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Comment sortir 20.000 personnes de la pauvreté tous les ans ?
Le long chemin vers l’égalité réelle à La Réunion
/ 23 juillet 2016
La publication du premier rapport de l’ONU sur les Objectifs du développement durable rappelle les inégalités dans le monde : 13 % de la population vit dans la pauvreté absolue. Dans notre île, la pauvreté est le quotidien de près de la moitié des Réunionnais. Une fois de plus, le doigt est mis sur un système injuste qui produit l’injustice sociale. L’ambition du concept de l’égalité réelle devrait être de remettre en cause ce système, mais cela n’en prend pas le chemin : aucun débat n’est prévu à La Réunion.
La publication du premier rapport de l’ONU sur les Objectifs du développement durable rappelle les inégalités dans le monde : 13 % de la population vit dans la pauvreté absolue. Dans notre île, la pauvreté est le quotidien de près de la moitié des Réunionnais. Une fois de plus, le doigt est mis sur un système injuste qui produit l’injustice sociale. L’ambition du concept de l’égalité réelle devrait être de remettre en cause ce système, mais cela n’en prend pas le chemin : aucun débat n’est prévu à La Réunion.
- Près de la moitié des Réunionnais sous le seuil de pauvreté, à quand l’état d’urgence sociale ? (photo Toniox)
Le chemin vers l’égalité est encore long. 13 % de la population du monde vit dans la pauvreté absolue, précise le premier rapport de l’ONU sur les Objectifs de développement durable. Cela donne l’ampleur du défi pour éradiquer la pauvreté dans le monde au cours des 15 prochaines années. De plus, des décisions prises récemment rappellent combien des profonds changements sont nécessaires. Par exemple, la Banque centrale européenne a choisi d’acheter pour plus de 10 milliards d’euros de dettes de grandes entreprises européennes, notamment celles du CAC40. Combien de personnes pourraient être sauvées de la pauvreté avec une telle somme ? Au lieu de cela, cet argent va être mis au service des profits d’actionnaires et de dirigeants déjà très riches. Car les sociétés bénéficiaires de cette assistance voient leur situation s’améliorer. Car ce soutien de la BCE montre aux investisseurs que l’on peut avoir confiance en elles, ce qui fera monter le cours des actions.
Autrement dit, l’austérité n’est pas pour tout le monde. Car d’un autre côté, la population subit des politiques de restrictions des dépenses publiques décidées par des États qui ont plombé leurs trésoreries pour venir au secours de banques, victimes de choix qui se sont révélés hasardeux quand la crise des subprimes a commencé en 2008. Cette austérité se ressent dans la solidarité internationale, avec la diminution de la contribution des pays riches à la lutte contre le SIDA dans les pays en voie de développement.
Comme si la France avait 30 millions de pauvres
La Réunion n’est pas épargnée par ces inégalités. 70 ans après la fin du statut colonial, près de la moitié de la population vit encore en-dessous du seuil de pauvreté. Alors, quand un gouvernement annonce qu’il veut arriver à l’égalité réelle dans 20 ans, la lutte contre la pauvreté devrait être une grande priorité. L’égalité réelle signifie que dans 20 ans, la situation sociale de La Réunion sera celle de la France.
Là-bas, le chômage est considéré comme le problème numéro un, car son taux est d’environ 10 % de la population active. En 20 ans, la France a un délai suffisant pour redresser la barre, retrouver un niveau de plein emploi ce qui permettra aux personnes y vivant sous le seuil de pauvreté d’améliorer leurs revenus de manière à en sortir. C’est tout de même un des pays les plus riches du monde, la France a donc les moyens d’atteindre cet objectif.
Sur cette base, l’égalité réelle veut donc dire que dans 20 ans, La Réunion aura elle aussi une situation de plein emploi, ce qui entraînera la fin de la grande pauvreté. Mais dans notre île, la part des personnes touchées par la crise est plus importante. Près de la moitié des Réunionnais vivent en dessous du seuil de pauvreté. C’est comme si la France avait 30 millions de pauvres. L’égalité réelle suppose donc la mise en œuvre de politiques qui permettront à permettre à 20.000 personnes de sortir de la grande pauvreté tous les ans en moyenne.
Urgence d’un débat
Comme à l’échelle du monde, la situation de La Réunion souligne que la fin de la pauvreté ne peut se faire avec le système actuel. C’est en effet ce dernier qui produit les inégalités qui existent aujourd’hui. Manifestement, les mesures proposées dans le projet de loi de programmation sur l’égalité réelle ne remettent pas en cause fondamentalement ce système. Au contraire, elles se calquent sur ce qui a été fait depuis 70 ans. Or, peut-on dire que la volonté des Réunionnais est de vivre dans un pays où une personne sur deux est un pauvre ? Nul doute que si un débat avait lieu à La Réunion, les mesures proposées dans la loi seraient bien différentes.
M.M.