
C’était un 30 juin
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30 janvier 2014
Des tranches cramoisies des livres de la Comtesse de Ségur dont, enfant, je sentais le creux des lignes du bout des doigts sur la peau de la page, à toute la famille de Christophe pressée en un désordre qui n’appartient qu’à lui (Le Sapeur Camember, Les Malices de Plick et Plock, La Famille Fenouillard, Le Savant Cosinus), les prix d’excellence oublieux de l’estrade se projettent au fond de ma mémoire en guirlande sur l’écran coloré d’une silhouette imposante que dessine la façade d’une « maison de campagne » aux murs couverts de lierre, bâtisse qui changeait de couleur selon les saisons, sorte que, jamais tout à fait la même, elle semblait vivre dans un double temps inscrit à la fois dans le cercle et dans la ligne.
Les bosquets de tulipes, les parterres de roses, l’allée de buis taillés au bout de laquelle stationnait la R16, les parfums, tout cela lui faisait face.
Secrètement, à la rude concavité des pierres répondait l’enfoncement que laissaient les caractères de plomb sur le duvet de la page. Les vieux albums, chargés de sensations d’une proximité familière qui venait qu’ils étaient souvent lus, les soirs silencieux sans télé, devant un feu de bois crépitant dans un large foyer, ils lui avaient emprunté quelque chose : peut-être avaient-ils pris place dans l’espace concentrique qu’inscrivait la présence du feu, chasseur de ténèbres, et il rassurait par sa palpitation originelle du crissement des pas sur le gravier, des grincement de l’escalier en colimaçon, du travail du parquet, de la solennité de la grande table, de la nuit sauvage qui au dehors, nous encerclait.
Non loin de la maison, s’érigeait le panneau indicateur qui donnait un nom à ce lieu, une enseigne vulgaire, brutalement contemporaine, alors que rien ne l’était dans ce paysage, certainement pas ce mur moussu et tendre devant lequel il se dressait : « PONCEAUX ». C’était non loin de Maintenon, où nous poussions côte à côte en vélo jusqu’à la silhouette du château et de l’aqueduc brisé. Que reste-t-il de ces années, si ce n’est l’étonnement de sentir combien s’ancre en nous les lieux, combien est prégnant le sentiment géographique des espaces perdus. Une clochette est accrochée à « notre » mur, l’ancien puits à manivelle y chante encore un refrain mélancolique et monotone ; notre mémoire est comme ces pages de ces anciens livres, l’impression s’y fait en creux.
J’aurais tant aimé que la vie ressemblât toujours à ces longues promenades que nous faisions dans les champs de maïs, parsemés de trouvailles : des fraises des bois sous les herbes hautes, l’affolement des perdrix, de la poule faisane, la plume de geai ramassée sur la boue séchée d’un chemin et gardée comme un trésor inestimable, la lecture naïve aussi d’un album de Christophe. C’était le chemin de Suzon, que jamais ne rencontra celui de Suzette.
En 1889, Christophe, autre face du très sérieux professeur Colomb, commence à publier en feuilleton Les Aventures de la famille Fenouillard, une facétie anti-coloniale.
En 1899, paraît l’Idée fixe du Savant Cosinus, qui est la critique de l’enfermement du spécialiste dans ses propres travaux ; il vient s’inscrire sur l’autre versant de la Famille Fenouillard, qui était la critique de la fuite en avant et de la conquête extérieure.
1896 voit le jour Le Sapeur Camember, une facétie antimilitariste qui complète La Famille Fenouillard.
Le travail sur la langue et la logique du langage (lapalissades, exégèse des lieux communs, jeu sens propre/figuré, jeu des références bibliques ou mythologiques, les métaphores y font des victimes, et la grammaire s’enfuit en courant), y sont si important qu’il est difficilement accessible à un enfant qui lui préfère les autres albums. Christophe y fustige l’armée, qui a montré une piètre image d’elle-même à l’occasion de la défaite de Sedan, et tout au long de la guerre de 1870, refuge de crétins, de oisifs dont la plus grande bataille livrée et la plus belle victoire sera celle contre les puces. L’adjudant-major interpelle le sergent Bitur et lui intime d’enlever le tas de feuilles mortes de la cour, le sergent fait venir le sapeur Camember pour lui intimer l’ordre d’enlever le tas. Comment ? Il se gratte la tête et creuse un trou pour y mettre les feuilles. Et la terre du trou ? Il creuse un 2ème trou pour y mettre la terre du 1er. Et la terre du 2ème trou ? Le sapeur s’en ouvre au sergent : « Triple andouille, m’ferez quatre jours pour n’avoir pas creusé le deuxième trou pas assez grand pour pouvoir y mettre sa terre avec celle du premier trou ! »
La malice de Plick et Plock se retourna contre leurs auteurs qui finirent professeurs de moral, le sapeur Camember allait-il devenir professeur de sagesse ? Au terme de ses facéties, il se marie, non seulement il prolonge mais multiplie la bêtise qui lui est attachée – une bêtise souvent héroïque certes, mais toujours bête à manger du foin. La facétie ici ne se résout que dans le rire – c’est un des secrets de son existence.
Dans la maison de campagne de ma grand-mère professeur de philo, il y avait toute une littérature enfantine, morale mais aérienne. Précieuse, non pour éviter de tomber dans les pièges -finalement, on tombe toujours-, mais pour mieux s’en relever, s’en relever plus facilement.
Jean-Charles Angrand
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