Plusieurs faits révélateurs

Le gouvernement veut-il en finir avec les emplois aidés ?

19 août 2017, par Manuel Marchal

Dans plusieurs régions, les recrutements et les renouvellements d’emplois aidés sont suspendus pour le second semestre. Les déclarations de plusieurs membres du gouvernement affirment que ces contrats sont inefficaces dans la lutte contre le chômage. La diminution des moyens accordés à ce dispositif est une nouvelle illustration de la politique de ce gouvernement : faire des économies sur le dos des plus pauvres tout en accordant des baisses d’impôt aux plus riches.

Manifestation de maires et d’élus contre la baisse des emplois aidés à La Réunion.

À La Réunion, les contrats aidés sont pour le moment une des rares possibilités pour des travailleurs au chômage de longue durée d’espérer retrouver un emploi. Mais le gouvernement a décidé de faire des économies sur ce dispositif. Les faits montrent que des mesures encore plus drastiques qu’à La Réunion ont été prises dans plusieurs autres régions. Cela renforce l’incertitude sur le maintien des emplois aidés l’année prochaine.

« Le Monde » daté du 17 août, évoque « un courriel interne dont l’Agence France-Presse a obtenu copie jeudi 17 août, les agences Pôle emploi d’Ile-de-France ont reçu pour consigne de suspendre les prescriptions de contrats aidés. « Nous vous informons que dans l’attente de la circulaire, qui ne devrait pas arriver avant la fin du mois, il convient impérativement et sans dérogation de suspendre toutes les prescriptions pour les CIE et pour les CAE », écrit un adjoint au directeur régional d’Ile-de-France de Pôle emploi, dans un courriel adressé le 10 août aux directeurs territoriaux de sa région, à qui il demande une « stricte application de ces mesures ».

Gel des emplois aidés

« Le Monde » précise que « L’auteur du courriel précise que cette consigne émane de la délégation générale à l’emploi et à la formation professionnelle, l’administration du ministère du travail chargée du pilotage des politiques de l’emploi, et que « cette mesure concerne aussi bien les renouvellements que les nouveaux contrats ». L’éducation nationale n’est pas soumise à cette cure d’austérité. « Par exception, pour les CAE, les seules prescriptions possibles sont pour l’éducation nationale, les adjoints de sécurité et dans le cadre des CAOM », les conventions annuelles d’objectifs et de moyens passées avec des organismes du secteur non marchand, ajoute-t-il »

L’Ile de France n’est pas la seule région concernée. Le 4 août, Alain Bruneel, député PCF du Nord, adressait un courrier à la ministre du Travail. Voici quelques extraits de cette lettre parus dans « l’Humanité » du 7 août :

« Dans ma circonscription, des responsables associatifs se voient signifier par pôle emploi que l’agence de services et de paiement (ASP) n’honorerait plus les aides financières accordées pour les contrats aidés à compter du 1er août 2017, y compris pour les contrats déjà validés par l’État (…) Sans budget pour le second semestre, ce dispositif ne pourrait donc plus être débuté ni reconduit. Cela priverait de nombreuses associations de recrutements indispensables à leur fonctionnement. Déjà largement fragilisé financièrement par les baisses récurrentes de subventions de la part des collectivités - elles-mêmes victimes de l’austérité imposée par l’Etat, beaucoup devraient renoncer à leurs projets pourtant vitaux pour les habitants et les territoires ».

456.000 contrats prévus, 280.000 financés

Dans son édition du 16 août, « Libération » annonce une baisse générale du nombre d’emplois aidés. « si 293 000 de ces contrats seront bien financés en 2017, il veut en « réduire le volume » par la suite afin de faire des économies », écrit « Libération ». Les restrictions commencent dès le second semestre, car « l’enveloppe offerte par la loi de finances 2017 adoptée par la précédente majorité – 2,4 milliards d’euros – était taillée pour 280 000 emplois aidés. Premier problème : à peine arrivée rue de Grenelle, Pénicaud a fait savoir que 60 % des crédits concernés avaient été consommés par le gouvernement de Bernard Cazeneuve, très friand de ces emplois à l’approche de la présidentielle pour faire baisser le chômage rapidement et permettre à François Hollande de se représenter » (…) « L’exécutif de l’époque s’était finalement résolu à en financer beaucoup plus (456 000). Dans son audit rendu public fin juin, la Cour des comptes avait pointé du doigt les « sous-budgétisations » des crédits alloués au ministère du Travail et les risques de « dépassement » des objectifs fixés. « Selon que seuls les contrats déjà signés seront prolongés ou que le nombre de contrats aidés sera calibré pour stabiliser le nombre de chômeurs, le dépassement serait compris entre [300 millions et 600 millions d’euros] », écrivaient ainsi les magistrats dans leur rapport. ».

Plus que 40.000 ?

Autrement dit, « pour les six derniers mois de l’année, il ne reste que 110 000 contrats disponibles, soit 40 % de moins qu’au premier semestre 2017, et la moitié de ce qui a été utilisé au second semestre de l’année dernière. ». Sur ces 110.000, 70.000 seront affectés prioritairement à l’Education nationale. Il reste donc 40.000 emplois aidés à répartir entre les collectivités et les associations.

Ces différents faits indiquent bien que la crise des emplois aidés est à venir. Ils sont confirmés par les propos de membres du gouvernement. À La Réunion, le ministre de l’Education nationale a indiqué que les contrats aidés n’avaient pas un bon bilan. Hier, le Premier ministre a déclaré que « si les emplois aidés avaient été un instrument efficace de lutte durable contre le chômage, ça se serait vu (…) on aura l’occasion d’avoir ce débat lors de la présentation du budget, je ne vais pas préempter les sujets qui relèvent du Parlement ».

Si cette tendance se confirme, alors se prépare un changement très important dans le traitement social du chômage. La baisse brutale voire la disparition des emplois aidés sans alternative ne pourra qu’accélérer la crise sociale à La Réunion avec, comme l’a indiqué le PCR mercredi, une amplification de la crise économique due à la perte de 200 millions d’euros de salaires pour les Réunionnais.

M.M.

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