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Une seule réponse : le dialogue

Grève dans l’Éducation nationale

22 avril 2003

Le mouvement de grève commencé le 7 avril dernier se poursuit en ce début de semaine, il sera marqué par un grand rassemblement demain à 9 heures au boulodrome de Saint-Pierre. Lancé à l’appel de l’Intersyndicale de la Fonction publique d’éducation, le mouvement s’oppose aux projets gouvernementaux concernant le dossier des retraites et le transfert de la gestion des personnels non-enseignants aux collectivités locales. Des mesures qui risquent d’aboutir à « un démantèlement du service public de l’Éducation nationale ». Les revendications de l’Intersyndicale sont appuyées par la coordination régionale qui appelle également à la poursuite de la grève et à manifester demain à Saint-Pierre (voir encadré) . Pour leur part, les fédérations de parents d’élèves ont signé un communiqué commun appelant à la reprise du travail aujourd’hui (voir encadré) . Elles s’inquiètent mais on rappelle qu’elles tiennent à affirmer qu’elles soutiennent le mouvement des grévistes.
Interrogé hier soir au journal télévisé de RFO, le recteur a appelé à la reprise des cours et a affirmé au sujet des projets du gouvernement que rien n’est fait. Il a aussi "tiré les oreilles" à Gilles de Robien, déplorant que le ministre n’ait pas respecté une tradition républicaine : celle de ne pas intervenir dans un domaine qui ne relève pas de son champ de compétences. Gilles de Robien avait en effet précisé à la délégation de l’Intersyndicale, reçue mercredi dernier à la préfecture, que le gouvernement ne reviendrait pas sur les déclarations de Jean-Pierre Raffarin lors de la clôture des Assises des libertés locales, à savoir le transfert annoncé de plus de 100.000 fonctionnaires de l’Éducation nationale aux collectivités locales.
Tout ce concert de "couacs" n’est pas de nature à apaiser le climat de suspicion envers le gouvernement qui prévoit en ce moment dans la Fonction publique.
"Témoignages" rappelle que lors d’une conférence de presse jeudi dernier à Saint-Pierre, Élie Hoarau, entouré par le secrétariat du PCR, a appelé tous les Réunionnais à se parler pour tout remettre à plat. Le mouvement qui secoue actuellement les écoles, les collèges, les lycées et l’université est révélateur de cette nécessité. Et de proposer l’organisation « entre l’État, les collectivités territoriales et locales, les syndicats et l’ensemble des forces vives des Assises du développement durable, capables de définir "un nouveau Contrat social pour La Réunion" ». L’objectif est de trouver une réponse globale à l’ensemble des problèmes : production, organisation sociale, emploi, aménagement du territoire, identité et culture.

Point de vue des fédérations de parents d’élèves
Dans un communiqué commun diffusé dimanche, la PEEP, la FCPE et l’APELCA-UNAAPE « demandent dans l’intérêt de nos enfants la reprise des cours à partir de mardi matin dans les meilleures conditions pour un service public d’éducation de qualité ».
La coordination de La Réunion appelle à la poursuite de la mobilisation
Après les mobilisations de la semaine dernière et la visite ministérielle de Gilles de Robien, la coordination de la Réunion a tenu samedi une conférence de presse dans le but d’informer la population et en particulier les parents d’élèves et les personnels de l’Éducation nationale de la situation actuelle et des décisions concernant les modalités de poursuite de l’action prises par l’ensemble des personnels consultés.

Lors de la conférence de presse de samedi dernier, les représentants de la coordination ont retracé les différentes étapes de leur mouvement. Entre mardi 8 Avril et jeudi 10 Avril, se sont mis en place dans les différentes régions de l’île, les quatre secteurs de la coordination, et la première réunion de la coordination régionale s’est tenue à Saint-Leu le vendredi 11 Avril. « Cette émergence d’une coordination s’est faite naturellement », précisent-ils, « après les différentes grèves nationales lancées par les syndicats qui ont émaillé l’année scolaire 2002-2003 jusqu’à la grève du 3 avril ».

« Trois dates et trois mesures ont accéléré le mouvement de grève à La Réunion comme dans les autres académies de métropole », indique la coordination. Tout d’abord, « les lettres de transfert en date du 12 mars reçues individuellement par le personnel TOS c’est-à-dire les techniciens, ouvriers et employés de service, les Conseillers d’orientation psychologues, les Assistants sociaux et les médecins de l’E.N., ce qui concerne 110.000 agents de l’État ». Ensuite, « le rapport du Conseil d’État rendu public le 20 mars 2003 qui se fonde sur les effectifs des trois fonctions publiques ». Enfin, « la date du 11 avril fixée par M. Fillon, qui devait rendre publics les projets du gouvernement en matière de retraite ».

Dans chaque secteur géographique, les différentes assemblées générales ont élu leurs représentants (toutes les catégories de personnel sont représentées) à la coordination de La Réunion, qui elle-même a choisi des représentants qui tournent. Précisant que « les personnels de l’Éducation nationale décident en assemblée générale de la reconduction de leur mouvement » et indiquant que les personnels « ont voté dans les assemblées générales de jeudi 17 et de vendredi 18 avril, dans la majorité des établissements scolaires, du primaire à l’université, la reconduction de la grève », la coordination a annoncé « que la grève était reconductible » aujourd’hui et appelle à la tenue d’assemblée générale dans les établissements.

La coordination précise que « depuis le début de cette grève », elle « travaille avec l’Intersyndicale », elle désire regrouper « l’ensemble des personnels de toutes catégories, syndiqués et non syndiqués ».

La coordination rappelle que depuis la rentrée scolaire 2002, plusieurs académies pilotes testent les projets de décentralisation. Ils s’agit de Bordeaux et Rennes. Des mesures ont été appliquées et, selon la coordination, « les différents corps de personnels révèlent un certain nombre de dysfonctionnements ». La coordination met également en garde sur plusieurs mesures prévues par le gouvernement : la suppression du corps des MI-SE (surveillants d’internat et d’externat), remplacés par des Assistants d’éducation, la refonte et la réforme du système des retraites qui touche toute la fonction publique qui doit être achevée au plus tard le 28 mai, la nécessité pour les Universités de voir leurs diplômes s’aligner sur ceux de l’Europe, la décision de la suppression des 6ème de consolidation, suppression dans les IUFM de la formation des professeurs des écoles spécialisés.

Sur le transfert des personnels non-enseignants aux collectivités locales, la coordination note que « les collectivités territoriales avouent le flou notamment en matière de moyens financiers ». Elle met également le doigt sur le problème des personnels contractuels et précaires travaillant dans les établissements scolaires sous contrat CES. « Que vont-ils devenir lors du transfert ? », s’interroge la coordination. Et dans un cadre plus général, elle s’inquiète d’un « changement de missions de tous les personnels transférés ». Elle se demande également comment s’effectueront les recrutements.

Devant cette inquiétude, la coordination appelle à participer aux deux forums organisés par l’Intersyndicale qui se tiendront aujourd’hui à partir de 15 heures, au campus du Moufia à Saint-Denis dans le Nord et au parc du 20 décembre à Saint-Leu dans le Sud. Elle appelle également à manifester demain à partir de 9 heures à Saint-Pierre.

Des annonces inquiétantes pour les retraites
La coordination de La Réunion a fait part de ses inquiétudes au sujet de la réforme des retraites. C’est sur les documents du COR, organisme de référence mis en place par l’État, que reposent les analyses du gouvernement, comme celles des syndicats, rappelle-t-elle. « Ce qui différencie les propositions du gouvernement de celles prônées par les syndicats, ce sont leurs conclusions », indique la coordination qui poursuit : « le gouvernement a choisi les mesures qui lui convenaient car ses efforts, il ne désire pas les porter sur les retraites ».

« L’effort budgétaire demandé à l’État est possible, il suffit qu’il fasse des restrictions dans d’autres domaines, ce qu’il refuse », estime la coordination « les analyses prouvent que la division actuelle public/privé n’est pas inéluctable, que les lois Balladur peuvent disparaître et que les retraites du privé peuvent être alignée sur celles du public ».

« Ce qui est annoncé ne peut qu’inquiéter l’ensemble de la fonction publique et des salariés puisqu’à une conception solidaire et sociale du régime des retraites se substituerait un régime fluctuant, inégal reposant sur les flux monétaires », prévient la coordination. Et de citer un exemple de ce qui pourrait arriver si une telle réforme aboutit : « un enseignant de 65 ans ou plus travaillant avec de jeunes enfants ou avec des collégiens. Il ne s’agit pas du manque de compétences de la personne concernée mais de sa perception par l’élève lui-même ».


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