De qui se moque-t-on… depuis 50 ans (1963-2013) ?

18 juillet 2013

Votre cri du cœur lancé dans le courrier des lecteurs du “JIR” ce mardi 16 juillet 2013 ne m’a pas laissé indifférent. Vous nous apostrophez avec un « de qui se moque-t-on ? » que je vous emprunterai.

Oui « FP », comme vous, je ne me réjouis pas de voir le temps perdu en procédures administratives et en contestations diverses alors qu’il faut relancer l’économie et régler ce vieux problème de circulation.

Condamné au cachot par les Réunionnais, le gouverneur Vauboulon continu à hanter la route

Souvenons-nous en, le problème s’est posé dès 1690 lorsque le gouverneur Vauboulon tentait de relier Saint-Paul à Saint-Denis par un premier sentier littoral. Car déjà au vu des dangers en pied de falaise, ses successeurs s’en étaient aussitôt éloignés :

- en haut de falaise avec le chemin (dit des Anglais) pavé par Boisson et Muron en 1730,

- puis en 1854 par la route de la Montagne sous Hubert-Delisle,

- on tentera la corniche, mais à flanc de falaise en 1876 avec le sentier Laugier (2 mètres de large),

- et enfin, en tunnel pour le chemin de fer en 1882.

Dès l’après-guerre en 1946 et 1954, le Conseil général programmait l’ère du « tout voiture » avec l’ouverture « rapide » de la première « route du littoral » en 1963 et la condamnation par étapes du « ti-train », devenue définitive en 1967.

Il a fallu dix ans ; les procédures sont tout aussi longues qu’aujourd’hui ! On a feint alors déjà en 1953 de proposer à l’île un « choix » entre trois scénarios :

1. L’amélioration de la route de la Montagne,

2. Une nouvelle route à créer en crête (idée inspirée initialement en 1950 par Emile Hugot),

3. Une « route de la corniche » à tracer en pied de falaise dans l’esprit de Vauboulon.

Le projet le moins cher est déclaré d’utilité publique en 1955. La Réunion a mis dès lors la main dans l’engrenage d’un ouvrage que l’on dit « monstre » tant il génère sa propre croissance et sans fin !

La NRL : « mutante diabolique » de la première route en corniche

Aujourd’hui, le chemin Vauboulon déjà « maudit » en pied de falaise a fait naître sa fille « la route en corniche » en 2 voies puis sa petite-fille « la route du littorale » en 4 voies et veut nous entraîner maintenant avec son arrière-petite-fille « la route en mer » à 6 voies, voire 5 voies !

Alors, oui, « FP » , encore une fois, une procédure d’une décennie voudrait nous condamner au pire…

Cette route n’est pas nouvelle, elle est « la mutante diabolique » de la route en corniche, enfantée par l’ère du tout-automobile et du pétrole. Alors que les 33 km de la route des Tamarins envisagée en l’an 2000 à 600 millions d’euros a dérapé en dix ans à 1 milliard d’euros (soit 30 millions d’euros/km : ce n’est pas rien), la NRL est promise à 1,6 milliard d’euros pour seulement 12 km (soit 133 millions d’euros/km). Le kilomètre de route en mer nous est vendu 100 millions d’euros plus cher que sur terre ! Et tout ça pour une route dont la moitié en viaduc n’est plus qu’en 5 voies, sans TCSP et en détruisant la précédente route déjà aussi la plus chère du monde !

Et puis, pensez-vous vraiment que le coût d’entretien d’une route en mer diminuera lorsque l’on offre en sacrifice à la houle toujours plus de digues et d’enrochements pour se protéger ?

Les quelques sondages géotechniques initiaux ne seront validés que partiellement pour les 200 pieux de 4 mètres de diamètre. Alors, avant que les entreprises du CAC 40 ne nous imposent les surcoûts de fondation sous-marine que nous paierons sans l’aide de l’Europe ou de l’Etat, il faut mettre un point final à cette folie. Il faut le faire avant que ce soit le dépassement du « pire risque » centennal qui le fasse avec la survenance toujours possible du risque bi-centennal. Car nous ne serions plus en mesure de faire face à une reconstruction avec nos propres moyens tandis que le CD41 ne pourrait pas supporter les 50 à 60.000/jour pendant 7 ans à La Montagne.

Fukushima est là : le risque centennal envisagé a été dépassé et le Japon ne peut y faire face !

Avec 130 millions d’euros par km de route, on peut en trouver des tracés terrestres

Avec moins de 130 millions d’euros par km de route, un tracé terrestre est possible et créera plus d’emplois que les seuls 2.500 prétendus. Alors que le milliard d’euros de la route des Tamarins a permis de former 3.000 personnes, celles-ci ne retrouveraient pas toutes aujourd’hui un poste malgré les 1,6 milliard d’euros de la NRL ! Nos entreprises et nos familles seront plus nombreuses à trouver du travail avec un autre projet, mais terrestre cette fois.

Avec moins de 130 millions d’euros par km de route, il existe des tracés terrestres qui détruiront moins notre île et son littoral, notre héritage !

Comme vous, cher « FP » , je suis soucieux de la sécurité de nos concitoyens réunionnais et je combats les promesses à visées électorales comme celle motivées par la cupidité. Je me suis inquiété comme vous de voir il y a 3 ans l’abandon des projets « ficelés » , prêts aussi à créer immédiatement des emplois, cela bien que, comme vous, je n’étais pas non plus favorable à tous en 2010. Pourtant, ne pensez-vous pas comme moi qu’ils nous auraient un peu protégés de la crise financière… Ceux qui prétendent aujourd’hui « être pour le développement de La Réunion » les ont hier quand-même tous annulés du Tampon à Saint-Denis en passant par La Montagne : la déviation du Tampon, l’énergie thermique des mers, le photovoltaïque, l’A380, la MCUR... et les derniers projets de TCSP et de route littorale de l’Etat.

De qui se moque-t-on ? Ils ont fait perdre dix années supplémentaires à La Réunion

Monsieur « FP », sans prétendre la connaître mieux qu’autrui, souhaitez avec moi qu’à La Réunion, notre majorité silencieuse soit favorable à une solution véritablement « durable pour les générations futures » et protégeons-la de toute démagogie facile.

Je ne suis pas certain aujourd’hui que cette route dite « moderne, gratuite, sécurisée » le soit encore compte tenu des écueils actuels. Le tracé en mer se révèle être une impasse ; il faut l’abandonner.

Venez discuter avec nous dans les débats publics que l’association ATR organise.

Enquête publique jusqu’au 25 juillet 2013 : demandons

- De ne pas autoriser la NRL à occuper le domaine public maritime, le DPM !

- L’annulation de la DUP !

La pétition en ligne http://www.petitionpublique.fr/PeticaoVer.aspx?pi=P2013N42508

Et sur la page Facebook de l’ART-FNAUT (Alternatives Transports Réunion)

La route en mer, c’est trop cher ; c’est pas beau, car c’est trop haut ; c’est risqué, il y a danger !

François Payet, architecte

Route du littoral

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