Dieu amateur de marijuana

26 avril 2008

C’est en quelque sorte ce que voudrait nous faire croire Jean Louis Rabou, normal lorsqu’on se dit athée, on dézingue le “Dab” des fois qu’il existe.
Ça tombe sur moi ce jeudi, alors que la rumeur enfle dans les rues des 24 communes de notre île sur un possible come back de l’ancien boss du “Quotidien”, je dois filer à la conf du nouveau romancier préretraité sur le point de reprendre un emploi (Vous me suivez ? Tant mieux ;) ). Il faut vous dire que c’était soit Jean-Louis Rabou, soit le préfet et la leptospirose. Mon choix est fait même si il faut batailler dur rue Juliette Dodu pour trouver une place pas trop loin de la librairie “Autrement”. Nous y voilà, face à nous tous le grand homme et son presque premier bouquin. Ça commence bien, il paraît qu’il a déjà commis un roman sous un pseudo. Mais je ne suis pas là pour partir à la recherche du Da Vinci Code, mais juste pour entendre parler d’une herbe étrange, “L’herbe à bon Dieu”. Vous aurez compris que c’est le titre du roman de Jean-Louis Rabou et si vous l’ignorez c’est que vous n’êtes pas branchés informations. Quoique ! Il faut dire que j’étais venu pour un bouquin et lorsque j’ouvre la presse le lendemain, “L’herbe à bon dieu” s’est transformée en “herbe a la di la fé”, normal me direz-vous, il est certaines vapeurs qui vous font vaciller une idée comme une flamme sur le candélabre d’un maître d’hôtel. Bon, mon client est face à moi il ne me reste plus qu’à entendre ce qu’il a à nous dire. Je n’aime pas trop quand les écrivains viennent vous parler de leur œuvre et j’aurais préféré recevoir le bouquin, le lire et puis régurgiter toute ma pensée. Mais puisqu’on est là, écoutons. Tandis que mes confrères sont en train de tenter de sortir les vers du nez de Jean-Louis Rabou le romancier, je feuillette le livre et les lecteurs comprendront que quoi qu’il soit écrit à l’intérieur, un livre c’est quelque chose de jouissif, on le retourne, on lit la quatrième de couverture, non, pas le bas, c’est le CV et ça ne m’intéresse pas, juste le résumé dont bien souvent les élèves en littérature se servent pour faire leur exposé. Eh, ô surprise, le “Dab”, selon notre auteur, s’est mis à la fumette ! Je ne comprends pas ! Dieu est un fumeur de havanes, c’est bien connu, ce n’est pas moi qui le dit, mais Gainsbarre ! Alors si on ne peut plus se fier à personne ! Comme ça Jean-Louis Rabou serait un Gainsbarre sans ses gitanes et sa barbe de trois jours, un Gainsbarre bien propre sur lui ? Bon ben, me voilà avec un bouquin sur les bras pour le week-end (moi qui comptais revoir la version remasteurisée de “L’homme qui tua Liberty Valence”), un roman à terminer, car c’est promis je boirais la coupe jusqu’à la lie !

Il n’est rien de plus terrible qu’un athée qui voudrait croire

Je ne sais pas comment vous lisez, mais moi je ne suis pas contre un bon fauteuil et même quelques notes de musique ou bien un bistro bien bruyant, j’adore le bruit des cafés lorsque je lis, la lecture me donne les images et le bistro le son, il faut dire que cela tombe bien puisque Dieu est partout.
Maintenant arrivons en au roman lui-même. Tout d’abord en ce qui concerne le mot “roman”, je ne suis pas tout à fait d’accord n’en déplaise à Monsieur Rabou et même si sa modestie doit en prendre un coup, on cause bien de philo dans ce bouquin et il n’y a rien qui ressemble plus à un essai qu’un roman déguisé ! Je me l’imagine bien Le Jean-Louis, dans un appartement cave de Brooklyn, accroupi entre deux caisses d’oranges (de Big Sur, bien entendu !) une vieille machine à écrire par terre, il lève les yeux pour regarder par le soupirail les jambes bottées et gainées de noir des New Yorkaises qui défilent sur le trottoir. C’est qu’il en a des choses à dire le “Henri”, non pardon le “Jean-Louis”, ce n’est pas un essai qu’il veut écrire, non il essaie juste de passer quelques jours au paradis pour nous délivrer sa version du Bon Dieu ! Mais puisque le temps est assassin, je lis les 60 premières pages d’un inventaire ordurier entrecoupé de réflexions sur l’existence ou la non-existence de Dieu ! Il ne manque plus que Jun et Anaïs et nous y sommes, je rentre dans un univers qui m’est bien connu, l’imaginaire tracé par le maître du genre, le grand provocateur qui a enluminé mes lectures à l’âge de 20 ans, Henri Miller. Eh oui mon cher Jean-Louis, parce que 20 ans c’est le bel âge, celui où l’on jure et où l’on dresse le poing pour dire un grand “merde” à la vieillesse. Si l’on n’est pas sérieux lorsqu’on a 17 ans, à 20 ans on jette des pavés !
Ce bouquin est en deux parties, la première c’est en quelque sorte le jus en attendant le plat de résistance. Anar vous le fûtes et certainement vous le resterez, mais croyant, ça vous l’êtes et vous l’ignorez ! Il faut dire que vous tournez autour des trois religions monothéistes comme une mouche autour du pot de miel et que vous retardez le moment où vous vous surprendrez à risquer un doigt dans le pot ! Tout homme est porteur d’une question et vous le savez bien puisque cet essai est, à lui seul, la question ! C’est tellement vrai, que dans la seconde partie, vous abandonnez votre inventaire pour développer et nous présenter l’argumentaire. Lors de votre présentation, vous nous avez demandé de lire ce livre et bien je l’ai fait et je le relirai certainement une seconde fois. Je poursuis ma lecture : Dieu revu et corrigé par Jean-Louis Rabou me fait toujours face, un pétard entre les lèvres, avec dans la première partie les questions et dans la deuxième les presque réponses ! « Pourquoi plus on monte dans la montagne, plus on s’approche du soleil, plus il fait froid », juste pour vous dire à quel point l’auteur ne se pose pas de question. Jean-Louis Rabou monte quatre à quatre les marches de l’escalier aux turpitudes, lorsqu’il est sur le palier il y a des portes à ouvrir, il est dans un théâtre pour les fous à la recherche de son Hermine, mais laquelle ouvrir bon sang de bon soir ? Encore une question ! Jean-Louis Rabou nous explique qu’il ne peut pas croire en Dieu puisqu’il ne l’a pas vu ! Il faudrait briser là ! Alors pourquoi ce grand déballage pour attaquer un mythe qui n’existe pas ? « Si Dieu existait, il faudrait s’en débarrasser » (Bakounine), vaste programme !
Eh oui d’autres y ont pensé avant, tiens rien que pour l’anecdote, dans les premières lectures de Miller il y avait Bakounine, étonnant non ? Une autre coïncidence également, lorsque Henri a écrit à Brooklyn son essai sur Rimbaud, il avait plus de 50ans et il avait tâté du journalisme.
Mais revenons en à Jean-Louis Rabou et à son faux roman, tel un palestinien désespéré, l’auteur passe à la Kalachnikov tout ce qui porte le nom de Dieu, Don quichotte était plus sérieux, les moulins à vents eux sont bien réels ! Dieu n’est pas la religion, il faut peut-être relire la Bible ! Alors vous dire si j’ai aimé ce livre puisque c’est le but de cette rubrique, eh bien oui j’ai ramassé “L’herbe à bon dieu” comme une belle claque à mes 20 ans envolés. Je me dis à quand la suite ? Il vous reste mon cher Rabou à démolir l’Amour puisque nous ne sommes que des bêtes, il vous reste à démolir notre regard sur l’Art puisque nous ne sommes qu’un paquet de tripes sans génie et enfin il vous reste à démolir notre humanité puisqu’après la mort, il ne reste plus rien. Je vous fais confiance, car lorsque vous ne croyez pas vous servez si bien la foi, lorsque vous n’aimez pas vous magnifiez si bien l’Amour et même lorsque vous ne pensez pas vous n’êtes tellement pas mort !
Maintenant ce n’est pas le tout, il faut que je trouve un endroit dans la bibliothèque pour le ranger ce foutu roman, bien à sa place et vu l’ordre qui me caractérise ça va être difficile ! Pas question de le ranger sur l’étagère du haut là où je mets tous les nanars qu’on s’acharne à vouloir me faire lire, en plus c’est plein de poussière !
Je pourrais le glisser entre “Les Nourritures Terrestres” de Gide le sodomite et “Le loup des steppes” de Herman Hesse le sage, mais non, sa vraie place est entre les deux Tropiques, celui du Capricorne et celui du Cancer.
Maintenant, un dernier conseil, si vous voulez que l’auteur de cet ouvrage vous dédicace son bouquin que je vous recommande vivement d’acquérir, il sera à la Librairie Autrement ce samedi 26 mai.

Philippe Tesseron
http://tesseron.blogspace.fr/


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