Chirac le jeune loup ou le vieux lion !

26 octobre 2006

Une nouvelle fois RFO crée l’événement télévisuel ce soir en diffusant la première partie du documentaire sur la vie de Jacques Chirac.
Que doit-on penser de ce nouveau type de documentaire que l’on voit débouler sur nos écrans français ?
Il est vrai que, dans d’autres démocraties, l’exercice est commun, mais chez nous c’est sans doute la première fois qu’un film fouillé, retraçant la vie d’un homme politique en exercice est réalisé et surtout diffusé sur le service public.

Qu’allons nous voir ce soir ? D’abord, c’est la première partie qui nous est proposée, la seconde sera diffusée la semaine prochaine contrairement à la métropole où les deux ont été programmées à un jour d’intervalle. Mais cela n’est pas bien grave, on aura tout le temps de digérer ce volet qui nous conduira des années 1932 (Naissance de Jacques Chirac) à 1981 (La prise du pouvoir par la gauche). Cette période que le réalisateur a intitulé "Le Jeune Loup" va nous montrer l’ascension du jeune Chirac jusqu’aux plus hautes sphères de la politique française. Il faut dire que ce Radical Socialiste a bâti son ascension comme un plan de carrière et comme tout cadre supérieur qui se respecte à cette époque, il a eu une ombre, cette ombre c’est Bernadette de Courcel qu’il rencontre à Science-Po et c’est bien connu, derrière chaque grand homme il y a une femme de caractère, ce qui n’est pas forcément réciproque. Chirac se rapproche au plus près de l’État en 1962, ensuite après avoir été élu député de Corrèze en 1967, il entre au gouvernement au poste de secrétaire d’État à l’emploi, puis en soixante-huit, il participe aux négociations des accords de Grenelle, dès cet instant son parcours était tracé. Rien, jamais plus, ne fera plier ce bulldozer assoiffé de pouvoir et plein d’ambitions !

Chirac a une véritable fibre sociale, cela sans doute étonne, mais c’est un véritable radical socialiste. Si l’on mettait dans un même ouvrage toutes les idées qu’il a émis pour changer la société, toutes les réflexions sociales qu’il a eues, l’actuel programme du parti socialiste serait presque un petit pensum social libéral au regard de sa vision de la politique. Mais voilà, c’est qu’en politique, on ne peut pas toujours gagner avec des idées et encore moins en s’affiliant à un parti minoritaire comme le parti radical ou même socialiste, qui à cette époque, n’était que "l’ombre de lui-même". Il ne faut pas oublier que Chirac est avant tout élevé dans les girons du Gaullisme à cause de l’histoire, mais que c’est Georges Pompidou qui va le former.

Mais qu’est le Gaullisme sans le Général De Gaulle ? Rien, sinon un parti qui n’en finit pas de se déchirer afin de se partager les restes de pensées de l’homme du 18 juin.

1974, c’est là que le virage intervient. Jacques Chaban-Delmas, Gaulliste de Gauche, se présente à l’élection présidentielle (suite au décès de Pompidou), au nom de l’UDR (Union des Démocrates pour la République), avec l’idée d’une nouvelle société, qui est en réalité un retour sur le Gaullisme social. Chirac, en bon politique, tend des pièges dans le parti et pousse deux outsiders à se présenter au sein du parti Gaulliste pour déstabiliser la candidature Chaban et le coup réussit. Il le fait pour soutenir le ministre des Finances d’alors, Valéry Giscard d’Estaing. Ce fut la première trahison de Jacques Chirac qui en augurera bien d’autres. Mais il comprend que son ambition que partage sa femme ne peut en rester là. Il prend la tête du parti gaulliste pour en faire une grosse machine électorale qu’il transforme en RPR. À partir de la Mairie de Paris dont il est le premier Maire élu depuis Etienne Marcel (environ 1338. Hé oui entre Etienne Marcel et Jacques Chirac il n’y avait pas de maire à Paris), il commence l’ascension vers son rêve, le Palais de l’Elysée ! Selon les confessions de François Mitterrand en 1981, Jacques Chirac aide la gauche à faire tomber Valéry Giscard d’Estaing, celui qu’il avait aidé à gagner la magistrature suprême.

À Partir de cet instant, Jacques Chirac ne cessera de louvoyer dans l’ensemble du spectre politique, Il sera tour à tour très à droite, allant jusqu’à fustiger les immigrés en disant que les Français ne pouvaient « cohabiter avec les odeurs de leurs voisins » pour ensuite revenir à sa véritable fibre sociale. Mais le problème c’est que même si l’on ne peut nier la sincérité des pensées de ce politique, rien n’y fait, le carriérisme est plus fort que tout. Jamais on n’a vu homme politique aussi peu soucieux du respect de sa parole. Souvenons-nous des promesses jamais tenues, comme la réduction de la fracture sociale, la baisse des impôts de 30 % en cinq ans... La liste n’est pas exhaustive. Et pourtant son optimisme, sa truculence, sa puissance communicative, le font passer au-dessus de tout. Lui, le fils d’un couple de modestes parisiens, il réussit à s’imposer dans le monde agricole qu’il affectionne tout particulièrement. Il est de tous les salons de l’agriculture, sa force, il la tire de ses poignées de mains qu’il distribue volontiers à qui le veut.
C’est cet homme que nous verrons ce soir sur notre petit écran, l’histoire de sa vie, faite de renoncements, de mensonges et de voltes face. Mais nous verrons aussi l’homme attachant, débonnaire, qui sait se faire aimer, un homme à la fois simple et complexe.

Décidément ce service public qu’est France-Télévision ne cesse de nous surprendre depuis qu’il est dirigé par Patrick de Carolis ! Les fictions de bonne qualité se succèdent, ainsi que les documentaires et émissions de société qui nous retracent notre vie et celle des hommes qui dirigent notre pays. Voilà une véritable conception de la Télévision, télévision publique au service du public, espérons que la voie que France-Télévision a mise en place, sera suivie par les responsables de RFO comme il semblerait que ce soit le cas ces derniers mois.

Philippe Tesseron
http://www.espaceblog.fr/teletesseron/


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