Emploi

Quel impact pour La Réunion ?

Suite à la Conférence nationale pour l’emploi le RMI va devenir RMA et sera géré par le Conseil général

22 mars 2003

François Fillon a confirmé son intention de transformer le RMI (revenu minimum d’insertion) en RMA (revenu minimum d’activité). Il a précisé qu’un tiers des bénéficiaires actuels du RMI seraient a priori ’éligibles’ à ce nouveau dispositif. Il faudra attendre les conclusions de la mission confiée au sénateur Sellier pour connaître les modalités d’application de ce dispositif, qui devrait être mis en place de manière « expérimentale ». Et, dans le cadre de la décentralisation, cette gestion du RMA, comme annoncé par le Premier ministre, devrait être confiée aux Conseils généraux.

Le ministre l’a clairement dit lors de la Conférence nationale pour l’emploi, du mardi 18 mars dernier : « Nos concitoyens ne doivent pas être marginalisés et cantonnés dans l’assistance. Cela les détruit et cela détruit, pour les salariés les plus modestes, la valeur symbolique de l’effort et du travail. Voilà pourquoi nous envisageons d’instaurer le Revenu Minimum d’Activité qui complétera le RMI.
Le RMA permettra d’associer au bénéfice d’une allocation l’exercice d’une activité salariée qui constitue la première étape du retour à l’emploi, qu’il soit marchand ou non marchand. Le RMA est l’un des dispositifs qui doit nous conduire à renforcer systématiquement l’incitation à l’emploi dans notre système social de prélèvements et de prestations. Ce doit être la première marche de l’insertion, qui débouche ensuite sur un emploi de droit commun, un CIE ou un contrat aidé dans le secteur non marchand lorsque l’accès immédiat à l’emploi de droit commun non aidé n’est pas envisageable »
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Assistance ?

Décidément, certaines idées ont la dent dure : le RMI, c’est une prestation d’assistance, estime François Fillon. Pour lui, cela ne peut pas « constituer une avancée sociale et juridique incontestable ». Et l’on ne peut que répéter ce que l’on dit depuis déjà très longtemps : qu’appelle-t-on "assistance" ? Quand on aide tel ou tel secteur, en l’exonérant de charges sociales, en accordant des aides, des subventions ou des suppléments de revenus, n’est-ce pas aussi de "l’assistance" ?
Par ailleurs, il est très intéressant de souligner l’emploi fréquent du mot "bénéficier", très connoté, lorsqu’on parle des prestations servies aux exclus.
Ce RMA est destiné à compléter le RMI. Il vise à favoriser une mise en œuvre plus dynamique du contrat d’insertion entre le érémiste et la société « qui doit l’aider à sortir d’une situation d’assistance ». Il sera attribué pour des personnes qui sont allocataires du RMI depuis plus de 2 ans et pourrait être ouvert à la fois aux employeurs du secteur marchand et non marchand.
Il associera une allocation forfaitaire du RMI et un complément permettant de "bénéficier" d’une rémunération au moins égale au SMIC, les cotisations patronales étant prises en charge par l’État.

Et à La Réunion ?

L’exonération de cotisations patronales pourrait être, éventuellement, en France, un élément incitant les entreprises à embaucher un "RMAste". À La Réunion, les allégements ou exonérations portent sur bien d’autres secteurs. Si l’on aborde la question en termes "d’avantages" pour l’employeur, lorsque celui-ci est dans le privé, le secteur marchand, cette proposition n’apportera rien de plus pour La Réunion.
Quant à l’ouverture du dispositif au secteur non marchand (le privé, via les associations, et les collectivités locales), il n’est pas sans poser une interrogation : comment expliquer que, d’un côté, on supprime un dispositif (emplois-jeunes), et que de l’autre on crée un autre dispositif avec le même objectif ?
Certes, cela concerne des publics différents (d’un côté, les moins de 25 ans, de l’autre les plus de 26 ans). Mais cela déplace le problème, c’est tout. Cela ne peut le régler en profondeur.
Quant à la gestion du dossier RMA, elle n’est pas souhaitée par les conseillers généraux. Comment le gouvernement va-t-il apprécier cette opposition ? Et si pour des raisons institutionnelles la gestion devait néanmoins revenir au Département, aura-t-il les moyens humains et financiers pour y faire face ?
Par ailleurs, des voix de plus en plus nombreuses s’élèvent à La Réunion pour demander l’élaboration d’un secteur de l’économie alternative, solidaire. Cette amorce de solution pourrait être développée, ici, en fonction de la réalité économique et démographique réunionnaise. Et pourquoi pas dans une Conférence réunionnaise pour l’emploi ?

Les autres mesures proposées par le gouvernement
Efficaces à La Réunion ?
Le gouvernement a également évoqué d’autres dispositifs. Ceux-ci peuvent-ils être efficaces pour La Réunion ?
Le CIVIS.
Le CIVIS facilitera l’insertion sociale et professionnelle des jeunes les moins bien formés « qui sont les plus menacés par le chômage et par les difficultés d’insertion dans la société ». C’est un contrat entre le jeune et la collectivité. Il comprend 3 volets : un suivi individualisé, un accompagnement vers la création et/ou la reprise d’entreprise et les emplois d’utilité sociale dans des associations. Pour ce troisième volet, 25.000 emplois seront créés sur 3 ans. La mission confiée au sénateur Gournac permettra d’en préciser les modalités, en liaison avec les collectivités locales et le monde associatif.
Le suivi individualisé peut être intéressant. Par qui sera-t-il fait ? L’institution choisie aura-t-elle, ici, les moyens de répondre à la mission qui lui sera confiée ?
La création ou la reprise d’entreprise : deux thèmes qui figuraient dans la LOOM, repris dans la loi-programme, bien que ne concernant pas uniquement les jeunes. Dommage qu’il n’y ait pas eu d’étude sérieuse menée pour qu’on puisse saisir les résultats dans leur globalité.
Quant à la mention "emplois d’utilité sociale dans les associations", elle s’applique parfaitement... aux postes de services des emplois-jeunes. Au vu des difficultés rencontrées pour pérenniser les emplois actuels, peut-on emprunter cette voie sans que ne soit réalisée au préalable, les études sur ce qui existe, les besoins satisfaits aujourd’hui, ceux à satisfaire demain ?
Les Cellules de reclassement.
Un autre dispositif a pour objectif "d’aider l’accompagnement des mutations économiques". Le gouvernement a été décidé de doubler le plafond de la participation de l’État au financement des cellules de reclassement dans les entreprises touchées par un plan social. Cette aide de l’État intervient lorsque l’entreprise n’a pas les moyens de financer ces mesures de reclassement, ce qui concerne, notamment, les entreprises en redressement ou liquidation judiciaire. Ces cellules de reclassement assurent le suivi individuel des salariés concernés. Cette aide supplémentaire sera de nature à leur garantir une prestation de qualité.
Les plans sociaux, fort heureusement, ne sont pas nombreux à La Réunion. Il y a des redressements et des liquidations judiciaires - les annonces légales le prouvent quotidiennement -. Mais ce sont souvent des petites ou très petites entreprises. Le tissu économique réunionnais n’est pas celui de la France.
La création ou reprise d’entreprise.
Le dispositif "Eden" apporte une aide, sous forme de prime et d’un droit de tirage sur des prestations de conseil ou d’accompagnement pour des personnes en difficulté. Près de 8.000 personnes en bénéficient. Il est prévu de passer à 11.000 bénéficiaires. Ce nouveau financement s’inscrit dans le cadre de la relance d’Eden prévue par le projet de loi sur l’initiative économique. Un élargissement des publics éligibles aux chômeurs de plus de 50 ans sera notamment prévu.
Un secteur lui aussi, évoqué successivement par la LOOM et la loi-programme. Il serait là aussi, souhaitable d’avoir une étude sérieuse sur les impacts de la première.
L’emploi des travailleurs de plus de 50 ans.
La contribution "Delalande" n’est pas supprimée. Toutefois, en cas d’embauche d’un salarié âgé de plus de 45 ans, l’employeur n’aura pas à verser cette contribution s’il procède ultérieurement à son licenciement. Actuellement, l’exonération de la contribution « Delalande » ne joue que pour les embauches au-delà de 50 ans.
Là, la mesure pourrait être intéressante à La Réunion, puisque, selon les chiffres de l’INSEE (TER- 2002/2003), le taux de chômage pour les 50 ans ou plus est de 19,2% à La Réunion contre 6,1% en France, ces chiffres étant ceux de 2001. Mais la question reste toujours la même : le secteur marchand ne peut pas tout absorber. Et quand dans la formulation de la disposition, on évoque l’hypothèse d’un licenciement....

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