Loi programme

Propositions réunionnaises contre vide gouvernemental

Ce soir, débat au sénat

21 mai 2003

Le projet de loi programme pour l’outre-mer va être débattu dès ce soir au sénat. Survol des propositions réunionnaises qui ont purement et simplement été jetées à la poubelle.

Sur l’emploi

Les emplois (dits) aidés
« Le CESR s’interroge sur : la capacité d’absorption du secteur privé et ce d’autant plus que le profil de ces jeunes en situation précaire (expérience, formation initiale) n’est pas nécessairement adapté aux besoins des entreprises ; l’efficacité des dispositions mises en œuvre pour permettre leur réelle insertion ; la pérennité des services qui étaient rendus par ces jeunes à la population.
Pour les RMIstes, le CESR se demande si la durée indéterminée du CAE (contrat d’accès à l’emploi), alors que l’aide est forfaitaire sur 30 mois, n’est pas dissuasive. La mise en place de tes contrats dans le secteur agricole apparaît, par ailleurs, difficile compte tenu de la saisonnalité qui caractérise les activités » (CESR).

Le congé solidarité
« Les commissions souhaitent que les dispositions relatives au congé solidarité soient étendues aux collectivités locales et aux établissements publics, ce qui permettrait des recrutements sur des contrats à durée indéterminée. Les commissions demandent que le principe d’un départ pour un recrutement soit impérativement maintenu afin de lutter contre la précarisation des emplois occupés par les jeunes (risques d’abus sur le temps partiel). Les commissions soulignent que le projet de loi est muet sur l’extension du congé solidarité aux personnels non titulaires des collectivités locales et sur leur remplacement par des jeunes de moins de 30 ans en contrat à durée déterminée ». (Conseil général)

Les emplois jeunes
Motion votée à l’unanimité par la Région sur la reconduction du dispositif "emplois-jeunes", avec demande du maintien de l’intervention de l’État, globalement, au même niveau qu’actuellement.
« Pour les CEJ des associations : étude précise, par secteur d’activité, sur les différents services effectués par les CEJ et CEC, sur le public bénéficiaire, sur les sources de revenus de ces derniers, sur le coût des services rendus par les associations à la société réunionnaise avec étude sur le financement des activités associatives, dans le but de développer le partenariat avec les organismes privés ou publics. (...)
Pour les CEJ des collectivités locales : renouvellement des contrats dans le cadre de la convention pluri-annuelle sur 3 ans, création de nouvelles filières et/ou des grades correspondants aux nouvelles missions exercées par ces CEJ, ouverture de postes en un nombre correspondant au nombre de CEJ recrutés, étude prospective sur les besoins du marché pour adapter la formation. (...)
Pour les CEJ de l’éducation nationale : Il est primordial de proroger tous les contrats arrivant à échéance en juin 2003 (600 CEJ sont concernés à La Réunion) dans l’attente de solutions durables. Création de nouvelles filières et/ou de nouveaux grades correspondants aux nouvelles missions exercées par ces emplois. Soutien financier et accompagner de l’État sur les projets de formation des aides-éducateurs ». (...) (Conseil régional).

Sur le logement

« Les logements évolutifs sociaux bénéficieront au même titre que le locatif social (...) et les travaux d’amélioration dans le parc privé d’un taux de TVA à taux réduit de 2,1% (au lieu de 8,5%). Il serait judicieux de prévoir un taux zéro pour le logement social et très social et un taux à 2,1% pour les logements locatifs intermédiaires. (...). Le CESR demande une nouvelle fois que le rapport du comité national d’information statistique sur l’évaluation de la politique sociale du logement outre-mer soit rendu public le plus rapidement possible ». (...) (CESR)

Sur le financement des collectivités locales

« Le CESR s’interroge sur le contenu des dispositions relatives au renforcement des capacités financières des collectivités locales. En effet, cette nouvelle mesure s’apparente plus, pour l’instant à une déclaration d’intention ». (CESR)

Sur le transport

« Sur la modification législative qui prévoit de confier à la Région la création et la gestion d’une infrastructure ferrée supra communale, le CESR précise que le transport en commun en site propre (TCSP) interurbain ne sera pas forcément ferré dans un premier temps et souhaite que la rédaction de cet article soit assouplie.
Le CESR se prononce en faveur d’un transfert concédé du patrimoine de la voirie classée en route nationale en faveur de la Région Réunion. La question de la sécurité restant sous la responsabilité de l’État ». (CESR)

Sur la culture

« S’il juge positives les mesures de défiscalisation, notamment dans le secteur touristique, ainsi que celles prises en faveur de l’emploi et du soutien à l’économie, le CCEE souhaite que le secteur culturel puisse pleinement être éligible aux dispositifs prévus. Aussi, le CCEE demande que les mesures inscrites aux titres I et II du projet de loi programme bénéficient non seulement aux structures relevant de "la production audiovisuelle" et "NTIC" mais également aux structures "de production, de création et de diffusion de spectacles vivants", d’enseignements artistiques etc. D’une manière générale, le CCEE estime que l’ensemble de structures impliquées dans le secteur culturel devraient pouvoir prétendre aux mesures favorables à la création d’emploi et au soutien économique. En effet, elles représentent des niches d’activités non négligeables donc à privilégier ». (CCEE)

Sur les prix

« Les commissions souhaitent que les dispositions d’allégement des charges sociales patronales s’accompagnent de contreparties sur les prix de vente des biens et des services pour limiter les effets d’aubaine (simple croissance des bénéfices et aucun effet sur l’emploi). Les allégements doivent avoir pour effet d’augmenter les volumes d’activité par une baisse corrélée des prix de vente. La suppression du cumul instauré par la LOOM entre les exonérations de charges sociales patronales et les primes liées à la RTT pose problème notamment pour les secteurs des plus exposés à la concurrence internationale » (conseil général).

Sur l’agriculture

« Concernant le seuil des 40 hectares pondérés, ouvrant droit au bénéfice de l’exonération des cotisations sociales, la commission agriculture regrette que sa suppression n’ait pas été retenue. (...) La même commission regrette que "s’agissant notamment de la défiscalisation, les secteurs de l’agriculture et de la pêche ne seront désormais dispensés de la procédure d’agrément que sous certaines conditions, alors qu’auparavant, celle-ci était automatique". Elle souhaite enfin que "les coefficients fixés pour le calcul du nombre hectares pondérés soient établis en cohérence et en concordance avec ceux figurant au schéma des structures élaboré au niveau local en accord avec les professionnels". (Conseil régional)

Sur la modernisation du droit outre-mer

« Le CESR s’interroge sur le dispositif qui habiliterait le gouvernement à prendre certaines mesures par ordonnancesI Il s’inquiète sur les modalités ainsi que sur le contenu des mesures qui seraient prises dans ce cadre, dans des domaines aussi sensibles que le droit du travail, de l’emploi et de la formation professionnelle, le droit de la santé, le droit de la sécurité sociale et de la protection sanitaire et sociale. Le CESR insiste sur la nécessité d’être consulté en amont sur les mesures envisagées dans ces secteurs au même titre que les collectivités locales ». (CESR)

Sur la continuité territoriale

• « La commission "Affaires générales" regrette le manque de lisibilité du projet mobilité et désapprouve l’attribution d’une dotation globale qui serait versée à la Région. La commission "travaux publics/transports" estime qu’il ne faut pas seulement agir sur la baisse du coût des billets d’avion mais aussi sur le coût du fret maritime et aérien ». (Conseil général)

• « La COMECO note que la continuité, en matière de transports de biens, n’est pas traitée ; en cela, les socio-professionnels sont largement insatisfaits de l’absence de prise en compte de leurs propositions en matière d’export (soutien aux intrants, fret). La commission souhaite également que soit considérée la continuité territoriale pour le transport de données (...) ». (Conseil régional)

Sur l’énergie

« La COMADE émet un avis favorable et propose la création d’un article 39-bis : compétence dans le domaine de l’énergie à confier à la Région Réunion. La LOOM dans son article 50 a confié aux régions d’outre-mer la compétence pour élaborer un programme prévisionnel d’utilisation des énergies renouvelables, ainsi que la maîtrise de l’énergie.
La Région Réunion voulant accorder la priorité à l’utilisation de ces énergies, pour atteindre vers 2025 l’autonomie de production électrique grâce aux énergies renouvelables, il est proposé de lui confier la compétence pour élaborer la programmation prévisionnelle des investissements (PPI), ainsi que la délivrance des autorisations des investissements de production électrique ». (Conseil régional)

Sur l’environnement

« Le Conseil général de La Réunion s’interroge sur la non mise en place, dans le cadre de ce projet de loi, des autres redevances en vigueur sur le plan national et notamment la redevance pollution. À ce titre, le Conseil général souhaite que les dispositions prévues par le présent projet de loi soient contextualisées dans un cadre plus large prévoyant la mise en place ultérieure des autres redevances en vigueur ». (Conseil général).

Sur un projet réunionnais de société

Huguette Bello et Paul Vergès avaient souligné en septembre 2002 : « Le projet de loi programme propose des mesures immédiates, générales et identiques pour l’ensemble des quatre départements d’outre-mer. Mais mettre en œuvre une même politique pour des espaces aussi différenciées condamne à une inapplication des dispositions prévues. Aussi nous pensons qu’il faut préparer dès aujourd’hui une nouvelle loi-programme spécifique à La Réunion. Elle aura pour ambition de proposer un plan de développement durable. Elle sera préparée par des États généraux du développement durable. Deux principes la guideront : la concertation lors de son élaboration et la participation la plus large dans sa mise en œuvre. Nous sommes, pour notre part, prêt à y participer. Et c’est dans le cadre de l’élaboration de cette loi-programme propre à La Réunion que seront décidées les mesures administratives qui en découleraient ».
Aujourd’hui, le même constat est formulé, les mêmes propositions sont faites : le PCR reste attaché à l’idée de l’organisation d’Assises du développement durable qui déboucheront sur un nouveau contrat social à passer entre les Réunionnais d’une part, et entre les Réunionnais et l’État d’autre part. Il suggère l’installation d’une Conférence permanente pour l’emploi dans le cadre de laquelle il est prêt à apporter ses contributions, ses propositions. Les solutions doivent être collectives et doivent être élaborées ensemble.
Car la situation de La Réunion n’est pas celle des Antilles ou celle de certaines régions de métropole, compte tenu de sa poussée démographique, de son dynamisme, de son environnement régional. Les solutions proposées dans le cadre de ce projet de développement durable méritent que chacun apporte sa contribution et qu’ensemble, on définisse les priorités. Le PCR propose une concetation entre Réunionnais afin d’élaborer un nouveau contrat social, un projet fédérateur qui rassemblera toutes les Réunionnaises et tous les Réunionnais.

"La balle dans le camp des parlementaires"
« Les élus de la majorité du Conseil général se sont montrés unanimes : ils sont à peu près contents de la loi-programme et comptent sur les parlementaires pour l’amender sur quelques points bien précis », écrivait "Témoignages" après la séance plénière de l’assemblée départementale consacrée à l’étude du projet de loi programme (le 26/02/03).

Fin de silence ?

La prise de position des parlementaires réunionnais lors du débat au sénat et à l’assemblée nationale est donc attendue. En effet, il n’y a pas eu de commentaires de leur part, ni lors de la publication de l’avant-projet ni lors de la présentation du projet au Conseil des ministres. Ils n’étaient pas présents non plus lors de l’examen du texte au CESR, au Département ou à la Région. Ils n’ont pas pris non plus position sur les propositions des Réunionnais.

Quels intérêts vont-ils donc défendre ? Ceux du gouvernement ? Ceux de la formation à laquelle ils appartiennent ? Ou ceux de La Réunion ?

Nous verrons dès ce soir, comment le sénateur Virapoullé et la sénatrice Anne-Marie Payet ont décidé de se positionner sur tous les points avancés par les Réunionnais, qu’il s’agisse du logement, de l’emploi, de la formation, de la continuité territoriale, de la santé, du développement économique, de l’école, de l’agriculture, de l’exportation, de l’ouverture sur la zone océan Indien d’une part et sur le monde d’autre part. Que vont-ils faire vis à vis de la motion votée à l’unanimité sur les emplois-jeunes ? Vont-ils la défendre ? Vont-ils la passer aux oubliettes ?

Et lorsqu’on connaît leur prise de position sur le dossier des aides-éducateurs…


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