Billet philosophique

À quoi servent la politique et le journalisme ?

2 avril 2010, par Roger Orlu

Nous poursuivons nos réflexions — ouvertes à toute critique — sur les causes du résultat négatif et très grave des dernières élections régionales à La Réunion. Tout en sachant que ce n’est aussi d’une certaine façon qu’un épiphénomène, comme le peuple réunionnais en a connus beaucoup tout au long de son Histoire et qu’il ne changera rien à la vocation émancipatrice de ce peuple.

On le sait, c’est prouvé mathématiquement et ne peut être contesté par personne, la cause principale de l’élection de la liste UMP à la direction de la Région Réunion est due avant tout et principalement au refus de certains dirigeants de la fédération socialiste de se désister ou de conclure une union avec l’Alliance après le 1er tour. Les résultats du 2ème tour le montrent : si un tel désistement démocratique ou une tel accord fusionnel avait été accepté par le PS, les forces de progrès l’auraient emporté et le changement de société entrepris au cours des deux précédents mandats aurait pu faire de nouvelles avancées vers la cohésion sociale et le développement durable.
Mais, une fois de plus, on a eu l’illustration — à travers ce comportement sectaire — des effets négatifs du déficit ou du refus du dialogue entre les forces dites progressistes. Ce manque de dialogue traduit le refus de faire de la transformation de la société la priorité de la politique, au profit d’intérêts de classe et d’intérêts personnels.
Malheureusement, suite à la trahison de Michel Vergoz et ses complices, le peuple réunionnais sera privé pendant quatre ans d’un outil essentiel pour continuer son combat afin d’achever la décolonisation de son pays. Mais il dispose d’autres moyens, qu’il ne manquera pas d’utiliser à cette fin.

Le rôle des médias

Une autre cause de cet événement mérite d’être analysée. Il s’agit du poids du pouvoir médiatique, qui a réussi à tromper une partie des Réunionnais en se faisant le relai de l’idéologie dominante. Cette idéologie est la lutte contre le communisme réunionnais, qui incarne depuis plus de 70 ans — avec d’autres forces démocratiques — la résistance de notre peuple à toutes les formes d’oppressions et d’injustices.
Pendant toute la campagne électorale, le système médiatique au service de la bourgeoisie néo-coloniale a joué la carte de la désinformation et de l’irrationalité pour abuser la population. Pas d’information objective sur le bilan positif et sur la richesse du projet global et cohérent de l’Alliance ; pas d’information libre sur le potentiel considérable de l’Alliance en raison de son regroupement de compétences, de générations et d’opinions diverses. Par contre, un déversement de calomnies sur les candidats de l’Alliance et notamment sur sa tête de liste.
Prenons un seul exemple : ce sont toutes les stupidités qui ont pu être dites sur l’âge de Paul Vergès. Les anti-communistes et leurs médias ont tout fait pour donner une image négative du "vieux Vergès".
Cette diversion est évidemment insensée. Faut-il mettre une étoile jaune sur un responsable politique en fonction de son âge et le vouer à l’extermination sur cette base ? Comment peut-on rabaisser le niveau du débat politique à ce point, surtout quand on connaît la jeunesse d’esprit, le haut degré de compétence et le dévouement de cette personne ?
À l’inverse, les médias dominants ont tout fait pour donner une image positive de Didier Robert, en fonction de son âge et de son charme, susceptibles d’incarner "le changement". Voilà comment, en jouant sur l’émotionnel et la sensiblerie, on a piégé le rationnel et l’intelligence d’une partie de l’électorat.

« Changer les mentalités »

Sur la base de ces réflexions, on peut se poser la question : à quoi servent la politique et le journalisme à La Réunion ? Le but des responsables politiques et des journalistes est-il d’être solidaires des luttes de libération du peuple réunionnais ou de défendre leurs intérêts personnels ?
Pour aider les uns et les autres à se comporter en citoyens responsables et solidaires, nous voudrions citer un extrait d’un entretien accordé au "Quotidien" le 29 mars, soit plus d’une semaine après les élections, par le docteur Catherine Gaud, présidente de RIVE (une association réunionnaise de lutte contre le Sida) et candidate sur la liste de l’Alliance. Cette ex vice-présidente de la Région, aujourd’hui élue de l’opposition, se « demande si l’argent, là où il se trouve, sert bien à lutter contre les maladies ou les injustices ».
Elle ajoute : « Cela suscite également une réflexion globale sur nos priorités. Préfère-t-on se battre pour que les gens aient des conditions de vie acceptables ou pour que les traders remportent des milliards de bénéfices ?
Un milliard de gens ne mangent pas à leur faim. Trois millions d’enfants meurent de la rougeole par an parce qu’ils n’ont pas accès au vaccin qi est pourtant basique. Cela reflète bien un manque de solidarité dans notre société.
La société moderne fait l’apologie de l’égoïsme et du matérialisme. Il existe trop de disparités sociales entre les personnes. Dans les associations on traite souvent sur le terrain les conséquences des décisions politiques. C’est d’ailleurs l’essence même de mon propre combat politique. Je vais me battre pour mes valeurs, qui sont la justice sociale et la fraternité. Comme pour la lutte contre le sida, il faut changer les mentalités »,
conclut Catherine Gaud.
Voilà une réponse intéressante à la question posée en titre de ce "billet philo".

Roger Orlu

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