À propos du communiqué du PCR sur le recrutement des enseignants

1er septembre 2006

En mettant en regard les 30% de chômeurs réunionnais et les 850 fonctionnaires (“Témoignages” du 21 août) mutés dans l’île depuis la Métropole, le PCR ne laisse-t-il entendre, ou ne risque-t-il pas de faire entendre, que ce sont les enseignants zorey qui sont responsables du chômage dans le département ?... raisonnement simpliste et surtout très dangereux : qu’on le veuille ou non, on laisse ainsi penser que n’importe quel chômeur peut remplacer n’importe quel enseignant. Sans doute, le communiqué du PCR ne dit pas cela, mais pour un esprit pressé (pourquoi n’en y aurait-il pas à La Réunion, comme il en existe partout ailleurs ?), cela risque de vouloir dire : "850 enseignants arrivés en 2006 depuis la Métropole, ce sont 850 chômeurs réunionnais en plus"... On imagine facilement les ravages que cela peut faire, et que cela a fait, en d’autres temps, sous d’autres cieux, et avec d’autres catégories, disons, "ethniques".
En même temps, dire "que l’on fait appel maintenant à des jeunes fonctionnaires au détriment des jeunes Réunionnais", c’est aussi remettre en cause le principe du recrutement des enseignants (au moins du secondaire) par un concours national. S’ils étaient recrutés localement (on imagine mal que ce soit autrement que par concours, sinon quelles dérives !), ouvrirait-on ce concours aux Métropolitains tentés par le soleil des tropiques ? Mais que se passerait-il s’il y avait sur-représentation des Métropolitains par rapport aux Réunionnais admis ? Faudrait-il alors établir des quotas, autrement dit faire de la ségrégation positive ? Pourquoi pas ? Rien n’est tabou. Mais on imagine rapidement à quelles difficultés on se heurterait alors (difficultés que n’ont pas les pays qui, comme les États-Unis ou l’Inde par exemple, pratiquent cela, tant il est vrai, que, chacune en son genre, leur société n’a rien à voir avec la société réunionnaise) : dans quelle catégorie mettrait-on les Réunionnais de France qui sont partis là-bas pour trouver du travail, puis ceux de la deuxième, voire de la troisième génération ? Dans quelle catégorie mettrait-on les enfants des couples mixtes qui vivent en Métropole ? Imaginons toutefois, avec beaucoup d’optimisme, ces problèmes harmonieusement résolus. Il est plus que probable que, au moins dans certaines disciplines, le recrutement local ne suffise pas pour faire face aux besoins. Il faudrait donc faire temporairement appel à des fonctionnaires métropolitains, avec un contrat limité dans le temps, comme cela se fait par exemple à Rodrigues, partie intégrante de la République de Maurice mais dotée d’un statut d’autonomie. On peut aussi imaginer un système qui s’apparente plus ou moins à celui du recrutement des enseignants dans les TOM et à Mayotte. Mais du coup, on voit que, quel que soit le cas de figure, l’on ne ferait pas l’économie d’une évolution du statut de La Réunion, ce qui, de mon point de vue, n’a rien de choquant.
Encore faudrait-il le dire clairement d’emblée et l’assumer ensuite.
Exiger, comme le fait le PCR, un recrutement d’enseignants à la mesure des besoins de La Réunion est pourtant une urgente nécessité. Point n’est besoin, me semble-t-il, de l’assortir de propos qui, non seulement en limitent la force, mais risquent de se métamorphoser en une véritable boite de Pandore.

Jean-François Clopeau,
Saint-Pardoux
(79)

Parti communiste réunionnais PCR

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