
Lutte contre la mondialisation ultra-libérale
L’expérience des luttes passées et présentes des Réunionnais
Conférence des ministres de l’O.M.C.
8 septembre 2003

Dans tous ces mouvements contre la mondialisation ultra-libérale, les Réunionnais ne peuvent que se sentir concernés et ont une contribution à apporter au monde : l’expérience de leurs luttes passées et présentes.
Une donnée inscrite dans notre Histoire
Dès le début de leur Histoire, les Réunionnais étaient intégrés dans la mondialisation des échanges. Ils constituaient une main d’œuvre gratuite destinée à alimenter les pays du Nord en café, puis en sucre. Dès cette époque, des Réunionnais se sont levés contre cette injustice. Ils s’opposaient non seulement à ceux qui les commandaient, mais aussi à une économie mondiale qui reposait déjà sur le pillage de pays par d’autres. Si l’acquis de l’abolition de l’esclavage a permis de mettre un terme à un crime contre l’humanité, l’engagisme et la colonisation ne changeaient pas fondamentalement les données du problème. L’économie de notre pays était sous la menace des soubresauts d’un marché distant de plusieurs milliers de kilomètres. Les Réunionnais vivaient alors dans un pays où la situation sanitaire était très alarmante avec une importante mortalité et une grande pauvreté de la majorité de la population.
En se mobilisant, ils ont réussi, en 1946, le tour de force d’avoir le droit d’être traités comme des citoyens d’une grande puissance occidentale de l’époque. Depuis cette date, les forces sociales et politiques de progrès se sont battues pour que, d’une part, les droits reconnus aux citoyens de la République soient aussi ceux des Réunionnais, et d’autre part pour que les spécificités de notre pays soient prises en compte dans les politiques décidées à Paris et à Bruxelles.
Reconnaissance des retards structurels
Parmi les différentes luttes qui ont marqué cette période récente de notre Histoire, la reconnaissance du statut de Région ultra-périphérique de l’Union européenne est un exemple très parlant. Alors député au Parlement européen, Paul Vergès avait fait de cette revendication un axe fort de sa mandature. Elle a débouché sur un acquis qui a une portée considérable dans un contexte de mondialisation ultra-libérale : la reconnaissance par l’Union européenne du droit à une discrimination positive pour des pays qui subissent des retards structurels provoqués par l’esclavage et la colonisation.
À La Réunion, cet acquis a permis de nombreuses réalisations. Il est défendu au Parlement européen pour que la politique régionale de l’Union européenne tienne compte de nos spécificités. Il est également soutenu par les dirigeants des autres Régions ultra-périphériques auprès de la Convention chargée de l’écriture de la future Constitution de l’Union, afin que le droit à une discrimination positive soit inscrit dans le texte fondamental d’un ensemble européen qui comptera bientôt 25 États membres.
Ce statut de Région ultra-périphérique va à l’encontre des valeurs de la mondialisation ultra-libérale. Car pour cette dernière, la question des spécificités n’est pas à l’ordre du jour. Au contraire, il s’agit de soumettre tous les peuples à une seule loi : celle du plus fort, celle du plus riche.
L’apport du mouvement social
Cette année, les luttes menées pour la pérennisation des emplois dits aidés soulignent l’attachement des Réunionnais à une économie plus solidaire, qui permet de lutter contre le chômage structurel qui touche La Réunion depuis plus d’une génération. Il s’agit là de penser le travail en tant que droit humain, et non pas, comme le font chaque jour ceux qui profitent de la mondialisation ultra-libérale, comme une variable d’ajustement qui permet de réaliser de plus grands profits. Le mouvement social de la première partie de cette année a également prouvé l’attachement des Réunionnais à des services publics de qualité. Une revendication qui s’oppose aux privatisations fortement conseillées par les ultra-libéralistes.
Or, chaque jour, ils sont des centaines de millions dans le monde à constater que la prise de contrôle des services publics par des groupes privés, guidés uniquement par la course à la rentabilité, signifie régression sociale et accroissement des inégalités plutôt que progrès humain.
Contribuer à une autre mondialisation
Si l’on regarde vers l’avenir, La Réunion porte plusieurs projets qui peuvent contribuer à lutter contre les lois du tout-marché. Si l’on prend par exemple celui qui vise à rendre notre île autosuffisante sur le plan de l’énergie produite pour faire de l’électricité en utilisant des sources renouvelables. Le vent, le soleil, le volcan, l’eau des vagues et des rivières peuvent nous éviter de dépendre d’un produit sujet à des spéculations au niveau mondial.
Ce projet est suivi de près par d’autres petits pays insulaires pour qui ce qui se fait à La Réunion pourrait être une source d’inspiration et de coopération. À terme, il donnerait la possibilité à notre pays de ne plus dépendre des soubresauts de la mondialisation ultra-libérale dans sa production énergétique, et il ouvrirait de nouvelles perspectives de coopération entre La Réunion et d’autres peuples confrontés à ce même défi. Cela serait une contribution à une autre mondialisation : celle de la solidarité et du partage des savoirs.
Depuis le début de son Histoire, La Réunion est traversée par des mouvements de résistance. Marrons, progressistes, défenseur des services publics et de l’économie solidaire, tous luttent pour que les droits des Réunionnais au développement soient reconnus. Ils démontrent aussi au monde qu’un petit pays est capable de se faire entendre et d’obtenir des acquis, malgré la domination de la mondialisation ultra-libérale.
Un appel de l’association Initiatives Dionysiennes |
Ouv zot zié ! Avec l’O.M.C., les riches volent les pauvres |
Du 10 au 14 septembre 2003, se tient à Cancun (Mexique) le 5ème sommet de l’O.M.C. (Organisation Mondiale du Commerce). À cette occasion, les 146 États membres de cette organisation vont prendre des décisions cruciales pour l’avenir de la planète et de l’humanité. Ils vont prendre des décisions, entre autres, concernant la propriété intellectuelle. L’ADPIC (Accord sur les Droits de Propriété Intellectuelle liés au Commerce) régit les brevets, les droits d’auteur, les noms de marque et la brevetabilité du vivant. Cet accord a été imposé par la pression des firmes agroalimentaires et biotechnologiques américaines : 97% des détenteurs de brevets sont des firmes originaires des pays riches. |
Pourquoi l’accord ADPIC est il dangereux pour les peuples du monde ? |
Les USA ont imposé au reste du monde leur système de brevet : durée de 20 ans (au lieu de 5) et droit de breveter des inventions déjà en usage dans d’autres pays. De la notion d’"invention" - création due au génie humain -, on a glissé vers la notion de "découverte" - action de faire connaître un objet, un phénomène caché ou ignoré, mais préexistant dans la nature. L’application des brevets aux découvertes a donc rendu possible le brevetage du vivant : semences, micro-organismes, processus micro-biologiques sont brevetables, comme les plantes et les animaux, voire les gènes humains… Ainsi, cet accord protège les OGM (Organismes Génétiquement Modifiés) mais empêche les pays du Sud de fabriquer et de distribuer des médicaments génériques. |
L’O.M.C. encourage la biopiraterie |
Par ailleurs, l’ADPIC encourage la biopiraterie, vol intellectuel privant les pays du Sud de leurs ressources naturelles et intellectuelles ancestrales. Deux tiers des plus pauvres dans le monde dépendent de la biodiversité pour subsister : 90% de la diversité biologique du globe est située dans l’hémisphère Sud. En Inde, par exemple, 70% des soins de santé sont basés sur la médecine traditionnelle, qui utilise des plantes locales. Or les États-Unis ont délivré un brevet sur trois plantes qui soignent le diabète (le karela, le jamun et le brinjal) et sont connues depuis des millénaires. Aujourd’hui, les populations locales doivent payer pour utiliser ces plantes.
Autre exemple : en Inde, 70% des semences sont conservées ou partagées. Or l’ADPIC redéfinit la conservation des semences comme un délit de vol, passible de représailles économiques. Cela empêche les plus pauvres de se nourrir et ruine les petits producteurs locaux. Une des conséquences dramatiques de l’ADPIC est donc que personne ne pourra plus produire ou reproduire gratuitement des denrées agricoles, des plantes médicinales ou même des animaux. L’ADPIC place les ressources naturelles vitales de l’humanité sous le monopole de quelques grandes entreprises multinationales (firmes agro-alimentaires, biotechnologiques, pharmaceutiques…). |
Ouv zot zié ! Ensemble, brisons le silence |
Nous nous associons à la mobilisation internationale qui se met en place pour dire :
- Les intérêts des multinationales n’ont pas à primer sur le droit à la santé. - Les connaissances universelles, le patrimoine génétique et la biodiversité sont des biens communs universels ; il faut les exclure des négociations commerciales à l’OMC. Pour réfléchir ensemble, s’informer et débattre de ces sujets, l’association Initiatives Dionysiennes (contact : 0692 29 40 22) vous invite à participer : - le mercredi 10 septembre 2003 à un Café Citoyen spécial "Les enjeux de Cancun" avec projection d’un film de Carole Poliquin, "Le Bien Commun, l’assaut final", de 18 heures à 22 heures ; - le dimanche 14 septembre 2003 à une journée spéciale d’information avec débats, projections de films de 13 à 19 heures. Lieu : "Chez Francky", 13 rue de la Compagnie (Saint-Denis). |
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Témoignages - 80e année


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