Billet philosophique

Kosa nou fé pou la loi si légalité réel ?

24 juin 2016, par Roger Orlu

Dans cette chronique philosophique de vendredi dernier, nous vous avons fait part de réflexions et d’informations sur le concept de « la pleine conscience ». Un concept cultivé notamment par le penseur immortel asiatique Bouddha (5ème - 6ème siècle av. J.-C.), pour qui « avec nos pensées, nous bâtissons notre monde ». Eh bien, où en est notre prise de conscience réunionnaise de ce que nous devons faire afin de donner un contenu historique à la loi pour l’égalité réelle qui sera votée 70 ans après celle du 19 mars 1946 ayant aboli officiellement le statut de colonie du pays ?

La Docteure en philosophie Aude-Emmanuelle Hoareau, ex-présidente du Cercle Philosophique Réunionnais.

Tout d’abord, rappelons que le 10 mai 2015 en Guadeloupe, le président de la République française a annoncé son intention de faire voter cette année une loi pour réaliser l’égalité réelle dans les pays d’outre-mer. Et selon ce qui a été annoncé par le chef de l’État français, cette loi va marquer les 25 années à venir pour servir de base à notre avenir.

Il se trouve que les premiers documents officiels concernant ce projet viennent d’être transmis à des instances consultatives en France pour qu’elles donnent leur avis ; c’est le cas notamment du Conseil Économique, Social et Environnemental (CESE) et du Conseil d’État. Et dans un courrier envoyé aux médias le 20 juin, Dominique Rivière, représentant de La Réunion au CESE, signale que cette instance se prononcera le 12 juillet. On sait aussi que le projet de loi sera présenté au Conseil des ministres le 27 juillet.

« Cri d’alarme »

En attendant, des Réunionnais ont commencé à exprimer leur point de vue à ce sujet, comme le révélait par exemple Franck Cellier mardi dans ‘’Le Quotidien’’, où il annonçait que pour le Conseil Économique Social et Environnemental Régional, présidé par Jean-Raymond Mondon, « les axes proposés ne suffiront pas à construire un modèle de développement réellement novateur pour les outre-mer ». Pour faciliter la réflexion de nos compatriotes ainsi que leur prise de conscience des enjeux du vote de cette loi, nous voudrions aussi rappeler le « cri d’alarme » lancé par Paul Vergès le 15 juin lors d’une conférence de presse.

À cette occasion, le sénateur communiste réunionnais a insisté avec force sur le fait que la loi sur l’égalité réelle ne pourra pas ne pas tenir compte des « problèmes inévitables et extrêmement graves » liés à la croissance démographique, aux changements climatiques et à la mondialisation capitaliste. Il plaide donc pour « un rassemblement des Réunionnais afin de préparer l’avenir de nos enfants et petits enfants » et pour que « l’on arrête de nous imposer des décisions » (voir sur le site http://www.kanalreunion.com/ l’intégralité sonore des propos tenus à cette occasion).

« La zistis macro »

Il se trouve que depuis plusieurs années déjà des philosophes réunionnais réfléchissent à ces défis et appellent nos concitoyens à prendre leurs responsabilités. Nous citerons par exemple la Docteure en philosophie Aude-Emmanuelle Hoareau, ex-présidente du Cercle Philosophique Réunionnais, qui a publié en septembre 2010 son livre ‘’Concepts pour penser créole’’ « pour parvenir à une prise de conscience, à un rassemblement (…) vers plus de lumière », comme le dit l’écrivain Jean-François Samlong dans la préface.

Cet ouvrage attire par exemple notre attention sur le fait que « le Réunionnais se sent victime de la zistis macro (justice de macros), toutes ces inégalités sociales qui perdurent, les promesses non tenues des hommes politiques ». « La zistis macro, dit-elle, c’est le fait que malgré leurs combats et leurs espérances, les Réunionnais soient enchaînés à des injustices, prisonniers d’un système de fonctionnement social inégalitaire et qui ne bouge pas ». Au nom de cet appel à l’amour de la justice et pour faire bouger les choses, posons-nous la question : kosa nou fé pou la loi si légalité réel ?

Roger Orlu

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