"Casa DD" : comprenez par là "Casa", comme case, et "DD" comme développement durable. Pour l’heure il ne s’agit que d’un projet qui se concrétisera très rapidement par un appel d’offres pour des réalisations pilotes dans les 24 communes de l’île. Il fera l’objet d’une large concertation, afin que les différents intervenants puissent chacun apporter une contribution dans son domaine d’intervention : architectes, élus, opérateurs sociaux etc.
Ce projet a été présenté hier lors du 2ème forum des énergies renouvelables organisé par l’Agence régionale de l’énergie Réunion (ARER) et présidé par Paul Vergès, président de la Région. Plus concrètement, la "Casa DD", c’est un logement, une case, qui s’adapte au plus près de l’environnement dans lequel il est implanté. C’est une maison qui est conçue pour tenir compte du risque cyclonique, pour s’adapter aux quelque 150 microclimats que compte l’île, qui consomme peu d’eau et d’énergie, qui produit de l’énergie à partir de ressources telles que le vent, le soleil…
C’est aussi une case qui laisse peu de déchets, aussi bien sur le chantier de construction que dans son exploitation au quotidien, et qui aide à leur tri ainsi qu’au recyclage…Et c’est aussi une case qui permet de substantielles économies, échelonnes dans le temps, tout en améliorant le confort et en préservant l’environnement.

Révolutionnaire et ambitieux

L’intérêt du forum organisé hier matin à Saint-Pierre réside dans le fait d’avoir réunis différents acteurs dans des secteurs divers et variés, ce qui a permis un échange intéressant. D’autant plus intéressant qu’il ne s’agissait pas d’encenser un projet certes révolutionnaire et ambitieux, mais aussi de s’interroger sur sa finalité, sur les objectifs poursuivis, sur les moyens à mettre en œuvre.
Bref, de manière pratique et pragmatique, bien des choses ont été dites, permettant de nourrir un débat qui est loin d’être clos. Ainsi, un architecte pose un problème réel et concret : « Seulement 1% des logements individuels construits dans l’île sont conçus par un architecte ». Cela s’explique, entre autre, par le coût de l’intervention de l’homme de l’art. Or, poursuit cet architecte, pour la Casa DD, il est demandé aux intéressés de faire également appel à un contrôleur technique ainsi qu’à un contrôleur de sécurité, autant d’interventions qui ne feront qu’augmenter le coût final. D’autant que le coût de la "Casa DD" est supérieur, toutes proportions gardées, au coût de construction d’une case « traditionnelle ».

« Un geste citoyen »

Cependant, il serait stupide de s’arrêter à la logique des chiffres, même s’il convient d’en tenir compte. D’autant que les promoteurs de cette case d’un nouveau genre mettent en avant les possibilités d’aides et de subventions, notamment de la part de la Région qui, on le sait, a fait des énergies renouvelables et de l’autonomie énergétique de l’île un de ses chevaux de bataille. De plus, comme le faisait remarquer un intervenant, d’autres pistes d’aides restent à explorer : crédits d’impôts, aides européennes etc.
En fait, comme le soulignait une autre intervenante, la "Casa DD" apparaît de la part de ceux qui choisiront ce type de logement, comme « un geste citoyen ». Certes, la mise de départ peut apparaître élevée, certes, des possibilités de subventions, pouvant aller jusqu’à 75% pour la réalisation de certains équipements existent. Mais l’intérêt est avant tout collectif…même si le constructeur d’une "Casa DD" peut aussi ressentir sur ses finances de réelles économies, notamment sur ses factures d’eau, d’électricité, sans compter le confort supplémentaire, difficilement quantifiable. Et le confort, cela se paye aussi…
Enfin, construire une maison, c’est s’engager sur des décennies. Aussi, les études devront-elles porter sur « des coûts globaux d’investissements et des coûts d’exploitation sur 20 ans ». Pour sa part, Philippe Berne, vice-président du Conseil régional estime que « seuls l’expérience et le suivi nous fixeront sur les coûts et les surcoûts réels ».

Économiser l’énergie

Le concept de la "Casa DD" s’appuie non pas sur un seul critère, mais sur toute une série d’aménagements. Par exemple, en tenant compte des microclimats, en fonction de la zone d’implantation, on prend en compte les besoins en climatisation ou en chauffage, selon que l’on soit dans les hauts ou sur le littoral. Ce qui implique à la fois une conception revue et corrigée de l’habitat, mais aussi un choix de matériaux. Ensuite, il y a la prise en compte des besoins en énergie et en eau. Et c’est là tout l’intérêt de la "Casa DD" qui intègre tous ces paramètres pour arriver au final, à des économies. Par exemple, savez-vous que l’habitat est le second consommateur d’énergie ? Savez-vous que les grands consommateurs d’énergie dans l’habitat sont avant tout les appareils électriques, l’eau chaude sanitaire, la climatisation et les différents usages de la cuisson ? Une fois cela dit, comment diminuer sa consommation, sans pour autant réduire son confort ? D’abord en favorisant l’éclairage naturel, ensuite en s’équipant de lampes basse consommation. Enfin, en éteignant certains appareils, sachant que le mode "veille" peut constituer jusqu’à 15% de la consommation d’électricité de votre logement pour un service rendu…nul !
Toujours dans une logique d’économie, une attention particulière doit être apportée à l’électroménager, en choisissant des appareils de classe "A". Comment les déterminer ? Tout simplement en regardant l’étiquette apposée sur ces appareils avant de les acheter. Là aussi, le prix à l’achat sera supérieur à appareil classique. Mais sachez que pour des performances et un confort équivalent, voire supérieur, vous pouvez économiser jusqu’à 1.660 kw/h par an, soit 185 euros par an sur votre facture d’électricité, pour un surcoût global d’investissement dans ce domaine, estimé à environ 600 euros.
Vous pouvez aussi utiliser des dispositifs simples, tels que interrupteurs et appareils programmables, qui peuvent mettre en route certains appareils au moment où la demande en électricité est moins forte… et où les prix sont plus faibles ! Au final, tout cela peut amener un gain de 45% sur votre facture EDF. Comme on dit : les petits ruisseaux font les grands fleuves.
Un exemple très simple pour illustrer le bénéfice de ces petites économies pour la collectivités : si, dans les trois prochaines années, 30 000 Réunionnais s’impliquent dans cette politique d’économie d’énergie, cela éviterait la construction d’une turbine à combustion de 40 mégawatts, semblable à celle qui a été construite récemment en baie de la Possession !

Réduire notre consommation d’eau

La "Casa DD" intègre également les besoins en eau, toujours dans un souci d’économie, mais toujours sans diminution de confort. Il s’agit en fait de définir les véritables besoins en eau potable dans la consommation domestique. Or, il s’avère que seulement 1% de l’eau potable du réseau sert réellement à la consommation. Quand vous tirez la chasse d’eau des WC, ce sont 11 litres d’eau qui sont utilisés. Dans notre mode de consommation actuel, nous utilisons quelque chose comme 190 litres d’eau pour laver la voiture, 120 litres pour une lessive en machine… De réelles économies peuvent être réalisées d’abord par des gestes simples : pas la peine de gaspiller dix litres d’eau en laissant le robinet ouvert en se brossant les dents ou 30 litres en se rasant… Sachant que le budget annuel moyen de consommation d’eau pour une famille de quatre personnes se situe entre 380 et 528 euros (2.500 à 3.500F) par an, le jeu en vaut la chandelle, d’autant que les familles réunionnaises sont généralement composées de plus de quatre personnes par foyer.
Pour la collectivité, cela se traduit aussi par une sollicitation moindre des ressources en eaux, par une limitation des volumes d’eaux usées à traiter, et donc par des investissements coûteux en moins.
Enfin, pour certains usages (WC, lavage, arrosage…) pourquoi ne pas récupérer l’eau de pluie, gratuitement attribuée par le ciel, stockée dans des réservoirs dont la capacité peut varier entre 4.500 et 9.000 litres, injectée dans un circuit indépendant, cette eau constitue autant d’économie sur votre facture. SI vous êtes un maniaque de l’arrosage, sachez que l’eau de pluie est meilleure pour votre jardin que l’eau potable du réseau, qui contient du chlore, un élément que les plantes n’apprécient pas spécialement…

"Casa DD" en bref

Résiste aux cyclones et s’adapte au microclimat du lieu d’implantation Pour obtenir un confort thermique, il faut concevoir des bâtiments en adéquation avec le climat tropical humide de La Réunion et de ses différentes zones microclimatiques. Il s’agit du concept de maison bioclimatique. - Consomme peu d’eau et peu d’énergie Il existe plusieurs solutions complémentaires pour maîtriser l’énergie dans l’habitat, les grands consommateurs d’énergie étant : les appareils électriques, l’eau chaude sanitaire, la climatisation et les usages de la cuisson. - Produit de l’énergie à partir de ressources locales Il est possible de chauffer son eau grâce à l’énergie solaire, gratuite et inépuisable, et de produire de l’électricité également à partir du soleil ou même du vent sur les sites à fort potentiel éolien. - Produit peu de déchets et aide à leur tri ou recyclage Lors du chantier de construction de la "Casa DD", il est possible de faire des économies par une bonne gestion de l’eau utilisée, la gestion des déchets et le choix des produits de construction.