« Je suis donc je pense ! »

1er octobre 2010

Ce mercredi 29 septembre, le Cercle philosophique réunionnais, présidé par le sociologue Laurent Médéa, a organisé son café-philo mensuel à Virgin Mégastore de Saint-Denis avec Frédéric Paulus. Ce psychologue et sociologue, particulièrement compétent et bien connu à La Réunion, a présenté un exposé très intéressant sur le thème “Neurosciences et psychanalyse”. Cet exposé a été suivi d’échanges amicaux entre les participants à cette rencontre et avec Frédéric Paulus.
Celui-ci a accepté de faire parvenir à “Témoignages” le texte intégral de son intervention, ce dont nous le remercions. Nous en publions ci-après la première partie, où il présente sa vision des nouveaux liens entre les neurosciences et la psychanalyse. Dans la seconde partie de son exposé, il donne une dizaine d’exemples concrets de découvertes scientifiques récentes dans ce domaine et présente les nouvelles perspectives qu’elles ouvrent, notamment en termes d’éducation des enfants (contact : [email protected]). Les intertitres sont de “Témoignages”.

La rencontre entre neurosciences et psychanalyse n’aura pu se réaliser qu’après des remaniements possibles grâce à l’impulsion des sciences biologiques. La contestation constructive au sein de la communauté des psychanalystes n’ayant pu se faire de manière satisfaisante, du fait notamment du charisme de Freud, il nous aura fallu attendre les découvertes des sciences “dures” pour que la citadelle du freudisme s’ouvre suite à des ruptures épistémologiques successives.
Cela confirme que l’histoire des sciences n’est pas une simple accumulation de découvertes et d’inventions qui s’additionneraient progressivement, mais une aventure faite de perpétuelles ruptures.
Il est nécessaire de détruire une connaissance antérieure, qui est toujours une connaissance en attente de modification. Pour Gaston Bachelard, « une expérience scientifique est une expérience qui contredit l’expérience commune ».

Il y a quelque chose à rompre

Le concept d’obstacle épistémologique implique “la rupture”, il y a quelque chose à rompre. D’où le terme “d’obstacle” épistémologique.
Pour Bachelard, ces obstacles que l’esprit doit surmonter pour s’instaurer ne sont pas des obstacles extérieurs — comme la difficulté d’observer les phénomènes —, ni des obstacles techniques liés à la mise au point des instruments. Ce sont des phénomènes internes à l’esprit même du chercheur. « C’est dans l’acte même de connaître, intimement, qu’apparaissent, par une sorte de nécessité fonctionnelle, des lenteurs et des troubles ».
Autrement dit, c’est dans l’esprit même du chercheur, dans sa démarche intellectuelle, que l’on trouve des causes d’inertie, et même de régression. C’est là que se manifestent des barrières au progrès de la connaissance.

L’obstacle de la dichotomie corps-esprit

Discutons de quelques obstacles épistémologiques qu’il aura fallu dépasser dans la théorie psychanalytique.
• Obstacle majeur : l’ouvrage “L’Erreur de Descartes” par Antonio Damasio vient ébranler l’obstacle de la dichotomie corps-esprit. Je suis donc je pense !
Les sciences humaines sont quant à elles enseignées en Facultés des Lettres, et Sciences humaines et les Sciences biologiques en Facultés des Sciences, les sciences qui aborderaient l’être humain dans sa globalité sont donc dissociées en “pièces détachées”.
• Question de contexte : On retrouve régulièrement un penseur dominant empêchant une pensée divergente ou différente ; Freud aura régné sur la théorie du psychisme pendant plus d’un siècle.
Qui aurait pu imaginer qu’une théorie hypothético-déductive puisse perdurer autant de temps ? Il ne s’agit pas de rejeter cette théorie dans sa globalité, mais plutôt d’en extraire le bon grain de l’ivraie, pour reprendre une métaphore biblique !

Frédéric Paulus

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