Social

Konsult anou pour un développement durable et solidaire sur 15 ans

Après la manifestation massive et unitaire à Saint-Paul

15 mai 2003

Mardi dernier à Saint-Paul, à l’appel de l’intersyndicale de La Réunion et avec le soutien des forces vives du pays, des milliers de personnes ont manifesté dans la rue pour la cinquième fois en quelques semaines pour dire qu’elles s’opposent à la méthode et aux projets du gouvernement dans le domaine social. Soucieux de réunionniser leur combat, les organisateurs de ce mouvement revendicatif ont souligné dans leur motion qu’ils demandent au gouvernement d’« ouvrir de véritables négociations sur les retraites, sur la loi-programme, sur la décentralisation ».
Invité hier des "Matinales" de Radio-Réunion, Ivan Hoareau a développé cette revendication. Au nom de l’intersyndicale, il a rappelé la nécessité de poursuivre la mobilisation tout en l’élargissant afin que le gouvernement écoute les Réunionnais. « Nous avons fait des propositions sur la loi-programme. On craint qu’elles ne soient pas prises en compte. Ce n’est pas une loi-programme, ce n’est pas un cadre de développement. C’est un empilement de mesurettes. Il faut la différer, complètement la repousser pour que les Réunionnais se concertent et disent quel développement ils veulent », a notamment déclaré Ivan Hoareau. Prochains rendez-vous : tout d’abord dimanche à Saint-Denis à l’appel de l’Intersyndicale de la fonction publique d’éducation puis le 25 mai, grande journée d’action pour la défense des retraites. Hier également, le Collectif "Emplois en danger" a appelé à la mobilisation pour le 21 mai alors que le Mouvement des chômeurs panonnais (M.C.P.) a proposé la création d’un nouveau service pour lutter plus efficacement contre le chômage.
On ne peut que souscrire à l’ensemble de ces aspirations aux convergences évidentes et agir pour qu’elles soient entendues par l’État.

Ivan Hoareau (porte-parole de l’Intersyndicale)

Se concerter pour un véritable projet de développement

Pour la cinquième fois en quelques semaines, l’Intersyndicale CGC/CGTR/CGT-FO/FSU/UIR-CFDT et UNSA, avec le soutien de nombreuses organisations politiques ou associatives et l’ensemble des forces vives, a entraîné des milliers de travailleurs, du public et du privé, dans une manifestation régionale qui a été proportionnellement, ici, deux fois plus forte qu’au plan national. Si les syndicats de l’Éducation nationale ont pu donner le sentiment qu’ils constituaient une forte majorité de la manifestation de Saint-Paul, c’est d’une part parce que les enseignants, en vacances, avaient toute latitude pour organiser la protestation ; c’est aussi parce qu’à l’inverse, les salariés du secteur privé ont plus de difficultés à s’organiser syndicalement et à participer à des manifestations à répétition. Néanmoins, leur forte présence lors du traditionnel défilé du 1er mai indique que le secteur privé est mobilisé très largement. Les appels nationaux et régionaux à « amplifier le mouvement » vont pousser les syndicats et leurs adhérents à chercher des formes nouvelles de "débrayage" et de soutiens au mouvement.
Comme annoncé après la manifestation du 13, l’Intersyndicale de l’Éducation nationale s’est réunie hier. Elle a pris acte des appels nationaux à l’élargissement du mouvement et invite les personnels de l’Éducation nationale à tenir aujourd’hui dans les établissements des assemblées générales pour décider des formes de la suite du mouvement. Le personnel du rectorat a également tenu une assemblée générale hier suivie par environ 130 salariés qui ont décidé à une très large majorité de reprendre la grève. Celle-ci va donc ralentir les services, en l’absence du recteur, qui semble n’être pas revenu dans l’île depuis la réunion des recteurs, au début du mois de mai. La demande de rencontre que lui ont adressée les syndicats de la fonction publique d’éducation a reçu pour réponse une date de rendez-vous fixée au 21 mai. Les organisations syndicales n’étaient pas en mesure de dire si le recteur serait de retour dans l’île avant cette date.
D’ici la fin du mois, deux autres temps forts attendent les syndiqués. D’une part le rassemblement national des syndicats de l’Éducation nationale de dimanche prochain, 19 mai, auquel se joint la CFTC au plan national. Dans l’île, ce temps fort sera marqué par un rassemblement à Saint-Denis, à partir de 9 heures 30 sur le parking de l’ancienne gare routière. Il sera suivi, le 25 mai, d’un autre rassemblement à l’appel de trois organisations syndicales, trois jours avant l’examen du projet de réforme des retraites par le Conseil des ministres.
Invité hier aux "Matinales" de radio-Réunion, le porte-parole de l’Intersyndicale public/privé de La Réunion a expliqué pourquoi les travailleurs n’ont pas d’autre possibilité que de maintenir un haut niveau de mobilisation « pour faire reculer le gouvernement » et le pousser à ouvrir des négociations sur les retraites, le financement de la protection sociale et la réforme de l’Éducation nationale, « il n’y a pas de raison que la rue n’ait pas gain de cause… », a dit le dirigeant syndical, dans un entretien dont nous reproduisons à la suite de larges extraits.

• « Le gouvernement usurpe la démocratie »
« Le président a été élu et le gouvernement a été mis en place pour dire "Non" à Le Pen et à l’extrême-droite. Il n’a jamais eu mandat pour privatiser les retraites, l’Éducation nationale et la protection sociale (…) Donc nous pensons lui apporter un démenti et le faire reculer. Quand des milliers de personnes descendent dans la rue, les choses peuvent bouger ».

• « Élargir le mouvement… »
« La mobilisation devra continuer et il faudra trouver d’autres formes. Je pense qu’il faut aller vers l’élargissement du mouvement (…). Il y a d’autres menaces - la protection sociale, l’Éducation nationale, la décentralisation - il faut aller vers un élargissement au-delà du monde salarial et toucher d’autres catégories socio-professionnelles : les organisations politiques, associatives, mutualistes - je pense notamment aux remboursements de médicaments qui vont peser sur les mutuelles. Il y a une nécessité d’élargir le mouvement pour bloquer ce projet de réformes ».

• « La réforme des retraites vise tout le monde… »
« On nous a dit "public/privé, pour des questions d’équité il faut passer à 40 annuités et demie". Et le gouvernement a voulu opposer le public et le privé. Or, il s’est démasqué, il a montré que son objectif n’est pas l’équité, mais c’est de raser gratis l’ensemble des salariés. Pour preuve, le gouvernement envisage de passer en 2012 à 41 annuités et après 2020 à 42 annuités. C’est la même inéquité que celle mise en place par M. Balladur après 1993. L’objectif est de faire baisser les niveaux de pension, pour qu’on soit obligé de travailler après 60 ans si l’on veut avoir une retraite décente.
Le projet de réforme des retraites vise tout le monde et la baisse programmée du niveau des pensions ne touche pas que les fonctionnaires. Quand il s’agira après d’ouvrir les vannes à la capitalisation telle que le gouvernement l’entrevoit, je vois très mal des salariés du public et encore moins du privé - qui tournent tous autour du SMIC - se lancer dans la capitalisation. À La Réunion, si le projet passe, nous irons vers une extension des bénéficiaires du minimum vieillesse, c’est-à-dire une paupérisation des salariés et des retraités ».

• « Revoir la répartition des richesses »
« Nous comprenons parfaitement le principe de cette réforme. Le nombre des retraités va augmenter dans les années à venir, à partir de là, il faut trouver l’argent nécessaire. Or ce gouvernement veut financer les retraites à financement constant, c’est-à-dire que pas un sou de plus n’est demandé au patronat. La question centrale est de revoir la répartition des richesses dans ce pays et d’aller vers une réforme du financement des retraites. Sur ce point, les organisations syndicales, chacune séparément ou en commun ont fait des propositions très concrètes. (…) Nous pensons que la réforme doit être approchée de façon globale. Nous nous en tenons, à la CGTR, à la déclaration du 7 janvier : une retraite à taux plein à 60 ans. Les moyens financiers existent. Il suffit de regarder la part de la masse salariale dans la valeur ajoutée : elle n’a cessé de baisser. Cela pose la question d’une répartition plus juste des richesses. Quelle réforme faire pour garantir des retraites de niveau décent ? ».

• « Plusieurs pistes pour le financement »
« La CGT propose une assiette élargie à la valeur ajoutée. Que les profits soient aussi dans les cotisations. Une autre piste est celle de la création d’emplois : plus d’emplois créés - des emplois stables à temps plein - c’est aussi plus de cotisations. Il y a aussi l’intégration des revenus financiers. Les organisations syndicales ont mis sur la table un certain nombre de pistes, qui n’ont pas été discutées par ce gouvernement, lequel à notre avis n’a jamais ouvert les négociations ».

• « Un risque de déflation en Europe »
« Nous sommes dans un cadre de rigueur budgétaire qui ne s’explique pas et qui est porteur d’un risque de déflation en Europe. Cette politique de rigueur avait été qualifiée de « stupide » par M. Romano Prodi (aujourd’hui président de la Commission européenne - NDLR). La CGTR a pris position contre les carcans des accords de Maastricht, qui empêchent la relance par la consommation des ménages en Europe. (…) ».

• « Loi-programme : il faut la repousser »
« Nous avons fait des propositions pour la loi-programme mais on craint qu’elles ne soient pas prises en compte. La loi-programme votée en l’état sera un véritable gâchis pour La Réunion. Ce n’est pas une loi-programme, ni un cadre de développement : c’est un empilement de mesurettes sur d’autres mesurettes. On a face à nous un gouvernement qui ne nous entend pas. (…) Il faut différer la loi-programme, la repousser complètement pour que les Réunionnais se concertent et disent quel développement ils veulent ».


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