Transport

Questions de financement et de décentralisation

Route des Hauts de l’Est

24 avril 2003

La route des Hauts de l’Est, réclamée par certains élus, est certes une idée intéressante, mais la question de son financement n’est pas réglée, les fonds des collectivités locales étant insuffisants. Et avec la mise en œuvre de la décentralisation, tout porte à croire que des priorités devront être effectuées.

Lors de l’étape bénédictine de la "semaine du logement", organisée par l’ARMOS et la DDE, le représentant de la CIREST (Communauté des communes de l’Est) a renouvelé une demande déjà ancienne : celle de la construction d’une route desservant les Hauts de l’Est, afin de faciliter l’installation de bourgs nouveaux et de contribuer ainsi à la question de savoir où construire des logements d’ici 2030.
Ce projet a été développé à plusieurs reprises. En août 2002, il a fait l’objet d’une réunion de travail spécifique entre le Conseil général et plusieurs maires de communes l’Est. Pour certains observateurs ce projet, s’il devenait réalité, pourrait concrétiser « le vieux rêve d’Hubert Delisle », à savoir doter La Réunion d’une liaison à mi-hauteur.

Pour l’ancien gouverneur de l’île, cette liaison avait pour objectif principal de désenclaver les terres agricoles des Hauts. Son rôle était principalement économique. Les promoteurs du projet de liaison des hauts de l’Est envisagent, eux, l’installation d’un axe routier permettant la structuration et l’installation de nouveaux lieux d’habitat où pourrait s’installer une partie des futurs habitants que l’île comptera dans les années à venir. Le projet semble donc anticiper sur les conséquences, en termes de construction de logements, de la croissance démographique. On sait que La Réunion doit construire d’ici 2030 autant de logements qu’il en existe actuellement dans l’île.

Un "pendant"

Le projet de route des hauts de l’Est apparaît donc comme le "pendant" nécessaire à l’Est, le prolongement de la future route des Tamarins qui, elle-même, pourrait prolonger la liaison entre les Lianes et l’Entre Deux.
Parmi les plus chauds défenseurs du projet de la route des Hauts de l’Est, se retrouve le sénateur-maire de Saint-André, Jean-Paul Virapoullé. Certes, ce dernier agit en tant qu’élu de l’Est - on peut, à ce titre, se demander pourquoi il avait attendu si longtemps avant de présenter et de défendre le projet - mais aussi en tant que grand propriétaire foncier sur la partie saint-andréenne du tracé de la future route. Celle ci va passer par le quartier de Dioré où le sénateur-maire de Saint-André possède de nombreuses terres.

Des précédents

Si c’est bien pour servir ses propres intérêts que l’élu saint-andréen se bat pour la route des Hauts de l’Est, il faut reconnaître qu’il n’aura pas été le premier élu du département à agir ainsi. Le tracé actuel de la route reliant la Rivière à Cilaos a été préféré à une option - dont une liaison possible de la cité thermale à La Plaine des Cafres - sous l’influence décisive de Léonus Bénard, ancien maire de Saint-Louis, président du Conseil général et surtout, grand propriétaire terrien à La Rivière. Le tracé choisit aura permis une mise en valeur de toutes ces terres agricoles.
Le choix de Gillot comme site de l’aéroport de La Réunion - au détriment de la plaine des Galets à La Possession - a obéi à des mécanismes pratiquement identiques. Le choix d’implanter le second lycée de La Réunion au Tampon - et non à Saint-Pierre ou à Saint-Paul - est dû au fait que cette implantation avait pour conséquence immédiate de valoriser les terres d’un élu tamponnais à l’époque très influent dans le sérail politique réunionnais.
Si l’objectif principal est de faire face à une demande de logements - laquelle est appelée à s’accentuer - sans doute conviendrait-il, au préalable, d’examiner si d’autres alternatives n’existent pas. En premier lieu la densification des villes de l’Est. La CIREST fait état d’une densification de l’ordre de onze logements à l’hectare, un pourcentage qui reste éloigné de celui préconisé par le SAR.

Quel financement ?

Mais, toujours est-il que le projet de la route des Hauts de l’Est se heurtera, d’entrée de jeu, à une première difficulté : son financement. Ce projet de liaison, à la différence de la Route des Tamarins, aboutira à la réalisation d’une route départementale. De quels moyens disposent actuellement le Conseil général ? Ce dernier ne perçoit qu’une faible part du FIRT (fonds d’investissement routier et des transports) dont les recettes proviennent d’une taxe perçue sur les carburants. De son côté, le Conseil régional qui récupère 80% du FIRT ne manque jamais de signaler les difficultés qu’il éprouve pour faire face aux besoins en routes "nationales" : le financement de la route des Tamarins (4 milliards de francs), la déviation de Saint-Gilles-Les Bains (310 millions de francs) ; de Saint-Leu (330 millions), le trajet alternatif à la route du Littoral, le TCSP Saint-Benoît/Saint-Pierre (24 milliards de francs)... va engendrer des dépenses largement supérieures aux possibilités de La Réunion et du FIRT.

Décentralisation

Il faudra sans doute établir des priorités et les respecter. Or, avec la 4 voies, la déviation de Sainte-Marie et celle de Bras-Panon, en attendant le futur TCSP, l’Est apparaît comme plutôt "bien doté". La route des Hauts de l’Est n’apparaît pas comme la réponse à des besoins réels, comme une anticipation sur un éventuel futur.
Dans le cadre des réformes liées à la relance de la décentralisation, le problème de la gestion des routes et de leur partage entre routes nationales, routes départementales et routes communales va trouver une solution tant en France que dans les DOM. Le dispositif qui en ressortira pourrait influer sur le sort de la route des Hauts de l’Est.


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