ont saisi le Conseil constitutionnel au prétexte que cette disposition contrevient à l’autonomie financière des collectivités et à leur libre administration. Dans un arrêt rendu le 18 janvier, le Conseil constitutionnel a validé cet article, en estimant que « le législateur n’a pas porté à la libre administration des collectivités territoriales une atteinte d’une gravité telle que seraient méconnus les articles 72 et 72-2 de la Constitution ».

Selon les calculs du gouvernement, cela concerne 340 collectivités, notamment les Régions, Départements et des communautés d’agglomération. À La Réunion, les collectivités dont les recettes de fonctionnement dépassent 60 millions d’euros pour l’année 2016 vont donc connaître l’application de cette loi.

Sur la base des données 2016 consultables sur le site internet des impôts, les communes concernées sont Saint-Denis, Saint-Pierre, Le Port, Saint-Paul, Saint-André, Saint-Louis, Le Tampon. La CINOR, le TCO, la CIVIS sont les communautés d’agglomération concernées. À ces institutions s’ajoutent la Région et le Département.

La Région en mauvaise posture

Ce contrôle s’opérera sous la forme de la signature obligatoire d’un contrat avec l’État dans lequel les collectivités s’engagent à ne pas dépasser une hausse annuelle de 1,2 % de leur budget de fonctionnement, inflation comprise. Si elles dépassent cet objectif, alors l’État interviendra pour régler ce budget sous la forme suivante. Il s’agira d’une « reprise financière » égale à 75 % de l’écart constaté. Si au contraire une collectivité respecte son engagement, alors elle aura à une majoration du taux de subvention pour les opérations bénéficiant de la dotation de soutien à l’investissement local (Dsil).

La Région Réunion figure du côté des mauvais élèves. En 2010, ses recettes de fonctionnement pour couvrir ses dépenses dans ce domaine s’élevaient à 466 millions d’euros, contre 628 millions d’euros en 2016 après un pic de près de 700 millions d’euros en 2015. Pendant ce temps, la dette est passée de 368 millions d’euros à 825 millions d’euros, soit près de 1.000 euros sur la tête de chaque Réunionnais.

Les raisons de cette dérive budgétaire sont connues. La Région Réunion a multiplié les opérations clientélistes pour que sa majorité puisse se construire une popularité en vue de se maintenir au pouvoir aux élections de 2015. Cela s’est traduit par la distribution massive de bons de réduction pour acheter des billets d’avion, ainsi que de bons de 500 euros pour acheter des ordinateurs portables. Ces dépenses sont inscrites dans le budget de fonctionnement. À cela s’ajoute les nombreuses embauches de « chargés de mission » dénoncées par l’opposition. Les personnes recrutées sont en effet payées bien au-dessus d’un salaire de contrat aidé.

M.M.


Ce que dit la loi

Extrait de l’article 29 de la loi de programmation des finances publiques pour 2018-2022

I. – Des contrats conclus à l’issue d’un dialogue entre le représentant de l’État et les régions, la collectivité de Corse, les collectivités territoriales de Martinique et de Guyane, les départements et la métropole de Lyon ont pour objet de consolider leur capacité d’autofinancement et d’organiser leur contribution à la réduction des dépenses publiques et du déficit public.

Des contrats de même nature sont conclus entre le représentant de l’État, les communes et les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre dont les dépenses réelles de fonctionnement constatées dans le compte de gestion du budget principal au titre de l’année 2016 sont supérieures à 60 millions d’euros.

Les autres collectivités territoriales et établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre peuvent demander au représentant de l’État la conclusion d’un contrat.

À cette fin, les contrats déterminent sur le périmètre du budget principal de la collectivité ou de l’établissement :

1° Un objectif d’évolution des dépenses réelles de fonctionnement ;

2° Un objectif d’amélioration du besoin de financement ;

3° Et, pour les collectivités et les établissements dont la capacité de désendettement dépasse en 2016 le plafond national de référence défini au présent article, une trajectoire d’amélioration de la capacité de désendettement.

(...)

Pour chaque type de collectivité territoriale ou de groupements, le plafond national de référence est de :

a) Douze années pour les communes et pour les établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre ;

b) Dix années pour les départements et la métropole de Lyon ;

c) Neuf années pour les régions, la collectivité de Corse, les collectivités territoriales de Guyane et de Martinique.

Pour le calcul de la capacité de désendettement de la commune de Paris et du département de Paris, ces deux collectivités territoriales sont considérées comme une seule entité. Le plafond national de référence est celui des communes.

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