Billet philosophique
« Une identité réunionnaise solide, riche et partagée »
14 août 2020, par
Un événement exceptionnel sur la culture réunionnaise s’est produit le vendredi 7 août à Saint-Denis au Chateau Morange, organisé par Lunivèrsité Maron, qui existe depuis trois ans : Alexandrine Dijoux, universitaire et docteur en Sciences de l’Éducation, a présenté sa conférence sur le thème : ‘’Approches identitaires d’une Réunion multi, inter et transculturelle’’. Quelles leçons on va en tirer pour valoriser et faire respecter l’identité spécifique du peuple réunionnais ?
La conférence a commencé par la présentation d’Alexandrine Dijoux par Jean-Pascal Lauret, animateur de Lunivèrsité Maron, et de l’importance de ce thème car « un pays ne peut pas construire son avenir sans connaître l’identité de son peuple ». La conférencière a souligné de diverses façons les enjeux et les difficultés de ce combat car nous sommes confrontés à « la méconnaissance culturelle et les inégalités des identités », notamment à propos des « notions » qui font l’objet de « polémiques » comme ‘’nation’’, ‘’peuple’’, ‘’patrie’’, etc. alors que nous sommes « une multitude d’humains d’un même pays avec une culture collective ».
Alexandrine Dijoux a également insisté que la reconnaissance de l’identité du peuple réunionnais fait partie des « droits fondamentaux de l’être humain » selon l’UNESCO, une grande instance internationale, que ne respecte pas « le poids de l’assimilation », comme « l’ethnocide et la déculturation durant la colonisation, l’esclavage, l’engagisme avec la domination d’une culture ». Elle a aussi cité la résistance des victimes de cette politique coloniale, une résistance illustrée par le drapeau réunionnais, dessiné en 1975 par Guy Pignolet, présent dans la salle.
« La fraternité réunionnaise »
La conférencière a également parlé des « richesses de notre Histoire », qui a créé « le métissage culturel au cœur de l’identité créole réunionnaise », « La Ré-union culturelle, géographique et historique », et elle a conclu en exaltant « une identité réunionnaise solide, riche et partagée ».
Le débat a été aussi riche que l’exposé, avec de nombreuses personnalités culturelles, qui ont félicité et remercié Alexandrine Dijoux ; comme par exemple Luc-Laurent Salvador, qui a prôné « la fraternité réunionnaise, où l’on partage les mêmes valeurs humaines » ; citons aussi Paul Hoarau, qui a défendu « l’unité réunionnaise dans la diversité » et l’idée que « l’identité du peuple réunionnais continue à se construire par les Réunionnais ».
Kisa i komann nout péi ?
Ce combat face à l’assimilation et l’aliénation est mené notamment depuis 61 ans, date de la fondation du Parti Communiste Réunionnais par Paul Vergès, par de nombreux militants syndicaux, politiques et associatifs mais aussi par de nombreux artistes engagés pour valoriser et faire reconnaître « nout péi, nout nasyon, nout patri, nout istoir, nout lang kréol… ». On en a vu pas mal d’exemples à ce sujet dans le magnifique film de Sophie Louÿs intitulé ‘’Dann fon mon kèr’’ et diffusé par Réunion 1ère Télé ce mercredi 12 août, où de nombreux fonnkézèr (poètes) ont bien défendu les richesses de la culture réunionnaise, héritée de nout zansèt. Par exemple, Patrice Treuthardt (co-auteur avec Idriss Issop-Banian et Maximin Boyer du merveilleux chant ‘’Hymne pour La Réunion’’ sorti en CD en octobre 2017), Axel Gauvin (président de Lofis la lang kréol La Réunyon), Jack Beng-Thi, Bajou Bala, Christian Floyd Jalma, Carpanin Marimoutou, Anne Cheynet, Kaloune, Sully Andoche, Franky Lauret… (pardon pour les oublis !). Cela fait penser en conclusion à cette question : kisa i komann nout péi ? Voilà une des leçons qu’on peut tirer pour valoriser et faire respecter l’identité spécifique du peuple réunionnais…
Roger Orlu