
Politique du handicap outre-mer : faux départ et course de fond
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C’en est trope !
8 août 2013
Ça remonte à une quinzaine d’années.
Alex s’était mis à conduire à fond sur une route de campagne à bord d’une Durango 75, entouré de ses Droggies. Ils s’étaient préparés à passer une soirée, « une merveilleuse soirée », sous l’emprise de drogues, décidés à goûter du « piment de l’ultraviolence ». Ils forcèrent les portes d’une belle demeure blanche, bousculèrent l’écrivain qui l’occupait, F. Alexander, et sa femme. Alors, le chef du gang se mit à chanter “Singing in The Rain”, alors parodiant la chorégraphie de Gene Kelly, distribua en rythme coups de pied et coups de canne (le parapluie de Chantons sous la pluie) sur le corps du vieil homme bâillonné à terre et de sa femme. C’est à ce moment que la salle obscure parisienne devant laquelle était projeté le film de Kubrick s’est mis à retentir d’une franche rigolade. J’étais glacé. Je ne savais pas ce qui était le plus affreux : de la scène que nous imposait Stanley Kubrick ou de la réaction spontanée des spectateurs qui m’entouraient…
“Orange Mécanique” d’Anthony Burgess fut publié en 1962, l’année de la fin de la guerre d’Algérie, l’adaptation cinématographique a été réalisée 9 ans plus tard. La relation de la torture qui fut infligée à Henri Alleg est achevée en novembre 1957. En 1961, la torture était encore appliquée en France. « Si l’honneur de la France peut aller avec ces tortures, alors la France est un pays sans honneur », s’était exclamé l’historien Robert Bonnaud, également décédé cette année. « La France était autrefois le nom d’un pays, prenons garde qu’elle ne devienne le nom d’une névrose », renchérit Sartre en 61. Le Parlement français promulgua en 15 ans pas moins de 6 lois d’amnistie pour effacer les traces encombrantes de cette guerre innommée. Il s’agissait de ne pas regarder les traces de son propre passé. La dernière date de 1987 ! Si bien qu’à force de vouloir éviter son passé, en 2005, les députés se sont mis à fanfaronner sur l’aspect positif de la colonisation. On oublie vite en France parce qu’on ne sait pas voir. Les massacres coloniaux de l’Afrique noire, de l’Indochine, dans le Maghreb, le code de l’indigénat, les déportations. L’Oradour tunisien du 8 février 58, alors que les chasseurs-bombardiers français se levèrent pour rayer de la carte le village de Sakiet Sidi Youssef. Face à la proposition de loi, les ex-colonies ont fait front, l’Algérie en tête. Cette volonté d’effacement, cette amnésie officielle a pesé gravement sur la vie des banlieues, des Cités, sur les Harkis, les populations issues de l’immigration, elle a affecté durablement d’un lourd soupçon les relations entre Africains et Français.
L’essentiel du récit qu’a laissé Alleg se passe dans l’euphémistique « centre de tri du sous-secteur de la Bouzaréah » sur la place El-Biar, en banlieue d’Alger : une « usine à tortures », « une école de perversion pour les jeunes français ». Alleg était alors « l’ennemi » en 1957. Directeur de l’Alger républicain, ouvert à toutes les tendances de l’opinion démocratique algérienne, Claude Alleg voit l’interdiction de parution de son journal en septembre 55. Il se bat pour faire lever cette mesure, reconnue illégale par le tribunal administratif, mais les autorités s’opposent à sa reparution. Dès novembre 56 se multiplient les arrestations parmi la rédaction, le directeur est contraint de passer dans la clandestinité. Arrêté en juin 57, Alleg est séquestré 1 mois durant, sans procès, mis à la question. Jeté au cachot, « le placard » , rempli des cris de souffrances des autres détenus, la petite Gégène, la grosse, le supplice de la baignoire, le chantage aux proches, l’absence de nourriture qui pèse moins que la soif, le fil de laiton pour le suicide, drogué au penthotal… Les tremblements nerveux, nu, le froid du béton, la paillasse garnie de barbelés. Les paras, des barbouzes qui se targuent d’être la Gestapo, qui lui lancent : « Ce qu’on fait ici, on le fera en France. Ton Duclos et ton Mitterrand, on leur fera ce qu’on te fait, et ta putain de République, on la foutra en l’air aussi ! ». Des notations brèves, les réflexions qui montent brusquement : « L’organisme ne peut tenir indéfiniment : il arrive un moment où le cœur lâche ». Alleg a tu une vérité pour protéger ses proches, ce qui lui a permis, par contre coup, d’en dévoiler une autre, terrible, qui était dissimulée dans le but d’alerter l’opinion publique.
Un proverbe tzigane dit : « Si tu veux dire la vérité, assure-toi que tu as un bon cheval », mot qui fait avec humour de la Liberté une éternelle captive en fuite, qui court autour du monde dans les champs du mensonge des Nations — image du peuple tzigane, des Roms. Image de Snowden.
Mauriac écrivit à propos de La Question qu’il avait la sobriété et le ton neutre de l’histoire. Son « style nu, sa sécheresse de procès-verbal » , dénué de toute propagande, l’avaient haussé au rang des classiques. Un ami m’a affirmé que ce qu’il fallait tirer de ce livre, c’est qu’il était nécessaire d’écrire toujours comme si on était sous le coup d’une grave maladie, « alors on atteint à l’essentiel ».
Mais j’ai plutôt pensé à tous ceux qui, face à la gégène, au supplice de l’eau, du feu, du froid, de la mort ont craqué, à tous ceux qui ont fini par parler, à l’horreur de la vie qu’ils ont dû porter ensuite : traître aux yeux des autres, lâches à leurs propres yeux, finis, perdus, portant un fardeau plus lourd que leur propre vie... Alleg, lui, a pu se taire, il a pu endosser l’habit (mérité) du héros ; mais les autres, tous ces autres qui n’ont pas été à la hauteur invraisemblable de l’héroïsme échevelé qu’il fallait pour tenir tête à la souffrance physique et psychologique ? J’ai pensé à tous ceux qui n’ont pu écrire (et à ceux qui ne le savaient pas), à tous ces Damnés fabriqués par l’armée française, partout haïs, enfoncés dans l’exil qu’ils se sont imposés eux-mêmes et qui les sépareront à jamais d’eux-mêmes.
« Tahia El Djezaïr ! ».
Jean-Charles Angrand
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