Quand Thomas Pesquet retrouve sur notre planète Terre la gravité — Nouveaux regards sur la pulsion

22 mai, par Frédéric Paulus

En revenant sur terre, l’astronaute français Thomas Pesquet s’aperçoit que la physiologie de son organisme s’est modifiée dans le contexte d’impesanteur de la station spatiale naviguant à 300 kilomètres dans l’atmosphère terrestre. Dans son ouvrage « Ma vie sans gravité » (2023), il partage ses constatations dès son retour « à la vraie vie », de terrien. Il aura auparavant une appréhension, encore dans sa capsule : « Sans avoir connu mon propre poids pendant six mois, la sensation risque d’être décuplée », écrit-il juste avant d’atterrir.

Ainsi, son retour sur terre va nous renseigner cliniquement et déductivement « scientifiquement » sur la réalité de nos habitus de terriens confrontés, sans que nous en ayons conscience, aux forces de la gravité terrestre SUR NOS ORGANISMES. Ce que nous allons découvrir de notre adaptation à l’univers terrestre était impensable avant ce précieux témoignage qui pour nous a valeur de preuve.
Déjà dès son atterrissage au Kazakhstan il confie : « Je redécouvre mon poids, qui m’écrase sur mon côté gauche où penchait la capsule » ainsi déposée à terre.
Voici quelques éléments d’information significatifs qui nous aideront à évoquer la réalité de la pulsion lorsque celle-ci est sollicitée « a minima » dans un contexte d’impesanteur : « On m’a prévenu, je suis supposé avoir perdu un peu de masse musculaire, en dépit des heures de sport de gestes anodins »… « Le retour à la pesanteur. Tout va me sembler très lourd y compris moi. J’ai l’impression que ma tête va me faire chavirer, et que je ne parviendrai jamais à la redresser »…, « J’ai du mal à m’exprimer, ma mâchoire est un peu lourde »…, « J’ai un mal de chien à tenir mon portable, il pèse 1 tonne »…, « J’ai envie de vomir à plusieurs reprises »…
Thomas Pesquet mentionne encore qu’il a du mal à déglutir et est souvent sujet à des vomissements. « Le cœur s’est adapté en impesanteur : il s’est résolu à envoyer moins de sang dans le cerveau », « Je me tiens immobile ça va, je tente de rester digne mais les secondes sont des heures », pp. 280 à 292.

On l’informe qu’il mettra 6 mois pour se « libérer » de sa « décohérence » physiologique adaptative en milieu d’impesanteur pour retrouver ses points de repères et sa physiologie normale. Nous savions que la physiologie était « plastique » nous en avons la preuve. Mieux que cette « décohérence » les physiciens en physique quantique évoqueraient une « décohérence quantique »
Pesquet ayant récupéré, semble-t-il, ses caractéristiques physiques et psychologiques humaines au point de ne pas exclure un nouveau séjour dans l’espace, nous pourrions dire avec le Professeur Henri Laborit (1914-1995) que son « information structure » d’humain bipède a été mise à l’épreuve d’un test d’inhibition de l’action d’une durée de 180 jours dans un environnement d’impesanteur modifiant ses rythmes physiologiques ou une décohérence physiologique, voire quantique comme nous le suggérerons plus tard ? En d’autres termes, son habitus de terrien fut provisoirement et expérimentalement soumis à des contraintes qui mettent en évidence l’adaptation des organismes humains à la gravitation sur le sol terrestre lorsque celle-ci est grandement réduite. L’on peut en déduire que la fonction organiquement différenciatrice de la pulsion nous aura permis de nous singulariser d’Homo erectus en Homo sapiens : cette mise en évidence de manière formelle devrait être scientifiquement acceptée et les travaux d’Henri Laborit considérablement renforcés.

Dès lors nous devrions reconsidérer les travaux des conséquences de l’inhibition de l’action réalisés sur des rats de laboratoire par le Professeur Laborit, amplement validés du fait des conditions d’inhibition qui touchèrent les cosmonautes expérimentalement pourrait-on dire durant 6 mois. Je rappelle que les travaux de Laborit auront été quasiment ignorés de la grande communauté des neuroscientifiques. Si, par exemple, l’INSERM (Institut National de la Recherche Médicale) récompense ses chercheurs par le prix « Impulsion », il s’avère être plus circonspect quant à l’usage du terme pulsion et à ses diverses inhibitions chez nous humains !
Le Professeur Henri Laborit, après une carrière de chirurgien militaire, s’est reconverti en chercheur en neurobiologie. Pour lui, le vivant est animé par le principe « d’instinct-pulsion » qui se traduit en comportements : boire, manger, copuler, rechercher du plaisir, fuir ou lutter en cas d’agression. Suite à ses recommandations, je lui avais suggéré de rajouter le comportement de « dormir ». Indirectement, les rêves auront été occultés par le Professeur (n’étant pas sa spécialité). Il qualifiait les travaux des psychanalystes de « trouvailles indiscutables ». En voici la référence : « Peut-être restez-vous encore un peu trop influencé par la psychanalyse ? Celle-ci, dans l’observation des faits, avance des trouvailles indiscutables mais, dans leur interprétation, reste d’un romantisme désolant »…, lettre du 18/02/1986, Laboratoire d’Eutonologie, Hôpital Boucicaut.
Voir le lien : https://www.zinfos974.com/impasses-et-aveuglements-de-la-biologie-humaine-conventionnelle/
Nous avons, quant à nous, apprécié la rigueur et la scientificité de ses travaux et suivi ses recommandations pour une approche plus rigoureuse du sommeil. C’est ce qui nous aura conduit inévitablement à approfondir la réalité des rêves, Paulus Université de Paris 7, thèse de doctorat en psychologie (2000).
Aujourd’hui nous faisons remarquer que l’expérience du sommeil s’effectue dans un contexte cérébral immergé dans le LCR (liquide céphalo-rachidien) encapsulé par les trois membranes des méninges, permettant au cerveau de fonctionner dans une sorte de SAS en position couchée pour réduire la gravitation et aux différents rythmes cérébraux de réaliser leurs différentes fonctions lors du sommeil. (Notons aussi que le bébé de mammifères est conçu dans un utérus dont le liquide amniotique sert également de « sas » pour l’embryon en gestation, l’isolant ainsi de la gravitation. Génial, le vivant !)
Sur ce thème de l’exploration du sommeil nous avons récemment eu l’avantage de profiter des travaux du Professeur Thomas Walker, « Pourquoi nous dormons » (2017), bien que celui-ci n’ait pas suffisamment tenu compte de cet espace réduisant l’impact de la gravité sur nos organismes lors du sommeil. Le sommeil des cosmonautes est en cours d’étude, le résultat de ces études attendu.
Nous mentionnerons le psychanalyste Carl Gustav Jung (1875-1961). Il continue à retenir toute notre attention concernant son approche des rêves, bien que le rêveur soit plus à même de les auto-analyser.
Ultérieurement, nous devrons tenir compte des apports des physiciens, plus particulièrement Lee Smolin chercheur en physique théorique à l’institut Merimeter de Toronto et de son collègue italien Carlo Rovelli Professeur de classe exceptionnelle à l’université d’Aix-Marseille, du fait de leur approche des conséquences de l’intégration de la force gravitationnelle sur les organismes lorsque le premier dit par exemple : « La plupart d’entre nous nous accommodons de notre inaptitude à voler ».

Lee Smolin et Carlo Rovelli réintroduisent Le TEMPS dans leur cosmologie. Les sciences du vivant chez l’humain ne cessent d’être évoquées, même si maints chercheurs conventionnels se seraient coupés du vivant biologique en tentant de le rationaliser avec les mathématiques : « Nombreux sont ceux qui sont convaincus que le futur est totalement déterminé par le présent », écrit Smolin chapitre 5 en déplorant le cloisonnement des sciences tout autant que « l’éradication de la surprise et de la nouveauté » en cosmologie, p. 99, in « La renaissance du temps, Pour en finir avec la crise de la physique », Dunod — Poche (2014).
Notons que la notion de « décohérence quantique ou d’effondrement de la fonction d’onde » par exemple figure dans le dernier ouvrage de vulgarisation de Lee Smolin, in : « La révolution inachevée d’Einstein, Au-delà du quantique », Poche Dunod, (2023).
Cette introduction annonce notre ambition d’intégrer ce nouveau regard sur la pulsion dans un ensemble plus vaste incluant, si possible, certains aspects des travaux en évolution cosmologique et physique quantique dont ceux de Carlo Rovelli (Italie — France) et Lee Smolin (USA).

Frédéric Paulus
Président du CEVE
Centre d’Etudes du Vivant Europe

A la Une de l’actu

Signaler un contenu

Un message, un commentaire ?