Municipales maintenues alors que les plus de 70 ans sont invités à rester chez eux, sauf dimanche pour aller voter à la veille de la fermeture de toutes les écoles imposée par l’Etat

Coronavirus : élections « hors normes »

13 mars 2020, par Manuel Marchal

Emmanuel Macron a annoncé hier soir les mesures prises par le gouvernement pour lutter contre la pandémie de coronavirus. La priorité est la protection des personnes les plus vulnérables, âgées de plus de 70 ans, priées de rester confinées et d’éviter les rencontres. Comment alors dans ces conditions être sûr que « rien ne s’oppose à ce que les Français, même les plus vulnérables, se rendent aux urnes ». En effet, la situation ne se sera-t-elle pas aggravée entre le premier et le second tour à l’image de l’extension rapide du coronavirus en moins d’une semaine en Italie, obligeant à mettre en quarantaine tout un pays ? En tout cas, c’est la partie du corps électoral susceptible de voter le moins pour les candidats LREM qui n’est pas encouragée à se déplacer pour glisser un bulletin dans l’urne. Ces municipales seront donc des élections « hors normes », sans garantie que le second tour puisse se tenir en cas de scenario à l’italienne. Or, d’après plus de 30 journalistes signataires hier d’une tribune, une dégradation rapide et massive de la situation comme en Italie n’est pas à exclure.

Le président de la République a présenté hier les mesures que la France compte appliquer pour freiner la progression de la pandémie de coronavirus. La première priorité est de protéger les plus vulnérables, identifiés comme les personnes de plus de 70 ans. Depuis hier, il est donc interdit de rendre visite à des parents se situant dans un EPHAD ou un service de soin de longue durée. A ces interdictions s’ajoute cette recommandation :

« Je demande ce soir à toutes les personnes âgées de plus de 70 ans, aux personnes atteintes de maladies chroniques ou respiratoires et en situation de handicap de rester autant que possible à leur domicile ».

C’est ce qu’a déclaré hier le chef de l’État précisant que cette demande n’est pas un confinement. Il sera possible de sortir prendre l’air ou de faire ses courses tout en essayant d’éviter au maximum les contacts.
Une autre mesure annoncée va dans ce sens, c’est la fermeture des crèches, collèges, lycées et université à partir de lundi. Sur la base des entretiens avec des scientifiques, le président de la République constate que les jeunes peuvent être d’importants vecteurs du virus sans en présenter les symptômes. Par conséquent, en contact avec une personne touchée par le virus, un élève pourrait ramener la maladie à la maison et contaminer une personne âgée.
Il est donc clairement demandé aux plus âgés d’entre nous de rester chez eux. Ceci répond à un principe de précaution bien légitime. Mais alors, comment expliquer que quelques instants plus tard, le chef de l’État déclare :

« J’ai interrogé les scientifiques sur nos élections municipales (…) rien ne s’oppose à ce que les Français, même les plus vulnérables, se rendent aux urnes »

Emmanuel Macron a ajouté que des dispositions devront être prises pour éviter tout risque de transmission du coronavirus dans les bureaux de vote. Cela suppose donc d’éviter tout contact, ce qui semble difficile au regard des files d’attente qui peuvent se former.

Course aux procurations ?

Autrement dit, dans ces conditions, si une personne considérée comme vulnérable ne veut prendre aucun risque, elle n’est pas encouragée à se déplacer pour aller glisser un bulletin dans l’urne dans un bureau de vote. Il est également à noter que les plus de 70 ans sont la tranche d’âge susceptible de voter le moins pour les candidats soutenus par le pouvoir. La seule solution conciliant continuité de la vie démocratique et sécurité sanitaire est donc la procuration. Or, cette annonce est intervenue à moins de trois jours du vote. Le délai est sans doute trop court pour que chacun puisse s’organiser. En conséquence, il est à craindre qu’une grande partie des personnes vulnérables au coronavirus ne votent pas dimanche, ce qui voudrait dire que ce premier tour des municipales serait privé d’une part importante de son corps électoral.
Par ailleurs, la décision annoncée par Emmanuel Macron est un coup de poker. Comment en effet le gouvernement peut-il prédire ce que sera la situation sanitaire le 22 mars, dans presque 10 jours ? En effet, la France n’est pas à l’abri d’un scénario à l’italienne. Mercredi et jeudi, près de 200 morts par jour ont été dénombrés, et les événements se sont considérablement accélérés. Qui pouvait croire 10 jours avant la décision qu’un pays européen frontalier de la France allait mettre toute sa population, soit 60 millions de personnes, en quarantaine ?

Quelle garantie pour la tenue du second tour ?

Autrement dit, quelle est la garantie apportée par le gouvernement que la situation sera stabilisée ou améliorée entre aujourd’hui et le 22 mars ? Les propos tenus par le président de la République n’ont pas été rassurants à ce sujet. Il a fait part des limites d’un système de santé victime d’incessantes restrictions budgétaires qui ont poussé les personnels des hôpitaux à faire grève. Ordre est donné de libérer les lits pour faire face à l’afflux des personnes malades du coronavirus, ce qui signifie que la France n’a plus les moyens d’assurer à la fois la gestion quotidienne des soins et celle de l’arrivée d’une pandémie.
D’ailleurs, Emmanuel Macron a souligné que la France fait face à la plus grave crise sanitaire depuis un siècle, soit depuis la grippe espagnole qui fit plus de victimes que les combats de la Première guerre mondiale. Il a fallu plusieurs mois avant que cette pandémie soit stoppée, alors que les échanges étaient beaucoup moins importants qu’aujourd’hui. D’ailleurs, le président de la République n’a pas précisé quand les établissements scolaires et universitaires seront de nouveau ouverts, ce qui montre que la crise sanitaire va s’installer dans la durée en France.

Qui aurait payé les dépenses des candidats en cas de report ?

Si le chef de l’État a annoncé que des crédits seront débloqués pour les hôpitaux, pour les salariés mis au chômage partiel et pour les entreprises en difficulté « quoi qu’il en coûte », le report des municipales était sans doute une dépense de trop pour le gouvernement. En effet, un report de plusieurs mois aurait obligé à organiser une nouvelle campagne, et donc les candidats à engager de nouveau des frais pour payer leur campagne. Si le chef de l’État avait reporté les élections, tous ces candidats auraient pu se retourner vers l’État et demander le remboursement de toutes les sommes engagées, tous et pas seulement ceux qui auraient été crédités de plus de 5 % des suffrages car le scrutin n’aurait pas eu lieu le jour prévu.
Si à La Réunion, la situation sanitaire est bien différente d’en France et permet au scrutin de se tenir dans des conditions quasi-normales, ce n’est pas le cas dans les régions françaises où, comme à Montpellier, les rassemblements de plus de 50 personnes sont interdits.
En maintenant le scrutin municipal sur la totalité du territoire de la République, Emmanuel Macron tente un coup de poker risqué et a décidé de faire de ce vote des élections « hors-normes ».

M.M.

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Messages

  • Monsieur Emmanuel Macron est le capitaine du Bateau France, c’est lui qui est aux commandes et qui choisit le cap de son navire quand la tempête s’annonce et nous devons obéir à ses ordres sans contester .

    Les mesures qu’il a prises sont bonnes et permettront de mieux sécuriser notre pays face au danger que représente maintenant la pandémie du Coronavirus .Il faut contrôler sérieusement l’état de santé de tous ceux qui se présentent à nos frontières pour entrer en France qu’il soient Français ou étrangers , et il faut que la population empêche le virus de se épandre en se déplaçant le moins possible et bien entendu il faut s’organiser pour pouvoir soigner tous ceux qui auront malgré tout été contaminés par la maladie . et faire bénéficier de la solidarité nationale à tous ceux qui seront particulièrement touchés financièrement et professionnellement par l’épidémie .

    L’idée de fermer les crèches , et tous les établissements scolaires et universitaires est excellente mais il faudrait en complément prévoir des dispositions pour que les personnes concernées restent réellement chez elles pendant la période de fermeture de leurs écoles et de leur université . Si les parents ne peuvent pas les contrôler(notamment les plus jeunes ) et les maintenir à leur domiciles, beaucoup iront dans les rues pour retrouver leurs camarades et pourront attraper le virus et le répandre .peut être dans des conditions plus graves que s’ils étaient toujours scolarisés .

    Quant au maintien des élections municipales il ne peut se justifier que si les électeurs se mobilisent suffisamment pour aller voter .On se rend compte que la participations aux élections municipales a diminué régulièrement au cours des 40 dernières années passant de 82% des électeurs inscrits dans les années 70 à environ 62% au cours des dernières élections Or avec l’épidémie qui frappe notre pays il est probable que ce taux de participation va baisser encore de manière importante et qu’il descendra au dessous des 50% . Si c’est le cas on peut se demander quelle serait la valeur juridique de nos élections municipales , et quelle serait la légitimité de tous ceux qui seront élus avec moins de 50% des électeurs inscrits .

    Le vote n’est pas encore obligatoire en France et on ne pourra pas reprocher aux citoyens de ne pas être allés voter pour préserver leur santé et si la participations électorale reste en dessous de 50% ne faudrait il pas annuler immédiatement les élections municipales et recommencer les élections dès que l’épidémie serait terminée ou en tout cas attendre un an pour les recommencer en même temps que les les élections départementales et régionales qui sont prévues dans un an .

    Le président de la république doit ,non seulement veiller à ce que le peuple français reste en bonne santé, mais il est aussi le garant du bon fonctionnement de toutes nos institutions qu’elles soient nationales ou locales et pour que nos communes puissent fonctionner normalement il faudrait aussi que leurs élus représentent tous les administrés et en tout cas au moins plus de 50% des électeurs Si non il n’y a plus qu’a designer une commission spéciale qui sera chargée d’administrer les affaires courantes en attendant le retour à une situation normale . Mais la solution la plus simple c’est encore de prolonger le mandats des élus actuels comme on l’a déjà fait par le passé pour d’autres raison que l’épidémie .

    Comme la majorité des communes seront obligées d’organiser un deuxième tour pour cette élection municipales peut être que notre président de la république pourrait en tirer des conclusions des l’issue du premier tour et éviter un nouveau déplacement des électeurs pour le dimanche 22 Mars au moment ou le nombre de contaminé aura probablement doublé si ce n’est triplé et que le nombre de morts aura certainement augmenté considérablement .

    La Santé des français vaut bien le sacrifice d’un deuxième tour des municipales .surtout si ce sacrifie peut améliorer la santé du corps social qui repose essentiellement sur le bon déroulement des élections ...


Témoignages - 80e année


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