Culture et identité

L’héritage ’kaf’ au cœur des débats

"Regards sur l’Afrique et l’océan Indien"

27 mai 2003

Le colloque qui s’est ouvert hier après-midi à l’hôtel de Région Pierre Lagourgue pour se poursuivre aujourd’hui et demain à l’Université, est une initiative de l’association Espace Afrique. Il vise à mettre au cœur du débat social et politique réunionnais « la connaissance et la valorisation de nos origines africaines et malgaches » selon l’expression de la présidente de l’association, Pascale Var. De très nombreux chercheurs ont été invités et s’exprimeront aujourd’hui et demain, au fil des 33 interventions programmées, dont Françoise Vergès présentera la synthèse mercredi soir à la clôture.

La séance inaugurale a eu lieu hier en présence du directeur de la chaire UNESCO, l’historien Edmond Maestri ; du directeur scientifique du colloque, l’historien Sudel Fuma ; d’un représentant du président de l’Université ; d’un élu du Conseil général - tous accueillis par le président de la Région, Paul Vergès, qui a invité les participants à une « re-évaluation » de l’ensemble des éléments hérités d’une culture qui, après avoir été « objet de mépris » - voir d’« oubli » ou d’« amnésie » - doit pouvoir être « transformée en atout », a dit Paul Vergès. Cette transformation fait partie de la lutte pour la reconnaissance de l’identité réunionnaise, dont la Maison des civilisations et de l’unité réunionnaise veut être un outil structurant décisif.
Après les mots d’ouverture prononcés à la tribune devant une salle comble, la séance inaugurale, présidée par l’historien Prosper Eve, a donné la parole à Claude Allibert, archéologue et historien, vice-président de l’INALCO et Michel Wieviorka, sociologue enseignant à l’EHESS où il dirige le Centre d’action et d’intervention sociale (CADIS).

Le professeur Claude Allibert a présenté une suite d’arguments témoignant de « la profondeur de l’incidence du Continent Noir dans l’océan Indien occidental » c’est-à-dire dans les îles Mascareignes et plus particulièrement à Madagascar et aux Comores. Il a estimé qu’aujourd’hui, la querelle née au début du 20ème siècle entre les chercheurs Grandidier et Ferrand sur l’importance du peuplement bantou de Madagascar, a été tranché en faveur de la reconnaissance de ce peuplement, que viennent corroborer des données génétiques, de nombreuses traces de la présence d’esclaves à Madagascar depuis le Xème siècle et des études linguistiques, entre autres constats scientifiques confirmant sans doute possible une « présence bantoue précoce », qui a eu des incidences sur la population des îles de l’océan Indien.
Michel Wieviorka a articulé une réflexion sur le thème "Racisme et citoyenneté" en invitant l’assemblée à « s’interroger sur le fait que le racisme est la maladie sénile de vieux rapports sociaux qui se défont et aussi la maladie infantile de nouveaux rapports sociaux qui se construisent ». L’ensemble de son intervention, reprenant de nombreux éléments exposés samedi à l’Université (voir ci-contre) a mis en exergue le double caractère de "déconstruction" d’anciens modèles (la société industrielle, la République et la Nation) et la "construction" d’un monde nouveau, dans un mouvement de transformation au sein duquel les manifestations de racismes, elles aussi, se sont transformées. Comment dans ce contexte produire plus de citoyenneté ? En évitant, selon Michel Wieviorka, le double écueil « du communautarisme et de la soumission à un universalisme abstrait annulant toute différence dans l’espace public ».

Dix-huit interventions seront présentées aujourd’hui, de 8 heures 30 à 17 heures 30 et seront suivies d’un débat, amphi Genevaux à la faculté des Lettres.


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