Témoignage de Michel ONFRAY : La COVID fait sortir du… sillon

18 décembre 2020

Le témoignage de Michel Onfray, ci-dessous arbitrairement résumé (ce dont nous nous excusons) n’est pas sans rappeler les travaux du psychanalyste suisse Carl Gustav Jung. Celui-ci empruntait l’expression de « numineuse ». Il évoque ainsi l’émergence d’un surplus de vie mettant fin à un désordre biologique et émotionnel. En découle l’impression que la plus petite partie de vos molécules et jusqu’à votre corps tout entier se sentent concernés. La vie chasse la mort pour rendre plus vivant qu’à l’ordinaire. De fait la personne se perçoit comme « centrée », individuée. Elle sort d’un tumulte énergétique qui la remet plus en harmonie avec l’ordre cosmique extérieur, ce que Jung nomme « expérience d’individuation ». Se sentir plus entier pourrait impliquer que notre personnalité serait morcelée, en conflit d’opposition (« oxymore » dit Onfray) sans exprimer la moindre pathologie avérée.

Relevons fidèlement son témoignage : « Cet état physique et psychique est un état lumineux. Une qualité de lumière : un genre d’anti lumière pour être plus précis, ce n’est pas le clair ou l’obscur, la clarté ou les ténèbres, le jour ou la nuit, non car seul l’oxymore permet d’en rendre compte, c’est une obscure clarté. »

Michel Onfray pense avoir contracté le virus lors d’un voyage d’exploration en menant une enquête sur la guerre que conduit l’Arménie au Haut-Karabagh. Il dit encore : « Sur la ligne de front dans les tranchées, nous rencontrons une quinzaine de soldats qui échangent parfois des coups de feu avec les Azéris postés à 200 m. Dans les tranchées où nous sommes, ils nous montrent des photos de soldats qu’ils ont tués bien sûr, personne ne porte de masque... »
A son retour d’un séjour sans doute éprouvant, notamment pour ses défenses immunitaires, il ressent « une défaillance, un cauchemar qui débouche dans le corps et dans l’âme, le cœur et l’esprit, comme un torrent descendu de la montagne déborde de son lit puis ravage tout sur son passage. C’est une entrée un peu plus profonde dans le monde du Covid ».

Il lui vient une multitude d’images telles « le nématode » évoqué dans son livre « Cosmos », « un ver parasite qui prend possession de vos intestins » … « Fièvre, courbatures, migraines, angoisses de mort. » Ses nuits sont chaotiques. Il est « le champ de bataille du virus ». « Les yeux brûlent dès le réveil » … « Les courbatures écrasent le corps au matelas comme l’attraction universelle plaque au sol le moindre gramme de terre. Les migraines ne laissent aucune disponibilité intellectuelle. Le scanner de l’abdomen ne révèle aucune trace. »

Il rédige un texte, publié dans la revue « Front populaire », sans interruption en 4 h 30, que nous interprétons comme l’expression de cette pulsion de vie qui se déclenche après 500 h de luttes internes.

« Le jour s’est levé, la lumière inonde la ville de Caen. »

Ce témoignage évoque en nous analogiquement les expériences qualifiées de « numineuses » par Rudolph Otto (1869-1937) dans son ouvrage « Le Sacré » dont les fondements matérialistes sont pour l’instant invisibles, mettant en échec les tentatives de rationalisation des scientifiques. Ce terme de « numineux », repris par Jung pour appréhender la notion de « processus d’individuation » qualifierait par le ressenti l’unification fugitive de l’organisme. La « numinosité » de ce ressenti puiserait ses potentialités de la dimension quantique (Lothar Schafer, (1934 - juin 2020) jusqu’à l’identité psychologique unissant tous les composants du vivant. Après une telle expérience numineuse (que j’ai vécue) et que vous souhaiteriez peut-être vivre (selon mon témoignage) tant elle est fortifiante psychiquement et organiquement (sans virus cette fois), vous n’auriez pas besoin de vous regarder dans une glace pour savoir qui vous êtes. L’image de « sortir du sillon » illustre la sensation d’un changement de vie qui s’opère en vous. Il résulterait de forces de vie qui vous aident à dépasser un état délirant et dissocié et vous font vous sentir exister, renouvelant votre façon d’Etre, de Penser et d’Agir, le changement au niveau de l’Etre primant.

Nos investigations attendront que Michel Onfray en dise plus sur son expérience « lumineuse » avant de poursuivre sur cette voie.

Frédéric Paulus – CEVOI-E
Centre d’Etudes du Vivant de l’Océan Indien-Europe, le 15/12/20.

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