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Billet philosophique
27 février 2009
Compte tenu du mouvement social qui se déroule à La Réunion et qui va prendre de l’ampleur dans les prochains jours, nous voudrions consacrer ce "biyé filo" à de larges extraits du « Manifeste pour les "produits" de haute nécessité » publié il y a une dizaine de jours par 9 intellectuels antillais dans le cadre du conflit qui oppose le peuple guadeloupéen depuis six semaines à l’État et au monde économique de son île. (1) Ce texte est signé par des écrivains, enseignants, philosophes, plasticiens et sociologues. Ils expriment leur solidarité avec les peuples antillo-guyanais et réunionnais, en soulignant ce qu’il y a de commun entre nos pays, que l’on appelait autrefois les « quatre vieilles colonies ». Voici donc quelques passages de ce document, où a été mise en exergue une phrase d’Aimé Césaire : « l’heure est venue d’abandonner toutes les vieilles routes ». Les inter-titres sont de Roger Orlu.
Solidarité
« C’est en solidarité pleine et sans réserve aucune que nous saluons le profond mouvement social qui s’est installé en Guadeloupe, puis en Martinique, et qui tend à se répandre à la Guyane et à La Réunion. Aucune de nos revendications n’est illégitime. Aucune n’est irrationnelle en soi, et surtout pas plus démesurée que les rouages du système auquel elle se confronte. Aucune ne saurait donc être négligée dans ce qu’elle représente ni dans ce qu’elle implique en relation avec l’ensemble des autres revendications. Car la force de ce mouvement est d’avoir su organiser sur une même base ce qui, jusqu’alors, s’était vu disjoint, voire isolé dans la cécité catégorielle. (…)
Mais le plus important est que la dynamique du Lyannaj — qui est d’allier et de rallier, de lier, relier et relayer tout ce qui se trouvait désolidarisé — est que la souffrance réelle du plus grand nombre (confrontée à un délire de concentrations économiques, d’ententes et de profits) rejoint des aspirations diffuses, encore inexprimables, mais bien réelles, chez les jeunes, les grandes personnes, oubliés, invisibles et autres souffrants indéchiffrables de nos sociétés. (…)
Du prosaïque au poétique
Dès lors, derrière le prosaïque du "pouvoir d’achat" ou du "panier de la ménagère" se profile l’essentiel qui nous manque et qui donne du sens à l’existence, à savoir : le poétique. Toute vie humaine un peu équilibrée s’articule entre, d’un côté, les nécessités immédiates du boire-survivre-manger (en clair, le prosaïque), et, de l’autre, l’aspiration à un épanouissement de soi, là où la nourriture est de dignité, d’honneur, de musique, de chants, de sports, de danses, de lectures, de philosophie, de spiritualité, d’amour, de temps libre affecté à l’accomplissement du grand désir intime (en clair, le poétique).
Comme le propose Edgar Morin, le vivre pour vivre, tout comme le vivre pour soi n’ouvrent à aucune plénitude sans le donner à vivre à ce que nous aimons, à ceux que nous aimons, aux impossibles et aux dépassements auxquels nous aspirons.
Une dentition de système
La "hausse des prix" ou "la vie chère" (…) sont les résultantes d’une dentition de système où règne le dogme du libéralisme économique. Ce dernier s’est emparé de la planète, il pèse sur la totalité des peuples, et il préside dans tous les imaginaires (…) de tout le fait humain.
Ce système a confiné nos existences dans des individuations égoïstes qui vous suppriment tout horizon et vous condamnent à deux misères profondes : être "consommateur" ou bien être "producteur". Le consommateur ne travaillant que pour consommer ce que produit sa force de travail devenue marchandise ; et le producteur réduisant sa production à l’unique perspective de profits sans limites pour des consommations fantasmées sans limites. L’ensemble ouvre à cette socialisation antisociale, dont parlait André Gorz, et où l’économique devient ainsi sa propre finalité et déserte tout le reste. (…)
Il est donc urgent d’escorter les "produits de première nécessité" d’une autre catégorie de denrées ou de facteurs qui relèveraient résolument d’une "haute nécessité". (…) C’est tout ce qui constitue le cœur de notre souffrant désir de faire peuple et nation, d’entrer en dignité sur la grande scène du monde, et qui ne se trouve pas aujourd’hui au centre des négociations en Martinique et en Guadeloupe, et bientôt sans doute en Guyane et à La Réunion.
Le social et le politique
D’abord, il ne saurait y avoir d’avancées sociales qui se contenteraient d’elles-mêmes. Toute avancée sociale ne se réalise vraiment que dans une expérience politique qui tirerait les leçons structurantes de ce qui s’est passé. Ce mouvement a mis en exergue le tragique émiettement institutionnel de nos pays, et l’absence de pouvoir qui lui sert d’ossature. (…)
L’imbroglio des pseudo-pouvoirs région-département-préfet tout comme cette chose qu’est l’association des maires ont montré leur impuissance, même leur effondrement, quand une revendication massive et sérieuse surgit dans une entité culturelle historique identitaire humaine, distincte de celle de la métropole administrante (…). Hélas, toute victoire sociale qui s’obtiendrait ainsi (dans ce bond par-dessus nous-mêmes), et qui s’arrêterait là, renforcerait notre assimilation, donc conforterait notre inexistence au monde et nos pseudo-pouvoirs.
Ce mouvement se doit donc de fleurir en vision politique, laquelle devrait ouvrir à une force politique de renouvellement et de projection apte à nous faire accéder à la responsabilité de nous-mêmes par nous-mêmes et au pouvoir de nous-mêmes sur nous-mêmes. Et même si un tel pouvoir ne résoudrait vraiment aucun de ces problèmes, il nous permettrait à tout le moins de les aborder désormais en saine responsabilité, et donc de les traiter enfin plutôt que d’acquiescer aux sous-traitances. (…)
Un nuage de voracités
Ensuite, il y a la haute nécessité de comprendre que le labyrinthe obscur et indémêlable des prix (marges, sous-marges, commissions occultes et profits indécents) est inscrit dans une logique de système libéral marchand, lequel s’est étendu à l’ensemble de la planète avec la force aveugle d’une religion. Ils sont aussi enchâssés dans une absurdité coloniale qui nous a détournés de notre manger-pays, de notre environnement proche et de nos réalités culturelles, pour nous livrer (…) aux modes alimentaires européens. C’est comme si la France avait été formatée pour importer toute son alimentation et ses produits de grande nécessité depuis des milliers et des milliers de kilomètres.
Négocier dans ce cadre colonial absurde avec l’insondable chaîne des opérateurs et des intermédiaires peut certes améliorer quelque souffrance dans l’immédiat, mais l’illusoire bienfaisance de ces accords sera vite balayée par le principe du "marché" et par tous ces mécanismes que crée un nuage de voracités (donc de profitations nourries par "l’esprit colonial" et régulées par la distance) que les primes, gels, aménagements vertueux, réductions opportunistes, pianotements dérisoires de l’octroi de mer ne sauraient endiguer. (…)
Nous sommes tous victimes d’un système flou, globalisé, qu’il nous faut affronter ensemble. Ouvriers et petits patrons, consommateurs et producteurs portent quelque part en eux, silencieuse, mais bien irréductible, cette haute nécessité qu’il nous faut réveiller, à savoir : vivre la vie, et sa propre vie, dans l’élévation constante vers le plus noble et le plus exigeant, et donc vers le plus épanouissant. (…)
On peut mettre la grande distribution à genoux en mangeant sain et autrement. On peut renvoyer (…) les compagnies pétrolières aux oubliettes, en rompant avec le tout-automobile. (…)
Le capitalisme contemporain réduit la part salariale à mesure qu’il augmente sa production et ses profits. Le chômage est une conséquence directe de la diminution de son besoin de main-d’oeuvre. Quand il délocalise, ce n’est pas dans la recherche d’une main-d’œuvre abondante, mais dans le souci d’un effondrement plus accéléré de la part salariale. Toute déflation salariale dégage des profits qui vont de suite au grand jeu welto de la finance. Réclamer une augmentation de salaire conséquente n’est donc en rien illégitime : c’est le début d’une équité qui doit se faire mondiale. (…)
Le travail a achevé de perdre toute signifiance quand, devenu lui-même une simple marchandise, il s’est mis à n’ouvrir qu’à la consommation. Nous sommes maintenant au fond du gouffre. (…)
Utopies
Projetons nos imaginaires dans (les) hautes nécessités jusqu’à ce que la force du Lyannaj ou bien du vivre ensemble ne soit plus un "panier de ménagère", mais le souci démultiplié d’une plénitude de l’idée de l’humain.
Imaginons ensemble un cadre politique de responsabilité pleine, dans des sociétés martiniquaise, guadeloupéenne, guyanaise et réunionnaise nouvelles, prenant leur part souveraine aux luttes planétaires contre le capitalisme et pour un monde écologiquement nouveau. (…)
Nous appelons donc à ces utopies où le politique ne serait pas réduit à la gestion des misères inadmissibles ni à la régulation des sauvageries du "marché", mais où il retrouverait son essence au service de tout ce qui confère une âme au prosaïque en le dépassant ou en l’instrumentalisant de la manière la plus étroite.
Les premiers exemples de sociétés post-capitalistes
Nous appelons à une haute politique, à un art politique, qui installe l’individu, sa relation à l’autre, au centre d’un projet commun où règne ce que la vie a de plus exigeant, de plus intense et de plus éclatant, et donc de plus sensible à la beauté.
Ainsi, chers compatriotes, en nous débarrassant des archaïsmes coloniaux, de la dépendance et de l’assistanat, en nous inscrivant résolument dans l’épanouissement écologique de nos pays et du monde à venir, en contestant la violence économique et le système marchand, nous naîtrons au monde avec une visibilité levée du post-capitalisme et d’un rapport écologique global aux équilibres de la planète…
Alors voici notre vision : petits pays, soudain au cœur nouveau du monde, soudain immenses d’être les premiers exemples de sociétés post-capitalistes, capables de mettre en œuvre un épanouissement humain qui s’inscrit dans l’horizontale plénitude du vivant…
- Ernest Breleur, artiste plasticien.
- Patrick Chamoiseau, écrivain.
- Serge Domi, sociologue.
- Gérard Delver, écrivain.
- Édouard Glissant, écrivain.
- Guillaume Pigeard de Gurbert, professeur de philosophie.
- Olivier Portecop, directeur du centre de ressources informatiques (université Antilles-Guyane).
- Olivier Pulvar, maître de conférence à l’université Antilles Guyane.
- Jean-Claude William, professeur de science politiques à la faculté de droit de Martinique.
* Envoyez vos critiques, remarques et contributions afin que nous philosophions ensemble… ! [email protected]
(1) Le texte intégral de ce "manifeste" est accessible sur le site de "l’Humanité" à la date du 17 février 2009.
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