Billet philosophique

« Démocratiser la république »

27 juillet 2012, par Roger Orlu

L’actualité encourage à revenir dans ce ’billet philo’ sur la problématique du développement durable, qui reste hélas encore beaucoup trop absente des réflexions que nous avons chaque jour. En effet, combien de fois quotidiennement nous posons-nous la question : qu’est-ce que je fais pour les autres et pour changer notre société, où la priorité est l’intérêt personnel au détriment de l’intérêt commun ?

Dans "Le Monde" de dimanche dernier, le journaliste et écrivain français Hervé Kempf a dénoncé dans sa chronique le point de vue exprimé quelques jours plus tôt sur une radio par un banquier de France sur la crise du système capitaliste, que les plus riches veulent faire payer aux plus pauvres. Hervé Kempf, particulièrement connu pour ses ouvrages "Comment les riches détruisent la planète" et "Pour sauver la planète, sortez du capitalisme", reproche au banquier en question de n’avoir pas évoqué la question des inégalités et de la répartition des richesses ; il regrette également que « l’idée d’écologie était aussi absente de l’entretien ».
Ensuite, il critique la revue britannique "The Economist", tout autant porteuse du « dingue dogme capitaliste », qui ose soutenir la croissance économique des États-Unis sur la base de l’exploitation du gaz et du pétrole de schiste. Or cela se fait « au prix d’un saccage environnemental invraisemblable et de très importantes émissions de méthane, un puissant gaz à effet de serre ».

À quand l’abolition de l’apartheid social ?

Selon Hervé Kempf, « la vision du monde par les classes dominantes reste limitée au court terme et aux vieilles lubies de la croissance ». Au point que « la sécheresse historique que connaissent cet été les États-Unis ne paraît pas plus en mesure de leur ouvrir les yeux que l’affaissement du système financier en 2008. Tout se passe comme si les catastrophes étaient la seule issue possible ».
C’est pourquoi, « pour se changer les idées », le chroniqueur du "Monde" recommande la lecture des ouvrages d’un grand écrivain et philosophe nord-américain, Murray Bookchin (1921-2006), qui fait partie « de ceux qui ont établi rigoureusement le lien entre crise écologique et question sociale ». Cela nous confirme l’importance des diverses dimensions du développement durable et notamment du lien à créer entre une économie durable, sociale, solidaire, une société équitable et un respect de notre environnement naturel. Donc, à quand l’abolition de l’apartheid social dans notre pays et à quand la fin du tout-automobile au pétrole à La Réunion ?

« L’oligarchie ça suffit, vive la démocratie »

Mais ce qui est également intéressant dans cet article d’Hervé Kempf, c’est qu’il évoque aussi une autre dimension du développement durable trop souvent mise de côté, à savoir : une politique démocratique, avec un pouvoir au peuple plutôt qu’aux notables sur-rémunérés. D’ailleurs dans son dernier ouvrage paru en janvier 2011, "L’oligarchie ça suffit, vive la démocratie", il souligne qu’il est nécessaire de « s’émanciper de la schizophrénie des dominants, qui ne voient que l’économie et leur pouvoir en méprisant la nature ».
Il en est de même pour Murray Bookchin, qui aborde la question du développement durable « sous l’angle de la hiérarchie et des rapports de pouvoir qui déterminent les situations », en lançant un appel à « démocratiser la république et radicaliser la démocratie ». Cela concerne le peuple réunionnais comme tous les peuples du monde ; et cela passe par l’achèvement de la décolonisation proclamée en 1946, donc la libération et la responsabilisation de notre peuple, sans oublier la reconnaissance et la valorisation de "nout kiltir" comme le respect des droits de "nout nasyon", ainsi qu’un co-développement solidaire avec les peuples frères de notre région et l’Union européenne.
Voilà pourquoi il ne faut pas oublier les six piliers du développement durable…

Roger Orlu

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