Ramadan nous dit combien notre temps est précieux

12 mars, par Youssouf Omarjee

Oui, il est revenu ce temps de la récolte des semences spirituelles pour les musulmans de par le monde dans un contexte de conflit exacerbé qui relègue une partie de l’Humanité dans les ténèbres de la souffrance, du mépris et de l’oubli.

Oui, aussi impuissantes que puissent paraître nos paroles, mots et gestes de soutien, il n’en demeure pas moins que nos pensées sont bouleversantes autant par la sidération de la tragédie du 7 octobre 2023, que par l’insistance du pilonnage continu qui n’a cessé depuis. Et, au motif que les commanditaires du Hamas sont impunis ou hors de portée, bien au chaud, dans les pétromonarchies avoisinantes, les opérations d’anéantissement, loin de faiblir, s’intensifient.

Oui, le blocus de l’information empêche une couverture médiatique digne de ce nom de s’exercer en toute neutralité, tandis que toutes les ONG sont unanimes quant au fait que l’asphyxie de millions d’êtres humains, principalement des jeunes et des femmes, s’accomplit à petit feu, lentement, mais sûrement, si ce n’est sous l’effet des bombes, ce sera la famine (ou la conjugaison malsaine des deux) qui viendra à bout de la population dont, on nous dit, qu’elle serait habitée par la haine viscérale des juifs.

Oui, Ramadan commence, et, des milliers de personnes ont déjà péri de la folie meurtrière des hommes en vert, des militaires, de part et d’autre, qui n’ont ni foi, ni loi, ni Dieu, ni Maître, qui sont sans état d’âmes face à la barbarie, des bataillons entiers fanatisés par l’obsession aveugle et jouissive des canons. Une barbarie commise, d’abord par les uns, au nom de l’oppression exacerbée et insoutenable d’une colonisation rampante. Barbarie à laquelle a succédé, ensuite, une opération continue de nettoyage ethnique méticuleuse et sans relâche.

De ce terrain de confrontation permanent depuis le 14 mai 1948, jusqu’à nos jours, d’année en année, la surenchère se manifeste et les populations déjà matraquées sur le terrain, ne cessent de reculer sur des pans entiers de territoire qui se réduisent comme peau de chagrin, et, elles sont de plus en plus confinées dans le silence général, sans grand embarras, abandonnées à leur triste sort, punies par le déroulement chaotique d’une Histoire dramatique captive du langage des armes, étrangère aux larmes, et, insondable par la diplomatie. Ainsi, seule une géopolitique dont la lecture serait inscrite dans une vision eschatologique du monde est à même de nous rassurer quant à ce qui adviendra avec l’avènement de Jésus (Que la Paix de Dieu soit sur Lui).

Nonobstant, les seules voix qui, aujourd’hui, osent encore défendre le principe d’un cessez-le-feu, les seules personnalités qui prennent la parole pour demander que triomphe l’esprit de justice, les célébrités qui apportent ouvertement leur soutien à la cause palestinienne sont toutes bannies, tandis que beaucoup de personnes ont été ostracisées pour avoir dit ce qu’elles pensaient, pour avoir porté à la connaissance du plus grand nombre, la révolte qui habite les cœurs de beaucoup de personnes silencieuses, mais éveillées et conscientes.

Alors, oui, nous sommes aux portes de Ramadan, encore vivants et prêts à vivre des moments d’intense spiritualité, tandis que d’autres ont franchi le seuil de la mort en l’espace d’une année, des personnalités que nous connaissions dans l’intimité de nos familles comme Tonton Tiota Affejee (Saint-Joseph), Tonton Issop Omarjee (Saint-Paul), et, tout récemment encore, le patriarche des commerçants de Saint-Pierre, Tonton Houssein Omarjee (presqu’un an après le décès de son épouse, notre tante), qui étaient autant de vénérables de la communauté musulmane de La Réunion.

Des personnes qui ont fait notre Histoire, qu’elles aient entrepris et livré de précieuses leçons, ou, qu’elles aient été porteuses d’un courage remarquable face à l’adversité de la vie. Elles étaient toutes des points de repères dans un monde qui en manque cruellement. Des êtres dont la société retiendra l’apparent de leur existence, mais, dont les habitués entretiendront des souvenirs particuliers et propres à eux seuls, des secrets et des confidences.

Tous ces évènements, au loin, comme au plus près de nous, décrivent que notre temps de vie est compté, qu’il convient de se départir du poison de la conflictualité, dans toutes les sphères, (amis, famille, bureau, syndicats, entreprises, associations) qui entrave la bonne marche de nos relations sociales, notre estime de soi et notre confiance en soi, un poison qui est pire que l’adversité à laquelle nous sommes confrontés (et que nous subissons indépendamment de notre volonté).

La vie, la spiritualité, le Divin nous convoquent, en permanence, à l’entente, au respect et à l’estime réciproques, au dialogue sans langue de bois ni fard, à la douceur de l’humilité, à refuser les manœuvres subversives et les sournoises et sordides compromissions afin que nous soyons purs de la souillure de l’indigence. Notre linceul nous attend, il nous appelle, sans cesse, mais, le drame est qu’on ignore le jour où nous réaliserons que nous n’avons été que des voyageurs étrangers au royaume des illusions. Ramadan est tout à la fois un rythme et le mois du dépassement de soi, qui nous rappelle, qu’un jour, les aiguilles de l’Horloge cesseront leur course folle dans l’espace-temps. Bon Ramadan à toutes et tous !

Youssouf Omarjee

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