Social

L’intersyndicale appelle à la manifestation

Grève dans l’Éducation nationale pour la retraite et le service public

15 avril 2003

Dans le système éducatif de La Réunion, l’intersyndicale annonce des milliers de personnes à la manifestation d’aujourd’hui à Saint-Denis. En attendant, la grève s’est poursuivie hier et c’est maintenant la quasi totalité de l’enseignement qui est paralysé dans le pays. Rappelons que les grévistes s’opposent notamment au projet de transfert d’une partie du personnel de l’Éducation nationale vers les collectivités locales.

La grève s’est poursuivie hier dans l’Éducation nationale à La Réunion. Le matin, un bref affrontement a opposé des grévistes réunis devant le rectorat à Saint-Denis et des militants du mouvement régionaliste Parnouminm venus défendre « la régionalisation des emplois » (voir encadré). Les esprits se sont ensuite vite calmés.
En fait, la journée a été consacrée à des rencontres avec les parlementaires de l’île. Une délégation de l’intersyndicale CGC, CGTR, SGEN-CFDT, UNSA, FO et FSU a notamment eu un entretien avec Huguette Bello, députée de la 2ème circonscription, et René-Paul Victoria, député-maire de la première circonscription (voir encadré).

Les syndicalistes ont une nouvelle fois notifié leur opposition au projet gouvernemental de transfert du personnel ATOS (agents techniciens, ouvriers de service) de la fonction publique d’État à la fonction publique territoriale. En l’occurrence au Conseil général pour les agents travaillant dans les collèges et au Conseil régional pour ceux exerçant dans les lycées.
Ce transfert, s’il devenait effectif, « s’apparenterait à un véritablement démantèlement du service public d’Éducation », estiment les syndicats en affirmant qu’après les ATOS « ce sont les enseignants qui seront concernés par le transfert ». Ils protestent également contre le projet d’alignement des retraites du secteur public sur celles du secteur privé. Ce qui ferait passer la durée légale de cotisations de 37,5 ans à 40 ans.
Outre ces rencontres avec les parlementaires, les grévistes ont tenu des assemblées générales dans différents établissements de l’île pour l’organisation de la manifestation d’aujourd’hui à Saint-Denis (le rassemblement est prévu à 9 heures devant le jardin de l’État). Les organisateurs attendent plusieurs milliers de personnes.

En attendant Gilles de Robien

Rappelons que depuis le lundi 7 avril, l’enseignement est presque entièrement paralysé à La Réunion. Le mouvement est parti de l’Est de l’île et des agents techniciens et ouvriers de service (ATOS) qui refusent donc d’être transférés de l’Éducation nationale aux collectivités locales. Surtout sans avoir été consultés.
Entrant dans le cadre de la réforme de la décentralisation, le projet de transfert - il concerne environ 2.000 salariés à La Réunion - a été annoncé par le Premier ministre, Jean-Pierre Raffarin, à la fin du mois de février.
Le mouvement s’est très vite étendu. Les enseignants du second degré soutenaient la grève. Le projet de réforme des retraites du secteur public et leur alignement sur celles du secteur privé était également mis au centre des revendications.
Le mardi, les grévistes occupaient les locaux du rectorat à Saint-Denis. Mercredi, 90% des établissements du secondaire avaient cessé le travail. Les enseignants du premier degré commençaient à débrayer jeudi. À l’aube du même jour, le gouvernement faisait évacuer les locaux du rectorat. Ce qui avait pour effet de renforcer encore le mouvement de protestation.
Vendredi, le mouvement touchait l’université. Des maternelles aux Facultés, c’est désormais l’ensemble de l’Éducation nationale qui est quasiment paralysée.
Après la manifestation d’aujourd’hui, la mobilisation devrait se poursuivre au moins jusqu’à demain avec l’arrivée de Gilles Robien, ministre des Transports. Il n’est pas directement concerné par le problème, mais en tant que représentant du gouvernement Raffarin, les grévistes ne devraient pas manquer de l’interpeller.
Reste ensuite à savoir la suite qui sera donnée au mouvement. Plusieurs Académies de France étant en vacances en ce moment, un mot d’ordre de grève national a été lancé pour la mi-mai dans l’hexagone. À La Réunion, les grévistes auront à choisir entre deux positions. Il s’agira soit de poursuivre la grève jusqu’à cette date, en risquant de se mettre à dos des parents d’élèves de plus en plus soucieux à l’approche des examens et notamment du bac ; soit de reprendre le travail et de redescendre dans la rue à la mi-mai, avec la possibilité de voir la mobilisation s’effriter.

Pour un débat démocratique entre Réunionnais
Dans un communiqué publié hier, le parti régionaliste Parnouminm affirme qu’un groupe de ses militants venu devant le rectorat pour remettre une motion a été agressé par des grévistes. En dénonçant ce comportement, Parnouminm « réaffirme son attachement à la décentralisation. Face à la situation d’extrême d’urgence dans laquelle se trouve La Réunion, toutes les pistes doivent être examinées pour aider le plus grand nombre. La décentralisation est une piste intéressante. La classe des fonctionnaires doit participer aux efforts ». Le communiqué ajoute que « la régionalisation n’est pas synonyme de privatisation. Affirmer le contraire relève soit de l’ignorance soit de la mauvaise foi. Se battre pour la retraite est tout à fait louable. Pour autant, doit-on sacrifier à ce titre l’emploi local en faisant l’amalgame douteux : "régionalisation = retraite en danger" ? ».

Cet incident nous conduit à rappeler que la gravité des problèmes du pays et l’importance des défis à relever dans les 15 années à venir doivent inciter au débat entre Réunionnais. Tous ensemble nous devons chercher des solutions adaptées aux difficultés actuelles et à venir de La Réunion. Non à la division des Réunionnais, non aux polémiques sans perspectives, oui au débat et au rassemblement autour d’un projet commun pour sortir notre pays de l’impasse.

Invitations aux parents
Les personnels en grève au lycée polyvalent de Bras-Fusil à Saint-Benoît ont publié un communiqué à l’intention des parents d’élèves pour leur dire que dans cette grève « ce n’est pas uniquement notre statut qui est en jeu, mais la société dans laquelle nous allons vivre et l’avenir de vos enfants. Si les mesures du gouvernement se réalisaient, c’est vers plus d’injustices, plus d’inégalités, plus de précarité que nous irions.

Pour en discuter, nous vous invitons à venir nous rencontrer au lycée de Bras-Fusil, le jeudi 17 avril de 17 à 18 heures », conclut le communiqué.

Pour sa part, le collectif des personnels en grève du lycée Bel Air de Sainte-Suzanne « invite l’ensemble des parents d’élèves à une réunion d’information le jeudi 17 avril 2003 à 17 heures, salle du Conseil de la mairie de Sainte-Suzanne ».

Pour « l’ouverture d’une large concertation »
Le député-maire de Saint-Denis a reçu hier matin une délégation de l’Intersyndicale de l’Éducation nationale. Après avoir écouté les doléances de l’Intersyndicale, René-Paul Victoria a indiqué à la délégation « son profond attachement à une éducation "nationale" pour le département de La Réunion », affirme un communiqué de l’élu dionysien. « Il s’est également engagé à relayer auprès du gouvernement la position des personnels concernés, en vue de l’ouverture d’une large concertation, laquelle devrait permettre de recueillir les souhaits des uns et des autres pour l’élaboration d’un projet consensuel », ajoute le communiqué.
René-Paul Victoria a en outre souligné, au cours de cet entretien, « la nécessité pour notre île de rattraper les retards accumulés ces dernières années tant en ce qui concerne le personnel enseignant que le personnel non-enseignant des différents établissements scolaires ».
Enfin, le député-maire de Saint-Denis a fait part à la délégation de l’Intersyndicale de « sa prochaine démarche auprès de l’Inter Groupe Dom-Tom au Sénat et à l’Assemblée nationale pour la définition d’une position commune concernant l’avenir de l’éducation nationale dans les départements d’outre-mer ».

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