À propos de la statue de Mahé de La Bourdonnais

29 juin 2023, par Reynolds Michel

De quoi s’agit-il au juste ? D’un simple déplacement d’une statue en vue de transformer un "espace moche" en un espace convivial, d’une dispute entre les historiens, entre les identitaires et les universalistes, entre les amoureux des arts et les iconoclastes, voire une querelle entre deux clans politiques.

Bref, entre celles et ceux qui, au nom de l’Histoire, privilégient à tout prix l’explication au déboulonnage et ceux et celles qui estiment qu’il convient parfois de déplacer ou de déboulonner les statues des héros coloniaux qui ravivent les blessures historiques d’un passé douloureux (l’esclavage par exemple). 

Ou plus fondamentalement, s’agit-il d’une question de reconnaissance aux victimes de l’esclavage et à leurs descendants, de justice mémorielle et spatiale, voire de réparation ? De trop nombreuses personnes gardent encore la mémoire de ce « passé qui ne passe pas »

Pour aller plus loin dans la réflexion, je vous invite à regarder de près le schéma qui, selon Anne Lafont, préside à la contestation de la présence de certaines statues dans l’espace public

« En voici les étapes principales :

- la présence de signes consensuels, plus ou moins démagnétisés dans l’espace public ;
- la discorde causée par la perception d’une partie de la population de leur pouvoir d’humiliation ;
- la remise en cause de l’exposition publique d’une effigie, au nom d’un conflit d’interprétation et parfois de génération ;
- la réponse politique par le retrait du monument contesté et/ou sa réhabilitation pédagogique permettant son maintien en place – souvent doublé d’une explication (un cartel) –, ou encore son déplacement dans un cadre institutionnel neutralisant la charge symbolique contestée, à l’instar d’un musée
. »

Anne Lafont, spécialiste en histoire de l’art. cf. revue ESPRIT, mai 2022

Excellente journée à toutes et à tous

Reynolds


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Messages

  • L’histoire honore ceux qui l’ont construite par leur actes et leurs pensées en baptisant les rues et les places publiques de leur noms et en installant leurs statues là où elles pourront être vues par le plus grand nombre de citoyens des générations présentes et futures .

    Nous pouvons contester leurs actes et leurs pensées parce qu’ils ne correspondent plus à nos principes et à nos valeurs mais nous devons respecter l’honneur qui leur a été fait par nos anciens .

    A l’époque de La bourdonnais , la société était esclavagiste , l’esclavage était en dehors de la France originelle un statut social organisé et codifié par ceux qui détenaient et exerçaient le pouvoir. Et en qualité de gouverneur de la jeune colonie de l’île bourbon Mahé de La Bourdonnais a probablement fait ce qu’il devait faire pour faire pour que cette petite colonie d’à peine 3000 âmes dont il avait la responsabilité , fonctionne bien et prospère rapidement .
    Cependant , comme la prospérité des colonies était basée sur l’esclavage on ne peut pas lui reprocher de l’avoir fait progresser en augmentant le nombre des esclaves et en luttant contre le marronage .S’il a possédé des esclaves c’était probablement en toute légalité comme tous les hommes libres de son époque et certainement en respectant le droit de ses esclaves , ce que lui imposait sa charge de gouverneur qui devait avoir une attitude irréprochable aux yeux de tous .

    Son travail a été apprécié par ses supérieurs et il a été récompensé en ayant des responsabilités plus importantes ailleurs, au point de devenir l’un des personnages le plus importants de la compagnie des indes .

    Aujourd’hui l’esclavage est considéré comme un crime contre l’humanité , mais à l’époque de La Bourdonnais les propriétaires d’esclaves n’étaient pas tous des criminels .
    Déboulonner la statue de La Bourdonnais c’est refuser l’honneur qui lui a été fait par nos anciens et le considérer comme un criminel . Il nous faut sans doute honorer tous ceux qui ont lutté contre l’esclavage et qui ont apporté leur contribution à son abolition et ont permis à notre société de progresser avec des valeurs différentes .Ils ont aussi leur place dans nos rues et dans nos places publiques . Mais nous avons aussi une obligation de respect pour ceux qui ont accompli leurs devoirs sur des valeurs fondamentales différentes des nôtres aujourd’hui .
    Napoléon a rétabli l’esclavage 6 ans après son abolition par les révolutionnaires qui se sont s’appuyés sur les grands principes d’égalité de liberté et de fraternité prônés par la déclaration des droits de l’hommes et du citoyen de 1789, mais personne en France n’a demandé à ce jour de déboulonner ses statues .
    On peut peut être corriger l’histoire quand elle est fausse pour rétablir la vérité , mais on ne peut pas la refaire parce que sa réalité et sa vérité ne nous plaisent pas .
    Si nous devons changer de place la statue de La Bourdonnais ,il nous faut respecter l’honneur qui lui a été fait par nos anciens et l’installer ailleurs que dans la cour de la caserne Lambert où personne ne le verra , sous prétexte qu’il a été un chef militaire qui a gagné des batailles navales pour la France .

    Pourquoi pas l’installer dans le jardin de l’Etat ou dans le nouvel espace public qui doit être aménagé au centre de Saint Denis ,rue maréchal Leclerc .
    Mais personnellement je pense que cette statue est très bien placée là ou elle est , devant la préfecture où se rassemblent souvent ceux qui veulent faire avancer notre île dans l’intérêt de tous .
    Après tout , c’est ce qu’a fait La Bourdonnais lorsqu’il agissait en qualité de gouverneur de l’île Bourbon , devenue plus tard l’ile de la Réunion , une île qui réunit des humains venus du monde entier souvent comme esclaves , mais qui vivent maintenant tous ,libres, égaux et fraternels sous la bannière de la France . Esclavagiste ou pas , La Bourdonnais a vécu avec les valeurs de son époque et a fait progresser la colonie dont il a assumé les fonctions de gouverneur .

    Si l’esclavage existe encore par ce qu’il se nourrit de la misère et de nos faiblesses, et c’est surtout dans nos coeurs et nos esprits qu’il est enraciné .
    C’est de là qu’il nous faut le déboulonner .


Témoignages - 80e année


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