Connais-toi, toi-même

13 juin 2006

C’est la célèbre formule, venue de la Grèce antique, inscrite sur le temple de Delphes, sous cette forme : "Connais-toi toi-même, laisse le monde aux Dieux". Socrate l’aurait reprise à sa façon : "Connais-toi toi-même, et tu connaîtras l’Univers et les Dieux", s’affranchissant ainsi de l’emprise des dieux. Phrase-clé qui fait de lui l’un des pères fondateurs de la philosophie et l’un des initiateurs de ce qu’on appelle aujourd’hui les sciences humaines. Et finalement, c’est la première proposition qui a été universellement retenue : "Connais-toi toi-même", - plus souvent citée que réellement comprise.
Toute la difficulté ne viendrait-elle pas de l’ambiguïté contenue dans le verbe “connaître” ? Et d’abord, qu’est-ce que “se connaître”, quand nous savons que notre pensée varie au gré des circonstances, selon les événements et la manière de les vivre ? Nul philosophe ne l’a si bien senti qu’Alain, lui qui se méfiait par ailleurs de l’engouement porté à la psychologie et bientôt à la psychanalyse. À chaque fois, il veut nous mettre en garde contre un mauvais usage de l’introspection, ce "rabâchage sur soi-même", qui fabrique des "Malades Imaginaires", "qui se découvrent toujours quelque petit mal qu’ils augmentent par l’attention" et, selon sa propre expression, des "Malheureux Imaginaires", "qui réussissent encore bien mieux à tomber dans la mélancolie". Car, ose-t-il affirmer "rien de notre pensée ne se laisse contempler sans tristesse, même le bonheur". Pour lui donc "il ne s’agit jamais d’observer ce qui est dans la pensée, mais d’ordonner la pensée selon ce qui est dans les choses ; donc il ne faut pas prendre les états d’âme comme tels ; il faut les faire et les refaire. Ou bien agir ou bien dormir".

Georges Benne


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