De Babel à la Pentecôte

6 juin 2006

Fête de l’Alliance et du don de la Loi au Sinaï pour les juifs, la Pentecôte est pour les chrétiens la fête du don de l’Esprit. Elle célèbre la diversité des langues, des cultures, des religions, révélant ainsi la richesse d’une humanité capable de créativité et d’inventivité. Et une diversité qui ne se vit pas au détriment de la communion, de l’unité, de l’universalité. Tel est le message de Pentecôte. "Ces hommes qui parlent, ne sont-ils pas tous Galiléens ? Comment se fait-il alors que chacun de nous les entende dans sa langue maternelle. Parthes, Mèdes et Elamites, habitants de Mésopotamie, de Judée et de la Cappadoce" (Actes, 2, 7-9).
Le trouble de la foule vient du fait que chacun entend exprimer, dans sa propre langue, des paroles qui lui sont directement accessibles. La foule a donc accès à une parole unique. L’unité est ici associée à l’expression de la diversité. La Pentecôte, c’est “l’unidiversité”, pour reprendre une belle expression de Saint-François de Sales.
Pour nous aider à bien saisir le message de Pentecôte, Luc, l’auteur du récit des Actes des Apôtres, évoque, entre autres, l’épisode de la tour de Babel (Genèse 11,1-9). Vous vous souvenez, sans doute, de ce célèbre récit du corpus biblique, figure majeure de l’interprétation des rapports entre universalisme et particularisme. Nous pouvons la raconter comme une pièce en deux actes : Acte 1, tous les hommes parlaient la même langue et utilisaient les mêmes mots. Ils décident d’entreprendre une grande œuvre pour se faire un nom : la construction d’une tour dont la cime touchera les cieux. Acte 2, Dieu intervient pour mettre le holà : Il les disperse à la surface de la terre et brouille leurs langues. Désormais, les hommes ne se comprendront plus...
Quel est le sens de ce texte ? Un acte divin destiné à punir les hommes de leurs folles prétentions universalistes ? Ou, à l’inverse, en suivant Saint-Augustin, interpréter la dispersion des nations comme une dissémination libératrice permettant d’échapper au despotisme de l’Un, au dictature de la pensée unique et du projet totalitaire ? Pour éviter de faire un procès d’intention à Dieu, nous optons pour la seconde piste : la dispersion comme l’apprentissage de la diversité - pour nous dire que la véritable unité se trouve dans la diversité.
Le récit de Luc s’inscrit bien dans cette ligne : à Babel, l’humanité apprend la diversité, à la Pentecôte, elle apprend la "diversité dans l’unité". Babel et Pentecôte nous appellent au respect des spécificités et des diversités sous le signe de valeurs universelles.
Pour les chrétiens, la Pentecôte est une invitation à croire en un Dieu qui est souffle et qui souffle où il veut ; un Dieu qui nous donne du souffle, en nous permettant d’aspirer au meilleur de la vie et de nous-mêmes, tout en nous invitant à travailler à un monde de reconnaissance mutuelle, de justice et de paix.

Reynolds Michel


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