Décentralisation

Une autonomie plus statutaire que législative

La Réunion dans la constitution

5 septembre 2003

La Réunion, citée deux fois dans la constitution : une fois avec l’article 72-3 (’amendement Victoria’), l’autre dans l’article 73-5 (’amendement Virapoullé’). Le tout mettant l’île dans une situation paradoxale, où elles a plus d’autonomie (dans le sens juridique du terme)... plus statutaire que législative. « La Réunion n’a pas l’autonomie législative mais a l’autonomie statutaire. La Réunion disposera-t-elle de l’autonomie constituante ? ». Explications de Ferdinand Melin-Soucramanien.

L’universitaire note trois aspects dans l’autonomie (dans le sens juridique du terme), et ce, quel que soit l’État : la première est législative (par exemple, en Espagne), la seconde est statutaire, la troisième étape étant l’autonomie constituante. L’étape suivante étant l’indépendance. Or, pour Ferdinand Melin-Soucramanien, « La Réunion n’a pas l’autonomie législative mais a l’autonomie statutaire. La Réunion disposera-t-elle de l’autonomie constituante ? ».
Si La Réunion n’a pas "d’autonomie législative", c’est l’effet "amendement Virapoullé". Une "autonomie" pourtant très très encadrée, pour les DFA, par le gouvernement ; à tel point que l’universitaire se demandait si ce qui a été présenté aux DFA comme une certaine "autonomie législative" n’était pas, en fait, « une décentralisation plus administrative que juridique ».
Tout n’est pas "perdu" pour La Réunion qui à toujours « une marge de manœuvre comprenant le droit à l’expérimentation, puisque déroger à une loi, c’est une manière de faire la loi ». Donc, pour acquérir une certaine "autonomie législative", il n’y a qu’à avoir « très largement recours à l’expérimentation ».
L’autonomie statutaire, maintenant : contrairement à ce que certains "juristes" ou réputés tels ont laissé croire, si La Réunion n’est pas concernée par les deux alinéas qui précèdent celui dans lequel on dit qu’elle ne peut pas "faire de loi péi", elle peut se voir appliquer les deux alinéas suivants. Pour l’universitaire, « l’évolution statutaire de La Réunion est toujours possible, c’est irréfutable ».
Quant à l’autonomie constituante, ce n’est pas la première fois que la question se poserait pour La Réunion (les recherches de Michel Wanquet l’ont souligné très clairement). Or dès que l’on parle d’autonomie constituante, vient forcément l’idée de valeurs. Se pose la question de savoir quelles sont les valeurs de la société réunionnaise. Question encore aujourd’hui sans réponse, « même si d’énormes travaux ont été entrepris, il reste encore du travail à faire pour qu’on soit capable de faire émerger les valeurs spécifiques propres à La Réunion ».

Article 73 : Sauf La Réunion... mais
« Art. 73. - Dans les départements et les régions d’outre-mer, les lois et règlements sont applicables de plein droit. Ils peuvent faire l’objet d’adaptations tenant aux caractéristiques et contraintes particulières de ces collectivités.

« Ces adaptations peuvent être décidées par ces collectivités dans les matières où s’exercent leurs compétences et si elles y ont été habilitées par la loi.
« Par dérogation au premier alinéa et pour tenir compte de leurs spécificités, les collectivités régies par le présent article peuvent être habilitées par la loi à fixer elles-mêmes les règles applicables sur leur territoire, dans un nombre limité de matières pouvant relever du domaine de la loi.

« Ces règles ne peuvent porter sur la nationalité, les droits civiques, les garanties des libertés publiques, l’état et la capacité des personnes, l’organisation de la justice, le droit pénal, la procédure pénale, la politique étrangère, la défense, la sécurité et l’ordre publics, la monnaie, le crédit et les changes, ainsi que le droit électoral. Cette énumération pourra être précisée et complétée par une loi organique.

« La disposition prévue aux deux précédents alinéas n’est pas applicable au département et à la région de La Réunion.
« Les habilitations prévues aux deuxième et troisième alinéas sont décidées, à la demande de la collectivité concernée, dans les conditions et sous les réserves prévues par une loi organique. Elles ne peuvent intervenir lorsque sont en cause les conditions essentielles d’exercice d’une liberté publique ou d’un droit constitutionnellement garanti.

« La création par la loi d’une collectivité se substituant à un département et une région d’outre-mer ou l’institution d’une assemblée délibérante unique pour ces deux collectivités ne peut intervenir sans qu’ait été recueilli, selon les formes prévues au second alinéa de l’article 72-4, le consentement des électeurs inscrits dans le ressort de ces collectivités. »

Suite et fin des communications de jeudi matin ("Autres modèles d’évolution statutaire"), et du débat de jeudi d’après-midi ("La décentralisation d’hier à demain : pratiques et enjeux") dans notre prochaine édition.

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