Première conclusion de la visite de Jacqueline Gourault en Corse

Vers une révision constitutionnelle pour plus de responsabilité

6 janvier 2018, par Manuel Marchal

Trois jours après l’installation de la Collectivité unique de Corse, Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre de l’Intérieur, était en visite dans l’île. Elle a rencontré successivement Gilles Siméoni, président du Conseil exécutif de Corse, et Jean-Guy Talamoni, président de l’Assemblée de Corse. L’idée d’une révision de la Constitution a été actée en vue d’un « droit à la différenciation » qui réponde « à une partie des questions posées par les élus corses », d’après la ministre. Les dirigeants corses saluent le « déblocage de la question constitutionnelle ». Ce déblocage ne concerne pas uniquement la Corse, il peut donner plus de responsabilités aux Réunionnais. Les responsables politiques sont au pied du mur, que proposent-ils ?

Plus de responsabilité, c’est avoir les moyens de mener une politique adaptée pour lutter contre le chômage à La Réunion.

Mardi, l’Assemblée de la Collectivité unique de Corse issue des dernières élections territoriales a été installée. Depuis le 1er janvier, cette institution fusionne les compétences de la Collectivité territoriale de Corse, du Département de Haute-Corse et de celui de Corse du Sud. Ces compétences sont déjà plus importantes que celles d’une Région et d’un Département réunis. Mais pour les Corses, il faut aller plus loin dans le sens de la responsabilité.

Serment sur la Constitution corse

En effet, cette première séance a débouché sur l’élection de Jean-Guy Talamoni à la présidence de l’Assemblée, et de Gilles Siméoni à celle du Conseil exécutif de la collectivité. Les deux présidents ont ensuite prêté serment sur la Constitution corse de 1755, élaborée avant que l’île soit envahie et annexée à la France. Cette séance a également été marquée par le discours d’investiture en Corse du président Talamoni, qui rappela les principales revendications de la coalition autonomiste-indépendantiste au pouvoir : plus de responsabilités pour les Corses, un statut de résident corse pour lutter contre la flambée des prix liée à la spéculation immobilière, le corse langue officielle à égalité avec le français, et le retour en Corse des prisonniers incarcérés en France à la suite d’actes commis contre les autorités françaises. Pour Jean-Guy Talamoni, ce sont des prisonniers politiques. Cette séance a aussi vu les élus chanter l’hymne corse.

Le même jour sur les ondes de France Inter, Gilles Siméoni avait demandé à Paris de se positionner à la suite du résultat des élections territoriales. Le scrutin a donné une majorité à une coalition porteuse de revendications qui impliquent un changement de cadre : l’autonomie dans la République.

Trois jours après cet événement, Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre de l’Intérieur était hier en Corse. La responsabilité de Jacqueline Gourault est le dialogue avec les collectivités. Aussi est-elle la première membre du gouvernement à se rendre dans l’île depuis la victoire de la coalition autonomiste-indépendantiste aux élections territoriales. Cette première prise de contact du gouvernement avec les dirigeants de la Corse a été positive. C’est ce qu’indiquent les différentes déclarations à l’issue des entretiens.

« Adapter les lois à la réalité des territoires »

Interrogée par France 3, Jacqueline Gourault a indiqué que : « le président de la République a décidé depuis longtemps de faire une réforme de la Constitution sur plusieurs sujets. Parmi les sujets qui sont envisagés, c’est au fond dans le cadre d’un pacte girondin, c’est de donner une capacité d’adaptation, d’expérimentation qui soit possible pour les territoires. On sait que la France est très différente. On sait que la Corse a une spécificité, donc il faut être capable d’adapter les lois à la réalité des territoires »

« Nous avons une réforme constitutionnelle, nous allons faire un droit à la différenciation et ce droit à la différenciation va répondre à une partie des questions que posent les élus corses. Ceci dit, puisqu’il y a une réforme constitutionnelle, on ouvre un dialogue. Les Corses pourront exprimer ce qu’ils souhaitent. »

« Perspective de la révision constitutionnelle »

Des propos allant dans le sens de ceux de Gilles Siméoni, président du Conseil exécutif de la Collectivité de Corse, sur la même chaîne : « Sur le fond, nous avons acté deux axes de travail principaux. Le premier axe, c’est, bien sûr, la mise en place et la réussite de la nouvelle collectivité de Corse, qui est un chantier considérable et extrêmement important. Et le deuxième axe, qui est effectivement une réussite au plan politique, c’est celui d’avoir acté ensemble la nécessité d’inscrire notre dialogue dans la perspective de la révision constitutionnelle générale qui est prévue. La question est donc claire : comment faire prendre en compte nos revendications pour qu’elles soient inscrites dans une révision constitutionnelle qui permettra de les satisfaire ? »

« Déblocage »

Pour sa part, Jean-Guy Talamoni, président de l’Assemblée de la Collectivité de Corse, a précisé à France 3 à l’issue de sa rencontre avec Jacqueline Gourault : « Ce qui est d’ores et déjà acté, c’est qu’il y aura un travail s’agissant de la révision constitutionnelle et de la façon de prendre en compte les demandes de la Corse dans le cadre de cette révision constitutionnelle. On est aujourd’hui clairement en présence d’un déblocage de la question constitutionnelle. »

Et à La Réunion ?

Le prochain temps fort de ces échanges aura lieu le 6 février prochain à l’occasion de la visite officielle d’Emmanuel Macron en Corse. Le chef de l’État participera à la commémoration de l’assassinat du préfet Erignac. Nul doute que des rencontres avec les dirigeants de la Collectivité de Corse aura lieu, ce qui permettra de revenir sur les points défrichés hier avec la ministre auprès du ministre de l’Intérieur. Ainsi pourra être défini le cadre des discussions pour l’évolution institutionnelle de la Corse.

De ces premiers échanges, il apparaît que le gouvernement s’engage à une révision de la Constitution, avec comme objectif un « droit à la différenciation » permettant aux collectivités d’adapter les lois en fonction de leur réalité. C’est ce que propose le PCR pour La Réunion depuis sa création en 1959. C’est ce que le Parti communiste réunionnais a réaffirmé lors de son dernier congrès l’an dernier à Sainte-Suzanne, ainsi que dans le document remis à la ministre des Outre-mer lors de son passage dans l’île : Plus de responsabilité pour plus d’autonomie.

Dans ses vœux adressés à la population réunionnaise, le PCR appelle les forces vives de La Réunion à saisir l’occasion des Assises du développement organisées par le gouvernement pour discuter d’un projet partagé. La perpective d’une réécriture de la Constitution ne concerne pas uniquement la Corse, mais aussi les anciennes colonies de la France devenues département depuis la loi du 19 mars 1946. Ceci renforce donc le poids des responsabilités qui pèse sur l’ensemble de la classe politique réunionnaise : le moment de présenter les propositions est arrivé.

M.M.

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  • Savourer l’instant présent, les corses peuvent le faire en obtenant la possibilité de prendre des décisions pour le présent et l’avenir de leur île. Chez nous, le retard accumulé est considérable en terme de responsabilité du peuple réunionnais. Cet état est la volonté d’une minorité d’hommes politique et de lobbies qui savourent l’instant présent en ne pensant qu’à leur carrière ou la mainmise sur l ’économie locale. On voit bien les dégâts causés par leur manque de perspective sur les problèmes de logement, de transports et du chômage à la Réunion. Pire encore, lorsqu’un visionnaire met en garde la population contre le dérèglement climatique, ces derniers le traitent comme un moins que rien. Lorsqu’il insiste pour réviser notre mode de déplacement, l’autre promet plus de bouchons avec l’installation de 2000 bus supplémentaires dans un trafic saturé. Nous payons actuellement les dérives des décideurs aveugles des réalités réunionnaises. Malgré ce retard, tout est encore possible. L’exemple nous ai donné par d’autres insulaires : les Corses.


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