Enseignement

Quel avenir pour l’université de La Réunion ?

Inquiétudes liées au projet de loi sur l’autonomie des établissements d’enseignement supérieur

21 mai 2003

L’Intersyndicale FSU/UNSA de l’université et le Collectif des étudiants ont tenu ensemble une conférence de presse hier à la faculté des sciences. Un projet de loi qui réforme l’enseignement supérieur et qui vise à déconcentrer les universités suscite de nombreuses réactions, et de vives inquiétudes. Lionel Leduc (SNESUP-FSU) commençait l’entretien en déclarant que « les étudiants, les enseignants et les ATOSS de l’université ne protestent pas seulement contre les projets de transfert, de retraites... Un grand danger pèse sur l’enseignement supérieur ».

Pas de concertation

Ce qui déplaît encore une fois dans ce projet de réforme c’est, outre le fond, la façon de faire, explique-t-il : « fin avril un projet nous a été remis, avec un temps de quatre jours pour réagir. Il est évident que nous n’avons pas eu le temps d’interroger toute la communauté universitaire. C’est là encore l’exemple d’une non-concertation, avec un calendrier resserré. Nous avons eu lundi le dernier projet de loi entre les mains, et nous devons y répondre en moins d’une semaine. L’adoption du projet de loi étant prévue pour juin-juillet. C’est un projet de réforme dramatiquement dangereux qui en voulant faire des économies, cause un retour en arrière à l’université et annonce la mort de la recherche ».
Le Collectif des étudiants de l’université de La Réunion (CoEUR) reconnaît que les étudiants ne se sentent pas suffisamment concernés alors que la menace est là. C’est pourquoi, comme l’explique Willy Legros, le collectif va mener plusieurs action pour informer, mobiliser, faire comprendre, faire signer des pétitions. Ce qui les effraie ? Leur avenir au sein de l’université, l’éventuelle régionalisation de l’enseignement supérieur et des formations (voir encadré).

Davantage de précarité

Reprenant les points développés dans leur communiqué, les membres de l’Intersyndicale ont tour à tour énuméré les dangers. Dès les premiers articles, le texte porte atteinte au système universitaire, par l’instauration d’un quatrième conseil, un Conseil d’orientation stratégique, composé de membres extérieurs qui pourront, entre autre, donner un avis sur les candidatures à la présidence de l’université. Selon Raoul Lucas, « ce nouveau conseil aura pour charge de piloter l’université, c’est la porte ouverte aux lobbies économiques et politiques. C’est un bouleversement profond et radical. Les universités ne seront plus maîtresse de leurs orientations, de leur stratégie ».
Pour Lionel Leduc quand le projet de loi dit vouloir donner plus d’autonomie, cela prête à sourire : « Ce COS laissera l’université sous la coupe des entreprises et des collectivités locales, ce qui induit par ailleurs une augmentation des impôts locaux ». Le projet de loi envisage d’offrir au président la gestion des crédits de fonctionnement et des crédits de personnels. Selon l’Intersyndicale, « ce système va précariser l’emploi au sein de l’université à cause du désengagement de l’État. Alors que nous manquons de postes, il n’y a aucun progrès. L’université pourra embaucher, mais sur son budget propre. Déjà, à l’heure actuelle, nous avons autant de contractuels vacataires que de titulaires ».
Autre crainte, les professeurs ne seraient plus recrutés sur concours, mais sur leurs diplômes et leur CV. Les contrats seront individuels et pourraient ne pas être les mêmes d’une université à l’autre. Raoul Lucas précisait que ces réformes rejoignent la philosophie du gouvernement : « Il ne s’agit pas de décentraliser mais de libéraliser. Il ne s’agit pas d’autonomie, mais de mise sous tutelle. On dit qu’on encourage la mobilité, mais on encourage la concurrence ».
Pour ces multiples raisons l’Intersyndicale exprimait hier « sa solidarité totale avec l’ensemble de la fonction publique » et condamne les violences policières de lundi.

Les étudiants
Vers un « avis de décès officiel de l’université de La Réunion »
Le ministre de l’Éducation et le directeur de l’enseignement supérieur (texte disponible sur http://membres.lycos.fr/forumetudiant) viennent de proposer aux présidents des universités et aux syndicats une réforme qui aurait pour conséquence :

- Masters et doctorats (à Bac+3 et bac+8) seront concentrées sur les grandes universités métropolitaines

- Les universités de moins de 15.000 étudiants seront regroupées ou disparaîtront.

- L’université de La Réunion, vidées de ses principaux pôles de recherche au profit des grandes universités, deviendra lycée d’enseignement supérieur cantonné à bac+3, c’est à dire la licence.

- Une bonne partie du contenu des crédits (nouvelles unités d’enseignement) pourra être définie dans chaque université car il n ’y aura pus de référentiel national de formations. Résultats : pour vous inscrire en métropole on vous demandera immanquablement d’où viennent vos 180 crédits.

- Le contenu des licences pro (IUP) sera conditionné par les collectivités territoriales et les entreprises.

- Le président de l’université pourra être une personne extérieure à l’université et la durée de son mandat pourra être doublée.

Le texte, disponible sur internet, contient 25 projets de réforme de la loi sur l’enseignement supérieur, examiné le 19 mai au Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche, seront présentés au parlement en juin-juillet.

Le Collectif des étudiants de l’université de La Réunion (CoEUR)


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